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Chanel célèbre les artisans du luxe à Dakar

Depuis la première édition en 2002, c’est la première fois que Chanel présente sur le continent africain son évènement dédié aux petites mains de la maison de couture.

Là où le pas lourd d’hommes mûrs en robe noire martelait le silence, Chanel fait défiler sur des sons électroniques des mannequins graciles couverts de broderies, de dentelles, de sequins et d’or.

La maison de luxe française a diffusé mardi la couleur et la matière comme une onde dans la pénombre de l’immense salle des pas perdus de l’ancien palais de justice de Dakar. C’est la première fois que Chanel se transportait en Afrique pour célébrer les artisans des métiers d’art de la mode qui travaillent pour elle.

En ces temps sombres, la directrice artistique Virginie Viard a fait souffler l’énergie des années 1970 à travers le péristyle moderniste au plan orthonormé, associant coloris, motifs et coupes seventies aux incontournables camélias, dans des manteaux longs et étroits, sur des pantalons moulants et évasés et des souliers plateformes.

L’Afrique est là, tout au bout de la presqu’île du Cap-Vert face à l’océan. Mama Sané, Ada dans le film «Atlantique», ouvre le défilé qui ondule entre les colonnes élancées sur les scansions musicales du Sénégalais Obree Daman et de la DJ sud-africaine DBN Gogo. Des célébrités comme le rappeur sénégalais Nix et la chanteuse burundaise Khadja Nin côtoient le rappeur américain Pharrell Williams et la top-modèle britannique Naomi Campbell dans le public.

Les stars, ce sont les petites mains de Chanel et, malgré de discrètes références peut-être au lieu, la collection elle-même est une collection Chanel, laisse entendre la maison. Mais avec la pandémie de Covid-19, Chanel a eu trois ans pour étoffer son projet dakarois et tisser, dit-elle, un «dialogue créatif» appelé à durer avec la scène culturelle sénégalaise.

Chanel présente depuis 2002 une collection Métiers d’art en dehors du calendrier officiel des défilés; elle met à l’ouvrage la virtuosité des brodeurs, plumassiers, gantiers et orfèvres dont Chanel emploie depuis des décennies le savoir-faire unique et fragile.

L’évènement a voyagé à New York, Salzbourg ou Shanghai, mais jamais encore sur le continent africain.

Le choix de Dakar relève plus du hasard des rencontres faites par les créateurs de la maison et du rayonnement culturel grandissant de la capitale sénégalaise que d’une stratégie commerciale ciblant l’Afrique, dit Bruno Pavlovsky, président des activités mode de Chanel.

«Clientes fidèles»
Dakar «a fait naître des talents à l’avant-garde de la création artistique, dans tous les domaines (danse, musique, art contemporain, mode, cinéma, littérature, etc.) qui sont chers à la Maison», dit-il.

Quant à l’ancien tribunal, désaffecté au milieu des années 2000 au point de devenir un dépotoir désormais purgé, c’est «l’un des plus beaux endroits dans lequel il nous a été donné de présenter une collection», dit la directrice artistique.

Le palais est depuis quelques années le réceptacle d’évènements culturels comme la Biennale d’art contemporain africain.

Le défilé Métiers d’art 2022/2023 est le point d’orgue d’une programmation de trois jours présentée comme une plateforme d’échanges artistiques. Le show a été précédé par une performance chorégraphique fruit de la collaboration entre le Français Dimitri Chamblas et l’École des sables, le centre de création de Germaine Acogny au sud de Dakar. Chanel a demandé aux élèves des écoles de cinéma Kourtrajmé de Montfermeil, dans la banlieue parisienne, et de Dakar de documenter le défilé.

En janvier 2023, le 19M, l’espace inauguré par Chanel en 2021 dans le nord de Paris pour héberger 11 des maisons d’art travaillant pour elle, installera à Dakar une galerie hors les murs consacrée aux métiers de la broderie et du tissage, avec le concours de l’Institut fondamental d’Afrique noire. En mai, les programmes de la galerie du 19M-Dakar seront présentés à Paris et les maisons d’art résidentes du 19M s’ouvriront aux étudiants sénégalais.

Interrogé sur la volonté de créer une tête de pont commerciale en Afrique, Bruno Pavlovsky rappelle que, si elle n’y a pas de boutique mode, Chanel est présente à Dakar par l’intermédiaire de distributeurs vendant ses parfums, produits de beauté et lunettes. Il évoque «un certain nombre de clientes fidèles» au Sénégal.

«À terme, tout est envisageable mais cela supposera d’étudier que les conditions sont réunies pour s’implanter sur ce nouveau marché», dit-il.

Jean Louis Verdier - Rédacteur en Chef Digital - Paris- Dubaï - Hong Kong dakarecho@gmail.com - Tél (+00) 33 6 17 86 36 34 + 852 6586 2047

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