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William Ruto proclamé vainqueur sur le fil avec 50,5 % des voix

William Ruto proclamé vainqueur sur le fil avec 50,5 % des voix

Les partisans de Raila Odinga, vétéran de la vie politique qui menait sa cinquième campagne présidentielle, contestent ce résultat.

Lundi 15 août autour de 18 heures, la commission électorale du Kenya (IEBC) a déclaré le vice-président sortant, William Ruto, 55 ans, vainqueur de l’élection présidentielle avec 50,5 % des voix.

Son parti remporte également le Sénat tandis que celui de son adversaire Raila Odinga, juste derrière à 48,9 %, domine l’Assemblée nationale. À 77 ans, le vétéran de la politique kényane échoue pour la cinquième fois à l’élection présidentielle.

Quelques minutes plus tôt, dans l’auditorium du centre culturel de Bomas au sud du ­Nairobi, où le dépouillement et l’annonce du résultat étaient ­organisés, une scène violente éclate. Des partisans d’Odinga, sans doute avertis de leur défaite, tentent d’empêcher l’arrivée du président de l’IEBC et s’emparent de la scène en fracassant le ­mobilier.

Des voix hurlent que le matériel de la commission a été piraté. Ils sont évacués manu ­militari par la police. La chorale qui a chanté toute la journée ­tente péniblement de couvrir le chaos.

Dans la foulée, quatre commissaires sur les sept qui composent l’IEBC se désolidarisent de leur président et refusent les résultats à venir, les qualifiant d’« opaques » sans avancer plus de preuves.

Ces incidents laissent à penser que le résultat du scrutin risque de faire l’objet de recours devant la Cour suprême, comme ce fut le cas en 2017, l’élection ayant été alors annulée pour ­cause d’« irrégularité ».

La ­répression policière avait fait des dizaines de morts. Le pays reste par ailleurs hanté par les ­violences de 2007, la contestation des résultats par Raila Odinga ayant à l’époque mené à des ­affrontements interethniques qui s’étaient soldés par plus de 1 100 morts et 600 000 déplacés.

Dans les bastions de William Ruto, telle que la ville d’Eldoret dans l’ouest du pays, la foule qui attendait depuis six jours le ­résultat de l’élection exulte. Elle saute et danse sur place, sifflant et trompettant dans les vuvuzelas en clamant une victoire à laquelle elle osait à peine croire.

Coup de tonnerre
Le résultat est une surprise dans la mesure où Odinga bénéficiait du soutien du président sortant, Uhuru Kenyatta, qui quitte la scène après dix ans au pouvoir. Selon Njoki Wamai, professeur-assistant à USIU-Africa, « derrière la défaite d’Odinga, les électeurs ont sanctionné Kenyatta, accusé d’avoir protégé ses intérêts économiques durant la crise plutôt que ceux de ses concitoyens. » Son bastion de la région du mont ­Kenya, gros pourvoyeurs de voix, a en effet été dominé par William Ruto, ce qui a fait l’effet d’un coup de tonnerre dans le pays.

Quant à Ruto, sa stratégie consistant à opposer les hustlers, ces petites gens qui se battent pour gagner leur pain, aux dynasties d’héritiers des grandes fortunes qui dirigent la classe politique depuis l’indépendance de 1963, semble avoir porté ses fruits. « Ruto est en campagne depuis 2017, il a labouré le centre du pays en donnant énormément d’argent à l’Église, ce qui lui a permis de sécuriser le vote conservateur », ajoute Wamai.

Homme politique parti de rien, au parcours marqué par des soupçons récurrents de corruption, ainsi que par des ­accusations de crimes contre l’humanité par la Cour pénale ­internationale pour son rôle dans les violences de 2007, William Ruto n’est pourtant pas encore officiellement président.

Le camp d’Odinga a sept jours pour ­déposer un recours auprès de la Cour suprême, ce qui pourrait conduire à la tenue d’un nouveau scrutin. De son côté, Ruto a tenu un discours d’unité et de réconciliation à l’issue de l’annonce de sa victoire.

Mais alors que la nuit tombait sur Nairobi, les premiers incidents ont éclaté. Des attrou­pements bloquaient plusieurs routes de la ville et des partisans de Raila Odinga se sont mis à caillasser les voitures en hurlant leur mécontentement.

Une partie de la Commission électorale rejette les résultats
Quatre des sept membres de la Commission électorale du Kenya ont rejeté lundi 15 août les résultats à venir de l’élection présidentielle, a annoncé lors d’une conférence de presse la vice-présidente de cet organe indépendant soumis à une intense pression après six jours d’attente.

«À cause du caractère opaque du processus (…) nous ne pouvons pas assumer la responsabilité des résultats qui vont être annoncés», a déclaré en appelant les Kényans au «calme» la vice-présidente Juliana Cherera, entourée de trois autres commissaires.

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