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Le Salvador, premier pays au monde à faire du bitcoin une monnaie légale

Le Salvador est depuis mardi le premier pays au monde à faire du bitcoin une monnaie légale, à côté du dollar américain, une initiative critiquée par les organismes financiers internationaux qui a débuté avec un crash du système informatique.

« @chivowallet ne fonctionne pas, nous l’avons déconnecté pendant que nous augmentons la capacité des serveurs », a écrit sur Twitter tôt mardi le populaire président Nayib Bukele, initiateur de la réforme monétaire en dépit d’une forte réticence au sein de la population.

Le gouvernement a acheté ses 400 premières pièces, pour une valeur marchande de 21 millions de dollars.

Il a également lancé le porte-monnaie électronique « Chivo » (« Super », en langage familier) nécessaire pour effectuer des transactions de la vie quotidienne en bitcoins avec son téléphone portable et offert 30 dollars de bienvenue lors de son téléchargement.

Pour le chef de l’Etat et son gouvernement, le bitcoin permettra notamment aux Salvadoriens d’économiser 400 millions de dollars de frais bancaires lors des envois d’argent par la diaspora, notamment installée aux Etats-Unis, qui représentent 22% du PIB du pays.

Mais selon de récents sondages plus des deux-tiers des 6,5 millions de Salvadoriens disent vouloir continuer à utiliser exclusivement le dollar américain, la monnaie légale du Salvador depuis 20 ans.

« Ce bitcoin, c’est une monnaie qui n’existe pas, c’est une monnaie qui ne va pas profiter aux plus pauvres, mais aux plus riches. Qui, étant pauvre, peut investir alors qu’il a à peine de quoi manger ? », s’enflamme José Santos Melara, un vétéran de la guerre civile qui a déchiré le Salvador de 1980 à 1992, et qui a manifesté vendredi pour demander au Parlement de renoncer au bitcoin.

Cependant à El Zonte où la cryptomonnaie est utilisée dans la vie courante depuis 2019, Mike Peterson, un surfeur californien de 47 ans installé sur ces plages de la côte pacifique salvadorienne, défend le bitcoin.

« Beaucoup de gens n’ont pas accès à des comptes bancaires (…) Maintenant ils peuvent faire des paiements en ligne, envoyer ou recevoir de l’argent avec des membres de leur famille et faire tout cela avec des frais très bas ou presque inexistants », dit-il à l’AFP.

« Personne n’est obligé »
Des économistes, mais également la Banque Mondiale, le Fonds monétaire international (FMI) ou la Banque interaméricaine de développement (BID) ont eux exprimé leur scepticisme.

Cette mesure aura « un impact négatif » sur les conditions de vie des Salvadoriens en raison de « la forte volatilité du taux de change » du bitcoin, et aura un impact « sur les prix des biens et services », selon son confrère de l’Université du Salvador Oscar Cabrera.

Le Parlement salvadorien a voté en juin la loi stipulant que la valeur du bitcoin « sera établie librement par le marché » et obligeant tout commerce à « accepter le bitcoin comme moyen de paiement ».

Le gouvernement laisse cependant la possibilité lors d’une transaction avec le portefeuille électronique Chivo de convertir immédiatement le montant en son équivalent en dollars.

« Personne n’est obligé d’utiliser » le bitcoin, « le dollar est la monnaie de référence pour les prix, les salaires et les enregistrements comptables dans le pays », souligne le gouvernement qui a affecté 203 millions de dollars a un fonds destiné à garantir la convertibilité automatique du bitcoin en dollars américains.

Avant l’apparition d’une nouvelle monnaie dans leur portefeuille, les Salvadoriens se montraient réservés « ne voyant pas en quoi elle aura un impact positif pour changer de manière significative leurs conditions de vie », a estimé la directrice des sondages de l’Université centraméricaine (UCA) Laura Andrade.

Ils plébiscitent néanmoins à plus de 80% leur président de 40 ans, qui interagit énormément sur les réseaux sociaux et apparait en toutes circonstances avec une casquette vissée à l’envers sur la tête.

« Le président conserve sa popularité parce que les personnes pour lesquelles il gouverne, les masses populaires, n’ont pas encore été affectées par les mesures qu’il a prises », estime Domingo Alfaro, directeur de l’école de communication de l’université privée Universidad Tecnologica (UTEC).

M. Bukele est cependant critiqué pour son autoritarisme et son mépris de la séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. Il a reçu vendredi l’aval de la Cour suprême du Salvador l’autorisant à se représenter en 2024. Un arrêt « contraire à la Constitution salvadorienne qui établit que la réélection immédiate n’est pas autorisée », ont fustigé les Etats-Unis.

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