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Dernière alerte d’un cassandre -Par Mamadou Oumar NDIAYE

Au train où vont les arrestations, interpellations et emprisonnements de militants de l’opposition et d’activistes de la société civile, devant aussi la tendance de plus en plus lourde d’interdire les manifestations de cette même opposition, sans compter le harcèlement dont est l’objet le leader de Pastef, Ousmane Sonko, il est permis de se demander si le Sénégal est encore un pays démocratique.

Pour des détournements de « unes » de journaux, pour des satires, pour des chansons iconoclastes, pour des « posts » critiques sur les réseaux sociaux, pour avoir crié « libérez Pape Alé » devant les bureaux du Premier ministre, pour avoir voulu se rendre au domicile de leur leader politique, des jeunes gens — dont des mineurs ! — sont arrêtés et envoyés en prison. Pour avoir distribué des flyers… appelant à s’inscrire sur les listes électorales, des militants de l’opposition ont été envoyés au gnouf !

Le domicile du leader de l’opposition, Ousmane Sonko, et même la cité de Keur Gorgui où il réside sont en état de siège avec présence de chars de combat, de pick-up et de fourgonnettes remplies de policiers. A tous les carrefours de Dakar et sur tous les grands axes, des escouades de policiers et de gendarmes en tenues de combat et munis d’équipements et de véhicules anti-émeutes.

Pour avoir voulu rendre une visite de courtoisie à un maire membre de son parti dans sa commune, le même leader de l’opposition a vu son cortège bombardé de grenades lacrymogènes. Le méga-meeting que son parti projetait d’organiser ce vendredi à Mbacké a été interdit par le préfet — en réalité par le ministre de l’Intérieur actionné par le président de la République — sous un prétexte plus que loufoque.

Depuis quelques mois, il ne se passe plus une semaine, que dis-je, un jour sans que des arrestations soient opérées dans les rangs de Pastef, de Yewwi Askan Wi ou des activistes proches de cette galaxie. Une frange radicale de l’opposition qui refuse de tendre l’autre joue et affiche sa détermination à rendre coup pour coup, à répondre au coup de pied de l’âne — pardon du cheval ! — apériste et à appliquer désormais la loi du Talion.

D’un côté, un pouvoir aux abois qui a surarmé ses forces de sécurité et dont on dit qu’il possède des milices; en face, des milliers de jeunes gens fanatisés qui rêvent d’être des martyrs pour leur cause et pour défendre leur leader-gourou.

Le Sénégal n’a jamais été aussi proche d’un embrasement. C’est peu de dire que les citoyens ont tous peur, que les amis du Sénégal s’inquiètent, que les investisseurs, à défaut de se faire la malle, ont gelé tous leurs projets d’investissements.

Pendant ce temps, et malgré les mesures prises censées diminuer les prix des denrées de première nécessité et récemment des loyers, jamais les Sénégalais n’ont été confrontés à une baisse aussi drastique de leur pouvoir d’achat au point que la classe moyenne — soupape sociale et filet de sécurité par excellence—s’est littéralement effondrée.

Bref, tous les ingrédients d’un cocktail explosif sont réunis en ce moment dans notre pays. On parle de 2024 mais au rythme où vont les choses, la déflagration paraît plutôt proche voire imminente ! De ce point de vue, ce weekend de tous les dangers sera particulièrement à surveiller.

Mais il est encore temps, peut-être, pour les médiateurs et autres régulateurs sociaux d’entrer en action pour désamorcer la tension et éteindre la mèche du baril de poudre qui est déjà allumée. Encore une fois, il suffirait d’une étincelle pour que tout saute. La faute à un régime autiste qui refuse de comprendre qu’aucune soldatesque ne peut mater un peuple déterminé. Et que la politique, c’est l’art du compromis.

Remettant, ce mardi, le prix Houphouët-Boigny pour la paix à l’ancienne chancelière allemande Angela Merkel, le président de la République a dit qu’entre autres qualités, elle mérite cette récompense « pour son œuvre de femme d’Etat avisée qui a su toujours cultiver le dialogue et le compromis ».

Justement, monsieur le président de la République, ce dialogue et ce compromis, c’est ce qu’il faut promouvoir dans notre cher pays et jeter aux orties cet art de gouverner par la répression si prisé par vos amis Erdogan et Kagamé !

Hélas, tous ces préfets, ces chefs policiers, ces chefs gendarmes, ces juges aux ordres et autres fonctionnaires zélés ne comprennent pas qu’à force de s’acharner sur Ousmane Sonko, ils accélèrent… la cadence de son entrée au Palais de la République !

Ndlr : A force d’alerter, de faire des prédictions apocalyptiques, je risque d’apparaître comme une sorte de Nostradamus, un Cassandre, un oiseau de mauvais augure. Ne voulant pas, à force de crier au loup, voir apparaître sa queue ou encore faire de l’acharnement, ceci est sans doute la dernière alerte que je lance ! Oh, rassurez-vous, je ne vais pas casser ma plume mais sans doute parler de choses moins stressantes car il n’est chose plus difficile que de parler à des autistes…ou à des gens déterminés à se rentrer dedans. Dieu sauve le Sénégal !

Mamadou Oumar NDIAYE

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