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Le refus de la paix – Par Lamine Diouf

Dire que l’élève a dépassé le maître, entre le président de la République Macky Sall et son mentor politique et prédécesseur Abdoulaye Wade, n’est certainement pas insulter l’histoire.

Dans tous les domaines, les réalisations du leader de l’APR, depuis son accession au pouvoir, en 2012, font de lui un des présidents avec le bilan le plus fourni. Sur les plans économique, social et infrastructurel, Macky Sall a élevé le niveau des chiffres à des hauteurs inédites.

Malheureusement, ces ‘’performances’’ concernent d’autres aspects moins reluisants de sa gouvernance : l’impunité, l’ingérence de la politique dans la justice, la persécution des opposants et, généralement, le recul démocratique constaté au Sénégal.

Plus on s’approche de l’élection présidentielle du 25 février 2024, plus la tension monte entre les acteurs politiques de l’opposition et ceux au pouvoir. Une situation qui rappelle étrangement celle qu’a vécue le Sénégal au crépuscule de la présidence du régime de l’ancien président Abdoulaye Wade.

Mais sur chaque recul démocratique, le régime du président Macky Sall pousse le bouchon plus loin que celui du leader du Parti démocratique sénégalais (PDS).

Dans le rapport de l’Organisation nationale des Droits de l’homme du Sénégal (ONDH), avec le soutien de la Fédération internationale des ligues des Droits de l’homme (FIDH), dans la perspective de l’examen périodique universel du Sénégal en février 2009 par le Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies, l’ONDH constatait ‘’la persistance de graves et récurrentes violations des principales libertés fondamentales’’.

‘’Déployer les efforts nécessaires pour que la paix règne dans ce pays’’
La même organisation est montée au créneau, hier, pour manifester ‘’toute son indignation et sa préoccupation face au climat politique qui est très tendu’’.

L’ONDH rappelle, par la même occasion, ‘’la responsabilité de tous les acteurs de déployer les efforts nécessaires pour que la paix règne dans ce pays et que les droits et libertés fondamentaux soient absolument respectés’’.

Cette sortie fait suite aux récents événements survenus à Mbacké et à l’affaire opposant le leader de Pastef Ousmane Sonko et le ministre du Tourisme Mame Mbaye Niang.

La seconde affaire a fait vivre à la capitale Dakar un jeudi 16 février 2023 très tendu entre les forces de l’ordre et l’opposant le plus en vue pour la prochaine Présidentielle. En effet, convoqué pour un procès en diffamation dans le cadre d’un scandale supposé du Prodac, géré à l’époque par Mame Mbaye Niang, l’opposant, soutenu par ses militants, s’est heurté à une escorte musclée des forces de l’ordre, ayant même été extirpé de force de sa voiture, la vitre de son véhicule cassée, pour être ramené chez lui.

Quelques instants après, Sonko a révélé qu’il était interdit de sortie et que, désormais, il était même sous ‘’résidence surveillée’’.

Au même moment, le ministre du Tourisme, qui était lui aussi accompagné de ses militants, n’a pas eu droit à ce traitement.

Cette affaire, qui reflète l’animosité entre les deux camps politiques, n’est qu’un énième exemple des privations de libertés notées sous le régime de Macky Sall. Les interdictions de manifestations semblent être la règle, alors qu’il s’agit d’une liberté consacrée par la Constitution. Rien que pour aujourd’hui, les manifestations prévues respectivement devant le Conseil national de régulation de l’audiovisuel (CNRA) et à la place de l’Indépendance dimanche sont interdites. Ces rassemblements dénoncent le recul démocratique noté au Sénégal, dont la suspension du signal de la télévision Walfadjri pour une semaine par l’autorité de régulation jugeant la couverture des événements récents de Mbacké irresponsable.

Mais c’est l’opposition politique qui en souffre le plus de la restriction des libertés. D’ailleurs, la coalition Yewwi Askan Wi, dans un communiqué rendu public hier, s’indigne de ‘’la énième violation des droits d’Ousmane Sonko et prend à témoin l’opinion nationale et internationale des dérives scandaleuses de Macky Sall qui installe notre pays dans un totalitarisme intégral. Elle interpelle les organisations des Droits de l’homme et appelle tous les Sénégalais épris de paix et de démocratie à prendre leurs responsabilités afin de sauver le Sénégal’’.

La coalition d’opposants constate, de plus, ‘’que Macky Sall ne laisse aucun autre choix à l’opposition et au peuple sénégalais que celui de faire face’’. Elle entend prendre toutes les dispositions idoines pour défendre ses droits.

‘’Judiciarisation de la vie publique’’
Cette répartition des torts est partagée par le Comité pour la plateforme de réflexions Doleel PIT-Sénégal Ngir Defaraat Reewmi.

Selon leur déclaration du 14 février 2023, ‘’en réalité, depuis son avènement au pouvoir en mars 2012, le régime du président Macky Sall s’est caractérisé par une gouvernance autoritaire marquée par une judiciarisation, sans précédent, de la vie publique, à tel point que les arrestations arbitraires et l’embastillement systématique d’activistes et de militants politiques, sous les motifs les plus fallacieux, semblent constituer la marque de fabrique du régime de Benno Bokk Yaakaar’’.

Le constat reste que depuis les manifestations violentes de mars 2021, qui ont fait 14 morts, des opposants (membre du parti Pastef/Les patriotes d’Ousmane Sonko), des activistes, des artistes sont systématiquement arrêtés par les autorités.

Le Comité pour la plateforme de réflexions Doleel PIT-Sénégal Ngir Defaraat Reewmi » est d’avis que ‘’le peuple sénégalais attend du président Macky Sall, crédité, comme son prédécesseur, à tort ou à raison, d’un bilan matériel significatif, quoi que terni par une gouvernance désastreuse, de sauver les meubles. Il pourrait, ainsi, parachever son parcours controversé par l’organisation irréprochable des prochaines présidentielles auxquelles la Constitution lui interdit de participer’’.

L’Organisation nationale des Droits de l’homme (ONDH), quant à elle, rappelle que le Sénégal est un pays fruit d’une construction étatique et démocratique exemplaire. C’est ainsi qu’elle suggère ‘’que ceux qui gouvernent préservent un espace d’expression des droits et libertés fondamentaux. Que tous se soumettent aux prescriptions de la justice, en utilisant les voies de droit offertes à l’interne comme à l’international’’.

Lamine DIOUF

Jean Louis Verdier - Rédacteur en Chef Digital - Paris- Dubaï - Hong Kong dakarecho@gmail.com - Tél (+00) 33 6 17 86 36 34 + 852 6586 2047

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