Soulagement, et même « fierté », dominaient mardi au Sénégal au lendemain de la décision du président Macky Sall de ne pas briguer un troisième mandat en février 2024, décrispant un climat politique très tendu.
Une pluie de réactions, y compris à l’international, ont salué l’homme d’Etat et une décision d’apaisement dans un pays qui a connu début juin ses pires troubles depuis des années. L’opposition a nuancé ce concert de louanges, soulignant le rôle de toutes les vies « sacrifiées » dans des manifestations pour la défense de la démocratie et réclamant désormais « des élections inclusives ».
« Mes chers compatriotes, ma décision longuement et mûrement réfléchie est de ne pas être candidat à la prochaine élection du 25 février 2024 », a déclaré Macky Sall lundi soir dans une adresse à la nation, mettant fin à un suspense de longs mois.
Le flou entretenu par le président Sall sur ses intentions par rapport à ce scrutin et la condamnation à deux ans de prison de l’un de ses principaux opposants, Ousmane Sonko, avaient contribué à rendre la situation explosive.
La condamnation de l’opposant dans une affaire de mœurs, qui le rend en l’état actuel inéligible, a engendré début juin de graves troubles, faisant 16 morts selon les autorités, 24 selon Amnesty international et 30 selon l’opposition. L’opposant avait appelé dimanche soir à la mobilisation, quelle que soit l’issue du discours pour mener « le combat définitif ».
Pour M. Sonko, l’objectif principal de Macky Sall est de l’écarter de la course à la présidence.
« Modèle démocratique »
Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a estimé sur Twitter que cette décision « constitue un exemple très important pour son pays et pour le reste du monde ».
Je voudrais exprimer ma profonde estime pour le Président Macky Sall du Sénégal et pour les qualités d’homme d’état dont il a fait preuve.
Sa décision constitue un example très important pour son pays et pour le reste du monde. https://t.co/wRaLsCkCqX
— António Guterres (@antonioguterres) July 4, 2023
Moussa Faki, président de la Commission de l’Union africaine, salue « une décision sage et salutaire ». « J’exprime mon admiration au grand homme d’Etat qu’il est d’avoir privilégié l’intérêt supérieur du Sénégal et de préserver ainsi le modèle démocratique sénégalais qui fait la fierté de l’Afrique », a-t-il déclaré.
1/2: Je salue la décision sage et salutaire de mon frère, le président @Macky_Sall, de ne pas se porter candidat à l’élection présidentielle de 2024.
— Moussa Faki Mahamat (@AUC_MoussaFaki) July 3, 2023
Le chef de d’Etat bissau-guinéen Umaro Sissoco Embalo, président en exercice de l’organisation des Etats ouest-africains « salue avec fierté sa décision courageuse de grand Homme d’Etat », a-t-il dit sur ses réseaux sociaux.
Je viens d’avoir un long entretien téléphonique avec mon grand frère le Pdt @Macky_Sall. Je salue avec fierté sa décision courageuse de grand Homme d’Etat.
On peut succéder à @Macky_Sall mais il est difficile de le remplacer.
Je souhaite au peuple Sénégalais de continuer sur… pic.twitter.com/fgH6dyQv3y— Umaro Sissoco Embaló (@USEmbalo) July 3, 2023
Le président nigérien Mohamed Bazoum « formule le vœu que cette décision mûrement réfléchie apaise définitivement le climat politique dans ce pays frère ».
Je salue l’annonce faite ce soir par le président @Macky_Sall du Sénégal. Je formule le vœu que cette décision mûrement réfléchie apaise définitivement le climat politique dans ce pays frère. #MB
— Mohamed Bazoum (@mohamedbazoum) July 3, 2023
Paris a aussi salué sa décision en jugeant que « le Sénégal démontre à nouveau la solidité de sa longue tradition démocratique », selon un communiqué du ministère français des Affaires étrangères.
Au Sénégal, le président fait la Une de tous les journaux. « Macky, quelle grandeur! », « Macky sort par la grande porte », « Macky au panthéon des grands hommes »… titrent entre autres les quotidiens.
« J’ai un sentiment de soulagement, de fierté parce que l’évolution de la démocratie sénégalaise a pris du cran… Les perspectives sont bonnes », estimait à Dakar Hassane Dabo, un cadre d’entreprise.
« Son discours change beaucoup de choses. Le Sénégal est devenu stable et gouvernable. Je suis satisfait à 200% », déclare de son côté Issa Camara, qui travaille dans le secteur maritime.
Le PR @Macky_Sall bien inspiré par son pèlerinage à la Mecque en disant non à un troisième mandat, détient dans le contexte actuel un grand pouvoir de transformation considérable avec son concept la patrie avant tout. On est dans un moment par excellence de transition civile.
— Alioune Tine (@aliounetine16) July 4, 2023
« Sacrifices »
Pour Alioune Tine, figure de la société civile et ardent opposant à un troisième mandat, c’est « une délivrance ».
Macky Sall « sort par la grande porte avec un grand discours ». Abdoul Mbaye, ancien Premier ministre, fait part d' »une grande émotion » et d’un discours qui lui permet « de retrouver une grande partie du Macky Sall » d’avril 2012.
Des opposants ont nuancé ces réactions de fierté.
« Je félicite la jeunesse sénégalaise, la diaspora et tous les démocrates sénégalais. Car si le président Macky a accepté de jeter l’éponge (…) c’est parce qu’il y a eu des Sénégalais qui se sont érigés contre », a pour sa part réagi Aminata Touré, ex-Première ministre qui a rejoint l’opposition.
Je dois avouer ma grande émotion. Ce discours me permet de retrouver une grande partie du #MackySall d’avril 2012. Respect pour son appel au rassemblement et à la paix! Il faut désormais les construire et les consolider en préparant au mieux l’élection 2024.
Vive le Sénégal !— Abdoul MBAYE (@AbdoulMBAYE2019) July 3, 2023
L’opposant Khalifa Sall a salué « une belle décision », pensé à tous les morts dans des manifestations depuis 2021, une cinquantaine, « des sacrifices qui n’ont pas été vains » et plaidé pour « une élection inclusive ».
Le porte-parole de M. Sonko a simplement tweeté « Focus 2024 » avec le portrait de son leader.
M. Sonko, qui jouit d’une grande popularité auprès de la jeunesse, n’a cessé de crier au complot du pouvoir – qui le réfute – pour l’éliminer politiquement. Il est bloqué par les forces de sécurité chez lui à Dakar, « séquestré » selon lui, depuis le 28 mai.
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