Le Conseil constitutionnel sénégalais a publié samedi une liste définitive de 20 candidats à la présidentielle du 25 février sur laquelle ne figurent pas deux opposants notables: Ousmane Sonko, actuellement emprisonné, et Karim Wade, fils et ministre de l’ex-président Abdoulaye Wade, a constaté l’AFP.
La liste comprend le candidat du pouvoir, le Premier ministre Amadou Bâ, les anciens chefs de gouvernement Idrissa Seck et Mahammed Boun Abdallah Dionne, et Bassirou Diomaye Diakhar Faye, présenté comme le candidat de substitution de M. Sonko.
M. Diomaye Faye, 43 ans, membre du parti dissous de M. Sonko, est lui aussi détenu, mais il n’a pas encore été jugé. Il est en prison depuis avril 2023 pour « outrage à magistrat » et « diffamation à l’encontre d’un corps constitué » après un message publié sur Facebook.
Ousmane Sonko, personnage central d’un bras de fer de plus de deux ans avec l’Etat qui a donné lieu à plusieurs épisodes de troubles meurtriers, n’est pas sur la liste, comme cela était attendu. Populaire parmi les jeunes, il était donné parmi les favoris de la présidentielle.
Le Conseil a, après un dernier recours de M. Sonko, écarté sa candidature en raison d’une condamnation définitive pour diffamation à six mois de prison avec sursis le 4 janvier qui le rend « inéligible pour cinq ans », une affaire l’ayant opposé à un ministre.
Dans deux autres dossiers, M. Sonko a été déclaré coupable en juin de débauche de mineure et condamné à deux ans de prison ferme, puis écroué fin juillet sous d’autres chefs d’inculpation, dont appel à l’insurrection, association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste et atteinte à la sûreté de l’Etat, une affaire pendante.
M. Sonko a dénoncé un complot pour l’empêcher de participer à la présidentielle de 2024, ce que le pouvoir dément.
La liste définitive inclut deux femmes, Rose Wardini, gynécologue et actrice de la société civile, et l’entrepreneure Anta Babacar Ngom.
C’est la première fois que le Sénégal organise une présidentielle avec autant de candidats, a affirmé samedi à l’AFP le constitutionnaliste Babacar Guèye. Cinq candidats avaient été retenus lors de la présidentielle de 2019, remportée par le président Macky Sall.
Candidature « irrecevable » de Karim Wade
L’opposant Karim Wade, fils et ministre de l’ex-président Abdoulaye Wade (2000-2012), a vu sa candidature jugée « irrecevable » en raison de sa double nationalité française et sénégalaise, selon le Conseil.
Tout candidat à la présidence « doit être exclusivement de nationalité sénégalaise, jouir de ses droits civils et politiques », dit la Constitution.
Karim Wade, 55 ans, né en France d’un père sénégalais et d’une mère d’origine française, a produit une déclaration sur l’honneur datée du 21 décembre selon laquelle il a exclusivement la nationalité sénégalaise, a indiqué le Conseil.
Or, le document de preuve qu’il a présenté est un décret daté du 16 janvier publié le lendemain au Journal officiel de la République française. La juridiction estime que les effets du décret consacrant la renonciation par M. Wade à sa nationalité française « ne sont pas rétroactifs » et que sa déclaration sur l’honneur a été « inexacte » au moment de son dépôt.
L’ancien ministre Thierno Alassane Sall, lui-même candidat, avait déposé lundi un recours contre la candidature de M. Wade, la jugeant anticonstitutionnelle.
Karim Wade a dénoncé dimanche sur X « une décision scandaleuse » et « un nouveau complot judiciaire », annonçant une saisine des juridictions internationales.
Il avait été empêché de concourir à la présidentielle de 2019 du fait de sa condamnation en 2015 à six ans de prison ferme pour enrichissement illicite. Détenu pendant plus de trois ans, il avait été gracié en 2016 par le président Sall, et vit depuis en exil à l’étranger.
L’Assemblée nationale avait voté en août une loi lui rendant son éligibilité.
A moins d’un mois et demi de l’échéance, l’incertitude est totale quant à l’issue de l’élection à deux tours.
Le Sénégal organise pour la première fois une élection présidentielle sans la participation du président sortant.
Macky Sall, élu en 2012 pour sept ans et réélu en 2019, a déclaré en juillet qu’il ne se représenterait pas en février 2024. Il a alors choisi le Premier ministre Amadou Bâ pour lui succéder.
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