L’homme politique algérien Rachid Nekkaz propose à Ousmane Sonko une stratégie en 3 actes pour devenir Président en février 2024 (Plan B) et éviter un nouveau coup d’Etat en Afrique et une guerre civile jihadiste. Il sera à Dakar du 13 au 15 septembre.
La justice sénégalaise vient de prononcer le caractère définitif de la condamnation d’Ousmane Sonko dans une affaire de » corruption de la jeunesse » pour laquelle il a été condamné à deux ans de prison ferme le 1er juin 2023. Il a été déchu de ses droits électoraux et radié des listes électorales.
Constitutionnellement parlant, le leader du Pastef – actuellement en prison pour une autre affaire – ne pourra donc pas concourir directement et personnellement à l’élection présidentielle qui doit se tenir le 25 février 2024.
Ce scénario-catastrophe était prévisible depuis qu’Ousmane Sonko a décidé d’engager un véritable bras de fer avec le Président en exercice Macky Sall, surtout à partir de la précédente élection présidentielle de 2019 où il était arrivé troisième avec 15% des voix.
Son discours simple, aiguisé et radical lui a permis de toucher, galvaniser et de conscientiser une grande partie de la jeunesse sénégalaise qui a été déçue par les promesses non tenues de développement, de réussite professionnelle et de perspectives d’avenir dans une des rares démocraties présentes sur le continent africain.
Avec son discours perçu comme anti-système et populiste, le charismatique Ousmane Sonko est devenu une menace directe pour le régime en place dont le Président s’est engagé le 3 juillet dernier à ne pas briguer un 3ème mandat. Sage décision qu’on doit respecter, saluer et applaudir car elle évitera peut-être un remake du scénario gabonais d’un coup d’Etat post-électoral dont la cause immédiate fut le troisième mandat du Président déchu Ali Bongo le 30 août dernier.
Le leader du Pastef risque aussi de remettre en question les intérêts des multinationales étrangères qui opèrent dans le pays. Son livre » Pétrole et gaz au Sénégal » paru en 2017, ne souffre d’aucune ambiguïté quant à la volonté d’Ousmane Sonko de rétablir la souveraineté économique sur les richesses naturelles du pays. Pris en étau entre la justice implacable du régime et les intérêts économiques étrangers, le candidat de la jeunesse sénégalaise a une marge de manœuvre très faible.
Sa détention décidée le 28 juillet 2023, suivie d’une grève de la faim entamée depuis le 30 juillet, puis la dissolution de son parti » Pastef » actée le 31 juillet constituent une cascade d’événements sur lesquels Ousmane Sonko n’a plus prise. Il a perdu le contrôle de son agenda politique dans un contexte régional complètement différent de celui de mars 2021 où – après 5 jours seulement d’incarcération – des milliers de jeunes supporters étaient descendus dans la rue pour obtenir la libération de prison de leur leader. La presse internationale avait massivement relayé les images de cette ferveur populaire.
Deux ans après, la donne a complètement changé. Les projecteurs des mass-médias internationaux se sont détournés du Sénégal pour se concentrer sur l’actualité autrement plus croustillante et vendeuse des coups d’Etat militaires successifs au Niger et au Gabon et d’une éventuelle confrontation militaire à l’initiative de la CEDEAO afin de rétablir le Président Mohamed Bazoum à Niamey.
Ousmane Sonko et les cadres de son parti ne semblent pas avoir ajusté leur algorithme géopolitique à 6 mois de cette échéance électorale cruciale pour le pays. Ils doivent impérativement se ressaisir, auquel cas, ils risquent de manquer leur rendez-vous avec l’Histoire.
Car après 5 semaines de grève de la faim, il est devenu clair pour tout observateur averti que cette « arme biologique » ne le fera pas sortir de prison, ni l’aidera à obtenir sa qualification pour participer à la prochaine présidentielle. Faut-il pour autant se résigner et abandonner un combat politique perdu d’avance ? Assurément, non.
Il existe une option salutaire et simple que l’opposition sénégalaise n’a pas encore explorée et que j’ai eu le privilège de mettre en place en Algérie en mars 2019.
Cette ruse politique – qui permet de contourner tous les obstacles judiciaires et constitutionnels – présente plusieurs atouts dont le principal est de remettre en selle le leader Ousmane Sonko dans un rôle politique actif et non de le maintenir dans une posture de victimisation improductive et suicidaire pour lui, pour son parti et pour les millions de jeunes qui le soutiennent corps et âme.
Ousmane Sonko : Président en trois actes
Acte 1: Il s’agit pour Ousmane Sonko d’adouber rapidement un candidat sage et fin politiquement qui jouera sa doublure de confiance à la présidentielle de février 2024.
Acte 2 : Si ce candidat adoubé gagne la prochaine élection grâce à la mobilisation de toute l’opposition, de la jeunesse et de la diaspora, il accordera aussitot – le jour même de son intronisation – une amnistie générale ou une grâce aux prisonniers politiques et créera par décret le poste de vice-président qui sera confié à Ousmane Sonko. Ceci en vertu des articles 43 et 51 de la Constitution.
Acte 3 : Immédiatement après, le président-doublure démissionnera et Ousmane Sonko deviendra constitutionnellement le nouveau Président du Sénégal.
Pour réussir ce scénario politique gagnant en trois actes, Ousmane Sonko doit d’abord reprendre toute ses forces et l’entière plénitude de sa lucidité en cessant immédiatement sa grève de la faim inefficace politiquement. Car à s’entêter sur cette voie sans issue, il risque de connaître le même triste sort que celui du militant-député irlandais de l’IRA Bobby Sands que la Première ministre britannique de l’époque Margaret Thatcher a laissé mourir le 5 mai 1981 après 66 jours sans manger.
En effet, la responsabilité d’un homme politique est à la fois différente et plus importante que celle d’un simple militant qui agit en fonction de ses propres convictions et de ses valeurs. Un leader politique doit développer en plus une vision globale des enjeux sociétaux et géopolitiques qui l’entourent. Et surtout, il doit détenir l’art du kaïros, c’est à dire être capable à la fois d’essaimer les éléments de langage les plus appropriés à ses cibles électorales et agir au moment le plus approprié, là où la fenêtre de tir pour gagner la bataille politique est la plus forte.
A Ousmane Sonko de démontrer – dans les semaines à venir – au peuple sénégalais s’il est un véritable homme politique visionnaire ou un simple militant anti-système.
Laisser un commentaire