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Le réveil numérique de l’Afrique

C’est le continent du mauvais côté de la fracture numérique en termes d’infrastructures, mais c’est aussi celui où le secteur connaît sa plus grande progression. Un quart de siècle après le développement d’Internet, l’Afrique est en pleine effervescence. Ce qui attire la convoitise de tous les grands groupes mondiaux du secteur.

D’un côté, les Gafa américains (Google, Amazon, Facebook, Apple) ; de l’autre, les BATX chinois (Baidu, Alibaba, Tencent et Xiaomi), encore plus dynamiques. Et, au milieu, d’autres opérateurs de téléphonie mobile, européens et français notamment. 45 % des clients d’Orange dans le monde sont déjà sur le continent africain, où dès 2020 le groupe réalisera l’essentiel de sa croissance. En quatre ans, le nombre de smartphones a doublé en Afrique et dépasse les 600 millions.

Mais le plus intéressant, c’est lorsque l’on place le regard à hauteur d’homme. Les sociétés africaines sont particulièrement créatives pour adapter la technologie. Le paiement mobile sans compte bancaire, lancé au Kenya en 2007, essaime à présent sur tout le continent. Dans les domaines du commerce, du crédit, de la santé, de l’éducation, des infrastructures urbaines, le potentiel est considérable et à portée de main.

Au Mali, un jeune entrepreneur a lancé un système de messagerie qui utilise le langage parlé. Dans un pays où l’alphabétisation ne touche pas encore la moitié de la population, la possibilité de communiquer à distance en bambara ou en wolof permet de sortir de l’isolement. Une autre société, basée en Allemagne, développe actuellement un système de traduction numérisée de quelque 2 000 langues africaines. Cassant là aussi d’anciennes barrières.

Diffusion du savoir
Certains pays sont en avance en termes de développement numérique. Le Rwanda, un quart de siècle après l’enfer du génocide, est à la pointe de la numérisation. Comme le Kenya, le Maroc ou encore la Guinée qui a investi plus de trois cents milliards de dollars en dix ans. Une quinzaine de « villes intelligentes » sont en cours de réalisation.

À Luanda, en Angola, des murs « intelligents », centralisant tous les services, sont en train de révolutionner l’habitat. Il s’agit le plus souvent d’expériences pilotes, mais le signal est culturellement puissant en termes de progrès.

Bien sûr, la naïveté n’est pas de mise. Le boom du numérique en Afrique ne résout pas les déséquilibres structurels du continent. Il n’est pas, en soi, synonyme de démocratie ni de lutte contre la pauvreté. Il peut même accentuer la dépendance à l’égard des grands groupes internationaux.

Et rester impuissant face à la corruption. Ces combats sont encore à mener. Mais le numérique peut encore, en Afrique, honorer une de ses promesses initiales : la diffusion du savoir.

Selon les projections de l’Onu, en 2050, l’Afrique comptera 1,5 milliard d’habitants, et 60 % d’entre eux vivront dans les villes. L’approvisionnement en énergie, en eau et en services est donc un enjeu capital. Le concept de « ville intelligente », actuellement expérimenté dans une quinzaine de pays, est encore largement un rêve, un « éléphant blanc » pour utiliser une métaphore locale, mais c’est un rêve utile.

Car si la révolution numérique reste largement dépendante des investissements étrangers en Afrique, elle offre aussi une occasion inédite de valoriser les ressources humaines. Elles sont considérables sur le continent le plus jeune. Les sociétés africaines méritent notre attention.

Avec Ouest France

Jean Louis Verdier - Rédacteur en Chef Digital - Paris- Dubaï - Hong Kong dakarecho@gmail.com - Tél (+00) 33 6 17 86 36 34 + 852 6586 2047

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