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Procès du dopage russe : Lamine Diack, Papa Massata Diack… des accusés de haut vol

Le tribunal correctionnel de Paris juge à partir de ce lundi l’affaire de corruption qui a mené à la suspension des athlètes russes aux JO de Tokyo.

Le procès de corruption visant plusieurs anciennes personnalités de l’athlétisme mondial s’ouvre ce lundi à Paris. Elles sont accusées notamment de s’être entendues pour retarder les sanctions d’athlète russes, dont le passeport biologique montrait qu’ils se dopaient. Les « Diack » père et fils sont au cœur du système, mis à jour après les dénonciations de plusieurs athlètes, dont Liliya Shobukhova.

Ancien grand patron de l’athlétisme mondial, ancien homme politique — il a été membre du parlement sénégalais, maire de Dakar et secrétaire d’État aux sports —, Lamine Diack est aujourd’hui âgé de 86 ans. Arrêté le 1er novembre 2015 à Paris, alors qu’il était invité à une conférence organisée par le comité olympique français, il a été placé en garde à vue puis mis en examen pour corruption. Ancien athlète de haut niveau, il était spécialiste du saut en longueur. Passionné de football, il a régné en maître sur la Fédération internationale d’athlétisme (IAAF), entre 1999 et 2015. Ex-membre du Comité international olympique (NDLR : il a été contraint à la démission après sa mise en examen), il a longtemps été l’un des hommes les plus influents du sport mondial, notamment sur le continent africain.

Soupçonné d’avoir ralenti le processus de sanction des athlètes russes afin de leur permettre de participer aux JO en 2012 et aux Mondiaux « à la maison » l’année suivante, il estime qu’il n’a « joué aucun rôle » et clame qu’il n’a « pris aucun engagement vis-à-vis des athlètes ». Concernant les faits d’abus de confiance, il nie avoir détourné des fonds au préjudice de l’IAAF et avoir été au courant des commissions perçues par son fils, Papa Massata Diack. Dans un autre volet du dossier, encore à l’instruction, il est soupçonné d’avoir influé sur plusieurs attributions de grands événements sportifs.

« PMT », comme il est surnommé, le fils de Lamine Diack sent le soufre. Il s’est réfugié au Sénégal et sera le grand absent du procès. C’est via la structure qu’il a montée — Pamodzi Sport Consulting, dont le compte est domicilié à Singapour — que des millions d’euros ont transité. Consultant de luxe de l’IAAF lorsque son père était président — il facturait ses prestations 1100 € par jour — le rejeton menait grande vie.

Devenu responsable marketing de l’IAAF, il ponctionnait directement (via un pourcentage allant jusqu’à 21, 8 %) et indirectement (via des boîtes intermédiaires dont il était actionnaire), des commissions impressionnantes sur les contrats de sponsoring, privant l’IAAF de certaines ressources.

L’homme aime résider dans les hôtels 5 étoiles, s’acheter des montres de luxe dans les bijouteries de Paris (pour plus de 750 000 € entre mars 2009 et avril 2012) ou d’Abu Dhabi, et les puissantes voitures (en février 2007, il s’est offert, via sa société, une Mercedes pour plus de 100 000 € puis une Porsche en 2013). Un train de vie qui forcément interroge.

Il est également accusé d’être une pièce centrale dans le dossier du dopage russe. Ses très nombreux voyages à Moscou en 2012, les échanges de SMS et les transferts de fonds, tendraient à montrer, que c’est lui qui négociait directement avec les dirigeants russes le retardement des sanctions.

Habib Cissé, l’ami avocat
Avocat français, il était le conseiller juridique de l’IAAF, et par extension, celui de Lamine Diack. Habib Cissé, soupçonné d’avoir joué les intermédiaires entre l’IAAF et l’athlétisme russe, sera présent à son procès. Plusieurs mails ont été saisis chez lui. L’un est adressé par Papa Massata Diack le 26 décembre 2012 et explique : « Apparemment une athlète russe vend la mèche sur le système dopage. Une bombe venant de Russie. » Habib Cissé, censé remettre en mains propres aux athlètes les notifications, se retrouve au cœur des échanges lorsque Liliya Shobukhova, menacée de suspension, réclame le remboursement des 450 000 € qu’elle a versé en 2011, contre une « full protection ».

« Habib, prévois de retourner les 50 000 € reçus sur le cas Shobukhova dès lundi, lui écrit par SMS Papa Diack. Valentin (NDLR : Balakhnichev, le président de la fédération russe) réclame un remboursement intégral de cette somme. Merci de me préciser les modalités pratiques. » « Bonjour, je vais remettre à AB (NDLR : Assane Ba, l’assistant de Papa Massata Diack) half today. J’ai besoin de 15 jours environ pour l’autre half (NDLR : moitié). J’expliquerai à AB pourquoi. Merci de ta compréhension », répond-il, dans un échange qui ne laisse guère place au doute.

Gabriel Dollé, un médecin au-dessus de tout soupçon…
Comment ce Français dont le CV est long comme le bras (NDLR : médecin au sein de la fédération française d’escrime, responsable du bureau antidopage au ministère des sports, président de la commission médicale à la fédération française d’athlétisme) a-t-il pu se retrouver sur le banc des accusés ? Cet Alsacien — ami d’enfance de Pierre Weiss, ex-secrétaire général de l’IAAF cité comme témoin — était médecin responsable de la lutte antidopage au sein de l’IAAF, jusqu’en septembre 2014.

Il est accusé d’avoir ralenti le processus de sanction de plusieurs athlètes. Il a perçu trois versements, de Papa Massata Diack (50 000 € en 2013), de Lamine Diack (90 000 € en 2014) ainsi qu’un de 50 000 € en 2015, d’une personne non identifiée. Lors d’une de ses auditions, il a admis avoir touché 50 000 € de la part de Papa Massata Diack, qui lui a précisé que « c’était dans le contexte de ce qu’il faisait pour la gestion des cas russes. » Ainsi, alors que certaines personnes au service médical de l’IAAF s’inquiètent du fait que les athlètes russes, dont les passeports biologiques démontrent qu’ils ont recours au dopage, ne sont pas suspendus, le médecin demande des contre-analyses. Retardant ainsi les procédures de sanction.

Valentin Balakhnichev et Alexei Melkinov, les compères russes
Visés par un mandat d’arrêt, les deux anciens grands compères de la Fédération russe seront absents. Ex-patron du demi-fond, Alexei Melkinov a essentiellement joué les intermédiaires entre les athlètes et le duo Papa Diack-Habib Cissé. C’est lui qui tente, en 2014, de convaincre la marathonienne Liliya Shobukhova de retour de maternité, de ne pas reprendre la compétition. L’athlète russe, qui trois ans auparavant, a versé 450 000 € contre une « full protection », réclame alors le remboursement des sommes, avant de balancer le pot aux roses à l’agence mondiale antidopage.

Ancien vice-ministre des sports en Russie, Valentin Balakhnichev — ex-trésorier de l’IAAF et ex-président de la fédération russe d’athlétisme — est également l’un des personnages clés du dossier. En 2013, ses actifs sont passés de 200 000 € à plus de 2 millions d’euros. Les deux hommes ont été bannis à vie.

Sandrine Lefèvre

Digital Manager - Chef de projet chez Alixcom Dakar | E-mail: saliou@dakar-echo.com | +221 77 962 92 15

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