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Les drôles de magouilles de Lamine Diack, l’ex-patron de l’athlétisme mondial

Le procès de l’ancien dirigeant de la Fédération internationale d’athlétisme, soupçonné d’avoir notamment retardé la suspension d’athlètes russes dopés en échange d’argent, s’ouvre ce lundi à Paris.

Lamine Diack, 86 ans, ancien président de la Fédération internationale d’athlétisme, est soupçonné d’avoir retardé les procédures de sanctions de 23 athlètes russes.

Le tribunal correctionnel de Paris examine à partir de ce lundi le premier volet d’un dossier tentaculaire, celui du scandale du dopage russe. Sont notamment jugés, le Sénégalais Lamine Diack, 86 ans, ancien tout-puissant président de l’IAAF, la Fédération internationale d’athlétisme, son fils Papa Massata — réfugié depuis au Sénégal et donc absent — et son ancien conseiller juridique, l’avocat français Habib Cissé.

Les trois hommes sont notamment soupçonnés d’avoir retardé les procédures de sanctions de 23 athlètes russes suspectés de dopage, en échange de contrepartie financière. Sept athlètes de renom auraient ainsi versé en tout 2,9 millions d’euros (M€) en échange d’une « full protection ».

Au printemps 2013, la coureuse de 800 m, Yuliya Stepanova et son mari — réfugiés depuis aux Etats-Unis —, se confient à l’Agence Mondiale antidopage (AMA). Mais le scandale — qui a conduit à la suspension de la Russie des compétitions d’athlétisme puis des Jeux olympiques de Tokyo l’été prochain — éclate un an plus tard. Contre une réduction de peine, Liliya Shobukhova déballe à son tour.

Pour pouvoir participer aux JO de Londres en 2012, cette marathonienne, dont le profil sanguin est largement douteux, a versé 450 000 €. Enceinte, elle abandonne la compétition début 2013 mais décide finalement de reprendre le cours de sa carrière. Un retour qui n’arrange par la fédération russe. Quand le patron du demi-fond, Alexey Melkinov (NDLR : suspendu à vie et également mis en examen dans le dossier) l’informe qu’elle est désormais interdite d’athlétisme, Liliya Shobukhova réclame et obtient le remboursement d’une partie des 450 000 €.

Un médecin français visé
Des échanges de SMS et des virements sur le compte de sociétés leur appartenant montrent l’implication de Papa Massata Diack et de son conseiller Habib Cissé. Le médecin français Gabriel Dollé — responsable de la lutte antidopage à l’IAAF — est à son tour pris dans la tourmente.

Il est soupçonné d’avoir perçu des virements de Papa Massata Diack (50 000 € en 2013) et de Lamine Diack (90 000 € en 2014) ainsi que 50 000 € en 2015, d’une personne non identifiée. Des sommes versées, selon les enquêteurs du parquet national financier (PNF), en contrepartie du ralentissement des sanctions. « J’ai fait le faux pas de ma vie », reconnaîtra ainsi devant le juge Van Ruymbeke le médecin jusqu’alors au-dessus de tout soupçon.

Saisi en 2015, le PNF (NDLR : Monaco, où se situe le siège de l’IAAF, fait partie de sa juridiction) a déroulé les fils d’un dossier aux nombreuses ramifications. Les sommes versées par les Russes auraient notamment servi à financer la campagne de l’actuel président du Sénégal Macky Sall, opposant d’Abdoulaye Wade et ennemi juré de Lamine Diack.

Le dossier, digne d’un polar, révèle en outre une gestion d’une fédération sportive internationale d’un autre temps, où se nouent de drôles d’amitiés avec de mystérieux intermédiaires en Russie et en Chine et où les sociétés et les comptes bancaires poussent comme des champignons en Russie, à Singapour ou à Dakar…

L’affaire n’est pas terminée
Le principal bénéficiaire ? Papa Massata Diack qui, non content de multiplier les voyages en Russie pour retarder les suspensions des athlètes russes — leur permettant ainsi de participer aux JO de Londres en 2012 (NDLR : certains y décrocheront même des médailles) et aux Mondiaux d’athlétisme à Moscou en 2013 —, joue les intermédiaires dans les négociations des contrats de sponsoring et de droits TV de l’IAAF.

Le consultant de luxe facture ses prestations 1100 € par jour (hors notes de frais astronomiques) et perçoit jusqu’à 21,8 % de commission sur les ressources sponsors de l’IAAF, dont son père est président. Papa Massata Diack, qui sera donc jugé par défaut, a brassé plusieurs millions d’euros et privé l’athlétisme mondial, partie civile, de recettes.

L’affaire n’est sans doute pas terminée puisque les Diack, influents sur le continent africain, sont également soupçonnés d’avoir utilisé une partie des fonds pour faire basculer l’attribution de grandes compétitions internationales comme les JO d’hiver de Sotchi en 2014 et de Tokyo en 2020 ou les derniers mondiaux d’athlétisme à Doha en 2019.

Le président du PSG, Nasser Al-Khelaïfi, touché par ricochet
Au départ, le juge Renaud Van Ruymbeke, désormais à la retraite, instruit l’affaire des athlètes russes à laquelle le président du PSG et du BeIN Media Group n’est mêlé ni de près ni de loin. En épluchant les comptes de la société sénégalaise de Papa Massata Diack, fils de Lamine Diack, ancien président de la fédération internationale d’athlétisme (IAAF), le magistrat débusque deux virements suspects réalisés en octobre et novembre 2011 par la société qatarienne Oryx QSI pour un montant total de 3,5 millions de dollars (M$), soit 3,15 millions d’euros (M€).

Immatriculée à Doha, Oryx QSI a été fondée par Khalid Al-Khelaïfi, frère aîné de Nasser. Quant aux versements en question, ils ont été effectués quelques jours avant la désignation de la ville hôte des Mondiaux d’athlétisme 2017 alors que Doha est candidate. S’agit-il de possibles pots-de-vin ? Finalement, Londres remporte la majorité des voix et la capitale du Qatar doit patienter pour obtenir l’organisation de l’édition 2019.

En mai dernier, deux mois après la mise en examen de son bras droit Yousef Al-Obaidly, patron de BeIN Sports France, Nasser Al-Khelaïfi est à son tour mis en examen pour corruption active dans le cadre de la vaste instruction sur les procédures d’attribution des Championnats du monde d’athlétisme 2015, 17, 19 et 21 et des Jeux olympiques 2016 et 2020. Pour sa défense, Nasser Al-Khelaïfi, 46 ans, a indiqué qu’il n’avait joué aucun rôle dans les deux candidatures de Doha et n’avait aucun lien, sinon familial, avec Oryx QSI à l’automne 2011. Ses avocats se sont aussi étonné que la justice française se saisisse d’une affaire sans lien apparent avec la France.

« Le simple fait qu’une personne soit régulièrement domiciliée en France est une condition suffisante pour que la justice française s’intéresse à elle », rétorque le Parquet national financier. Aucune autre mise en examen n’a été prononcée depuis dans cette affaire.

Sandrine Lefèvre et Ronan Folgoas

Digital Manager - Chef de projet chez Alixcom Dakar | E-mail: saliou@dakar-echo.com | +221 77 962 92 15

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