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L’ARMP présente le rapport des marchés publics en 2017 expurgé de l’essentiel

Le conseil de l’autorité de régulation des marchés publics (ARMP) a fait face à la presse hier pour livrer au public le rapport de la structure pour l’année 2017. Il était temps puisque les organisations de la société civile et des secteurs de la presse n’avaient de cesse de réclamer ce rapport depuis des mois ! Le directeur général de l’ARMP a toutefois préféré esquiver les questions relatives au différend entre la SDE et l’Etat. Il est vrai que le recours déposé devant la Cour suprême par la SDE vise une décision rendue par l’ARMP !

Hier, ce sont des dirigeants de l’ARMP peu pertinents qui ont fait face à la presse. Comme gênés aux entournures, ils avaient du mal à développer leurs arguments sur les questions posées par les journalistes. Dès l’entame de leur conférence de presse, le directeur général de l’ARMP et son équipe ont fait un exposé fastidieux sur le rapport 2017 pendant près d’une heure et demi. Ils n’ont pas pipé mot sur une quelconque structure ou agence épinglée par le rapport de l’ARMP.

Autrement dit, ils se sont bornés à débiter des généralités alors que, jadis, ce qui faisait le sel des rapports de l’Autorité et les choux gras de la presse, c’était, bien sûr, les révélations sur les fautes de gestion, surfacturations et autres manquements à l’orthodoxie financière commis par les dirigeants de nos sociétés nationales et structures publiques.

Dénomination sociale et noms des dirigeants compris. Depuis quelques années, plus rien de tout cela. Les journalistes et l’opinion doivent se contenter de rapports aseptisés et expurgés de tout ce qui aurait pu choquer l’opinion ou donner du grain à moudre aux journalistes. Résultat : des rapports fades, sans saveur et soporifiques.

La présentation du rapport 2017 faite hier n’a pas échappé à cette règle d’anesthésie. Ainsi, sur l’affaire du marché relatif à la distribution de l’eau potable dans nos grandes villes pour les 15 prochaines années, le contentieux SDE-Etat pour faire plus court, il a fallu que M. Saër Niang soit interpellé sur la question pour qu’il consente à livrer les raisons qui ont motivé sa structure à rendre le verdict que l’on sait. « Je pense qu’il y a deux décisions qui sont accrochées sur le portail des marchés publics en ce qui concerne ce contentieux. Nous avons eu à être saisis à deux reprises et à chaque fois nous avons rendu une décision et les décisions sont bien motivées. Tous les aspects ont été abordés. Il faut quand même que les gens prennent le temps de lire nos décisions. C’est le plus difficile souvent », a répondu sèchement le Dg de l’ARMP à la question d’un journaliste.

Saër Niang a maintenu sa position sur le fait que la SDE a perdu face à son concurrent dans cette affaire. « Des fois, dans la rue, des gens m’ont interpellé et que lorsque je pose la question : avez-vous lu notre décision ? On m’a toujours répondu non. Il faudrait que les gens prennent l’effort de lire les décisions et ils comprendront le problème tel qu’il est posé et la décision qui a été prise telle qu’elle a été motivée. Comme on l’a rappelé, le dossier est pendant devant la justice. Attendons de voir. La justice dira son mot sur la question. Et on saura ce jour-là qu’est-ce qui s’est passé. Mais déjà, il faut aller dans les décisions de l’ARMP et vous verrez exactement ce qui s’est passé. Le point de vue de l’ARMP est clair sur la question et on ne peut pas dire plus sur la question », a-t-il évacué.

Par ailleurs, M. Niang est revenu sur les retards de publication des rapports. « L’ARMP de 2009 a maintenant, chaque année, fait un point de presse pour publier un rapport. Dans les premières années, ce que nous faisions, c’était de dissocier les deux rapports; c’est-à-dire publier le rapport général et ensuite après on sort les rapports des audits. On a trouvé que c’était lourd de faire deux restitutions dans l’année. On s’est dit que, comme les audits font partie des activités, il convient de les intégrer directement dans le rapport général. C’est ça qui a motivé le fait qu’on a commencé à ne sortir qu’un seul rapport contenant les audits et à publier tous les rapports individuels des audits », a-t- il expliqué. Avant de vanter les performances de l’ARMP.

« Comme l’a rappelé le président, on était à 600 milliards de chiffres d’affaires de marchés publics par an et à l’époque on a audité autour de 60 à 80 autorités contractantes. Aujourd’hui, on est autour de 3000 milliards et on audite plus de 120 structures. Le rapport général, il est prêt en décembre parce qu’on fait des rapports trimestriels et, à la fin de l’année, on construit le rapport général. Il faut attendre que l’année soit close pour démarrer les audits. Si on augmente le nombre de structures à auditer et si les budgets de chaque structure ont augmenté, il y a incidence forcément sur le temps de l’audit. C’est ça seulement qui a motivé ces retards. Mais aujourd’hui, l’ARMP est la seule structure à auditer dans les marchés publics plus de 100 structures tous les ans. Il n’y en pas un seul autre qui le fait. On a organisé tout récemment un forum avec toutes ARMP d’Afrique, il n’y en a pas une seule qui fait autant. »

A cet effet, il se désole du comportement des Sénégalais qu’il trouve paradoxal. « L’année dernière, à pareille époque, on a sorti notre rapport et on nous a reproché de l’avoir publié à trois mois des élections. On a même été jusqu’à dire que Saër Niang a planté un couteau dans le dos de Macky. Récemment, le mois passé, quelqu’un a écrit pourquoi on n’a pas sorti de rapport en disant c’est parce qu’on ne voulait pas gêner les élections. Mais, il faut qu’on choisisse. On nous reproche de l’avoir sorti à la veille des élections et dix mois après, on n’oublie qu’on avait sorti un rapport et on nous dit qu’on ne l’a pas fait pour Macky.

Au fond, je trouve que c’est un jeu d’enfants », a-t-il lancé. Sur ce, il soutient qu’en vérité, l’ARMP fait son travail correctement. « Il n’y a personne qui nous dicte ce qu’on doit faire. Quand on a pris la décision le mois dernier en disant que la publication se fera le 28 novembre, la presse a été informée. Et ce n’est qu’hier qu’on les a informés que l’ARMP fera son point de presse le 28 novembre.

On n’a jamais demandé d’autorisation pour sortir un rapport. Ce qu’on pense de l’ARMP n’est pas réellement la vérité ; elle est une structure totalement indépendante. Je n’ai jamais vu une autorité donner une instruction ou influencer l’ARMP dans le cadre de son travail. Cela n’a jamais existé », s’est défendu M. Saêr Niang.

Selon lui, les résultats le montrent suffisamment : les performances, les dispositifs de passation des marchés publics, le taux d’extension de crédit qui a augmenté de façon considérable et on est à 98 %, le taux d’entente direct a fortement chuté et est à seulement 9 % et alors que partout il est admis d’aller jusqu’à 20 %. Les marchés sont de meilleure qualité et les coûts de commande ont baissé. « Ce sont les objectifs qu’on cherche mais pas autre chose et nous sommes admirablement en train de le réussir avec les autorités contractantes. Et cela doit être accompagné par la presse. Mais, chaque jour, on informe sur des choses qui ne correspondent pas à la réalité », s’est-il désolé.

Par rapport à son mandat qui est arrivé à terme depuis deux ans et son refus de céder la place, « l’éternel » patron de l’ARMP a répondu que les textes ne mentionnent nulle part qu’il doit partir à la fin de son mandat. « Si ça arrive, je déciderai. Je n’ai jamais été influencé par personne dans ma vie et je n’ai jamais reçu de coup de pouce de personne dans ma vie. Je sais qu’Il a mon sort entre ses mains et je suis un homme majeur et je n’ai aucun problème.

Aujourd’hui, je fais mon travail correctement par rapport aux textes qui nous régissent. Et les textes ne constatent pas la fin de mes activités au terme des trois ans parce que le directeur général a une position différente d’un administrateur. A partir de ce moment, je ne vois pas de problème de faire mon travail tous les jours jusqu’au jour où on nommera un successeur. Je ne suis pas un carriériste et ne cherche pas un emploi », a martelé Saër Niang.

un membre du conseil de régulation, Amadou Ngom, est revenu appuyer le directeur général sur le différend opposant SDE-Suez et l’Etat du Sénégal. « Nous ne pouvons pas parler de ce dossier tant que la décision de justice n’est pas rendue. C’est la raison pour la- quelle nous ne débattons pas sur la question. Autrement dit, les voies de recours ne sont pas encore épuisées. Une fois que cela se fera, à notre niveau, nous pourrons apporter des clarifications. Et aussi, je pense qu’il n’y a pas de secret dans cette affaire puisque l’opinion est informée au jour le jour », a-t-il soutenu.

Et d’insister sur le fait que l’ARMP est une autorité administrative indépendante et qu’elle a été saisie sur une question qui relève de sa compétence et a rendu une décision qui est à la connaissance de tout le monde. Parce que c’est une décision qui a été publiée sur le portail des marchés publics et le site de l’ARMP. « Chacun peut voir la décision, l’analyser à sa guise et puis se forger une conviction. C’est une décision qui a été motivée.

Et la seule manière de répondre à des préoccupations qui ont été posées dans le cadre d’un contentieux, c’est par la motivation. Le Crd (Ndlr, comité de règlement des différends) a motivé sa décision. Chacun peut voir la décision et se donner une religion par rapport à la décision. Mais, il faut dire quand même que c’est une décision qui a fait l’objet d’un pourvoi en cassation. Donc, aujourd’hui, nous ne pouvons pas épiloguer sur ça. Et nous sommes tenus d’avoir ce comportement. On ne refuse pas de discuter sur cette question parce que nous agissons et travaillons en toute indépendance et dans la transparence », a développé M. Amadou Ngom pour dédouaner sa structure.

Le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche Cheikh Oumar Hanne épinglé encore
Dans le rapport de 2017 qui a été publié par l’ARMP sur son site, l’actuel ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche, Cheikh Oumar Hanne, a été encore épinglé. C’est la deuxième fois qu’un rapport épingle le natif de Ndioum sur des surfacturations dont il a l’habitude.

Le rapport a révélé un écart de 120 millions entre la somme déclarée et celle réellement exécutée pour le marché de fourniture de matériels et mobilier de bureau quand il était directeur du Coud. « Le montant estimé du marché dans le PPM (Plan de passation des marchés) était de 140 000 000 francs or, le marché a été attribué pour 19 116 000 FCFA. Nous n’avons pas reçu d’explication par rapport à cet écart », a écrit le cabinet KPMG qui a réalisé l’audit pour le compte de l’ARMP. C’était sans doute le seul grain de sel dans la sauce sans saveur du rapport 2017 de l’ARMP.

Samba Diamanka

Jean Louis Verdier - Rédacteur en Chef Digital - Paris- Dubaï - Hong Kong dakarecho@gmail.com - Tél (+00) 33 6 17 86 36 34 + 852 6586 2047

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