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Election présidentielle : à Oyo, le huis clos d’Embalo Sissoco et Denis Sassou Nguesso sur Alassane Ouattara

Adversaire farouche d’Alassane Ouattara, le président bissau-guinéen tente de rallier son aîné congolais à sa cause et de peser dans la crise post-électorale en Côte d’Ivoire.

Ayant échoué dans sa médiation via l’Union africaine (UA) en Libye, le président congolais Denis Sassou Nguesso tente de s’inviter dans toutes les crises politiques du continent. Dimanche 1er novembre au soir, il a longuement conféré de la crise post- électorale en Côte d’Ivoire avec ses homologues congolais Félix Tshisekedi et bissau-guinéen Umaro Sissoco Embalo dans sa ville natale d’Oyo.

Espérant que le résultat de l’élection qui a donné un troisième mandat à Alassane Ouattara allait être contesté dans les rues abidjanaises, Embalo, en froid polaire avec le président ivoirien, a devisé avec Sassou sur la marche à suivre.

La relation entre Embalo et Sassou est particulièrement forte car elle s’est nouée via la fille du patriarche, Claudia Sassou Nguesso, dont la proximité avec le président bissau-guinéen n’échappe plus à personne à Brazzaville. Sassou (76 ans) est flatté de l’intérêt que lui porte le jeune président bissau-guinéen (48 ans).

Embalo et Sassou avaient parié sur la très forte dégradation de la situation à Abidjan lors de l’annonce des résultats donnant le président sortant vainqueur à 94 %.

Ouattara a toujours été circonspect au sujet d’Embalo et ce dernier s’est, depuis longtemps, rapproché des deux plus farouches opposants politiques à l’actuel président ivoirien : l’ancien chef de l’Etat Laurent Gbagbo (récemment sorti de prison après son acquittement à la Cour pénale internationale) et surtout l’ex-président de l’Assemblée nationale Guillaume Soro (condamné en avril 2020 à Abidjan à vingt ans de prison pour détournement et blanchiment).

Soro connaît aussi très bien Sassou, ce dernier ayant soutenu sa rébellion en 2002 dans l’objectif de renverser le pouvoir de Laurent Gbagbo. Tous deux ont été empêchés de se présenter lors du scrutin du dernier week-end d’octobre. Soro rencontre très régulièrement Embalo en France et n’hésite pas à missionner le président bissau- guinéen en vue de convaincre les chefs d’Etat africains de lâcher Ouattara.

L’impossible chaos à Abidjan
Si Embalo est proche du président nigérian Muhammadu Buhari, en conflit avec Ouattara sur les questions de leadership régional, notamment au sujet de la future monnaie commune ECO, ce dernier n’a aucune intention de déstabiliser encore davantage la Côte d’Ivoire. Soro a fait savoir qu’il souhaitait se rendre à Abuja, sans jamais réaliser ce projet.

De même pour l’autre mentor d’Embalo en Afrique de l’Ouest, le président sénégalais Macky Sall, qui ne le suivra pas dans son souhait d’escalade ivoirienne. D’autre part, Embalo a de nombreux ennemis en zone CEDEAO (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest), comme le Guinéen Alpha Condé ou encore le Ghanéen Nana Akufo-Addo.

Tshisekedi et la Côte d’Ivoire
Si Tshisekedi n’est pas directement concerné par la situation en Côte d’Ivoire, il y sera tout de même confronté en tant que président de l’Union africaine si elle perdure en 2021. Il s’informe des tenants et les aboutissants de la crise actuelle grâce à une personne clé, le gendre de Laurent Gbagbo, Stéphane Kipré. Ce dernier, farouche opposant à Ouattara, vient très régulièrement à Kinshasa depuis 2019, où il séjourne de longues semaines pour échanger avec le président.

Gbagbo était un intime du père de Félix Tshisekedi, le fondateur de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) et opposant farouche à Mobutu Sese Seko, Etienne Tshisekedi. Ce dernier était membre, tout comme Gbagbo, de l’Internationale socialiste. Toujours coincé à Bruxelles sans passeport, Gbagbo a mandaté Kipré comme son principal intermédiaire et porte-parole en Afrique.

L’équipée anti-troisième mandat
Courant septembre, après la crise cardiaque mortelle du candidat du parti au pouvoir en Côte d’Ivoire, Amadou Gon Coulibaly, Sassou a dépêché plusieurs émissaires dans différentes capitales africaines pour s’informer de la situation ivoirienne. C’est son neveu Rodrigue Nguesso qui a joué les missi dominici, en association avec Jean- Claude Kabongo, le conseiller privé en
investissements de Tshisekedi (Rodrigue Nguesso est l’agent de liaison entre les deux présidents congolais).

Les deux hommes ont rencontré Macky Sall à Dakar, Embalo à Bissau et ont tenté de voir Ouattara, sans succès. Ils ont dû se contenter du premier ministre et bras armé du président ivoirien, Hamed Bakayoko. Pour Tshisekedi, l’objectif était notamment d’avoir un autre son de cloche que celui du seul Kipré sur la situation.

Avec Africa Intelligence

Digital Manager - Chef de projet chez Alixcom Dakar | E-mail: saliou@dakar-echo.com | +221 77 962 92 15

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