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Des étudiants africains pauvres de l’université Paris-Saclay racontent leur galère

Certains vivent avec moins de 300 euros par mois. Ils témoignent de leurs difficultés mais aussi de leur volonté de décrocher un diplôme pour ensuite rentrer travailler dans leur pays.

Ils ont quitté leur continent avec déjà pas mal de diplômes en poche. Afin de compléter un cursus universitaire, de nombreux étudiants africains sont venus à l’université Paris-Saclay car elle propose des « formations de qualité et reconnues ». Mais ils ne s’attendaient pas à vivre autant de difficultés. Depuis plusieurs mois, l’association Héberjeunes ne se contente plus d’assurer sa mission à première, à savoir « proposer aux étudiants des logements économiques en les mettant directement en relation avec des propriétaires ». Elle se débat pour sortir de la précarité certains étudiants et envisage de développer une aide à l’arrivée.

Pour obtenir un titre de séjour et pouvoir poursuivre leurs études, les étudiants hors Union européenne doivent justifier d’environ 7 000 euros sur leur compte. « Beaucoup se font prêter cette somme de façon factice pour obtenir les papiers », témoigne une bénévole d’Héberjeunes. Et cela créé par la suite de la précarité.

Coumba a dormi deux jours dans la station Châtelet
Elle a quitté son Sénégal natal en 2018 pour suivre des études en physique à l’université Paris-Saclay. La première année, tout s’est bien passé, Coumba est sortie 5e de sa promotion et vivait chez des parents installés en région parisienne. « Mais il y a quelques semaines, ils sont partis de façon imprévue aux Etats-Unis, raconte Coumba, 20 ans. Le temps de trouver une chambre, je n’ai pas eu d’autre choix que dormir deux nuits dans la station Châtelet à Paris. C’était horrible. Depuis, une association m’a trouvé un logement chez une personne âgée. Je ne paye rien en échange de services. J’ai fait une demande de bourse en novembre dernier dans mon pays, mais je n’aurai une réponse qu’en avril. J’ai un peu moins de 300 euros par mois pour vivre. C’est difficile mais on se débrouille. Un tel parcours ça forge. Je ne me décourage pas et je me consacre entièrement à mes études, je veux devenir ingénieure. »

Modeste vit avec 150 euros par mois
Tous les mercredis, Modeste va lui chercher son colis à l’antenne du Secours populaire de l’université. La situation de ce jeune homme âgé de 25 ans originaire du Bénin et qui suit un master en sciences sociales et développement durable à l’université Paris-Saclay est tellement alarmante qu’il a bénéficié d’une aide d’urgence de 150 euros.

Sa priorité, c’est de trouver un toit. « À mon arrivée en septembre, j’ai été logé chez un ami avec qui j’avais suivi mes études en Tunisie, raconte Modeste. Mais je ne pouvais pas rester trop longtemps. J’ai acheté un ticket sur un site pour un studio, mais c’était une arnaque et j’ai perdu 400 euros. Héberjeunes m’aide depuis décembre. Aucune chambre n’est disponible dans les résidences du Crous, car c’est d’abord la priorité aux boursiers français ou sinon il faut des critères comme la caution des deux parents. »

Pour s’en sortir, Modeste mène de front la recherche active d’un logement pérenne (un ami l’héberge dans son petit studio) et d’un travail. « Mon frère m’aide un peu en attendant, poursuit-il. Mais c’est dur. Je n’en parle à personne autour de moi. On ne sait pas à qui s’adresser. Je pense créer une association pour les étudiants qui arrivent de l’étranger comme moi, pour leur donner les bons contacts. »

Abbas est arrivé en France avec 250 euros en poche
Abbas, un Tchadien de 29 ans diplômé d’une école d’ingénieur, achève son cursus à l’université Paris-Saclay, « pour être le plus utile possible dans mon pays ou en Afrique ». Il avait les 7 000 euros demandés sur son compte en banque à son arrivée en France.

« C’est un cousin qui m’a prêté la somme, il avait promis de me payer mes études, confie le jeune homme. Mais quand je suis arrivé en France en septembre dernier, il m’a dit de me débrouiller, il a récupéré son argent, je n’avais que 250 euros sur moi et j’étais presque à la rue. Une dame d’Héberjeunes s’est battue pour moi et a trouvé un logement à Villebon-sur-Yvette pour un loyer de 400 euros. Je travaille 14 heures par semaine dans une bibliothèque, cela me permet tout juste de payer le loyer. Je cherche un autre travail pour pouvoir me payer mon passe Navigo, à manger, des vêtements… J’ai dû emprunter 25 euros à un camarade pour me nourrir une semaine. Je vais également au Secours populaire. Ce n’est pas facile de joindre les deux bouts, mais je me suis fixé un objectif : la thèse. Je ne baisse pas les bras, car un diplôme français m’ouvrira encore plus de portes ». Il lâche : « Ma famille ne sait pas ce que j’endure. »

Par Cécile Chevallier avec Le Parisien

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