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« Atlantique » de Mati Diop décroche le Grand Prix au Festival de Cannes

Fable dédiée à la jeunesse africaine, celle disparue en mer et celle qui s’insurge sur le continent, le film de la Franco-Sénégalaise permet au cinéma du Continent de relever la tête. 

Sacrée performance que celle réalisée par le film « Atlantique » de Mati Diop. « J’en reviens pas, c’est un peu fou ce que vous avez fait », a réagi la réalisatrice de 36 ans après que l’acteur américain Sylvester Stallone lui ait remis le cadre avec la palme symbolisant le Grand Prix décerné par l’édition de cette année du Festival de Cannes.

« Je suis ici avec vous et en même temps là-bas, à Dakar », a-t-elle ajouté. Pour la réalisatrice franco-sénégalaise, la lignée artistique parle d’elle-même. Nièce du cultissime réalisateur sénégalais Djibril Diop Mambéty, dont l’opus filmé Touki Bouki est l’une des œuvres de référence, Mati Diop est la fille du musicien Wasis Diop. Il y a 6 ans déjà, elle s’était fait remarquer avec son moyen-métrage documentaire Mille Soleils (2013).

Sur les migrants
Avec Atlantique, son premier long-métrage présenté jeudi, dans la première semaine de cette édition du Festival de Cannes, la réalisatrice franco-sénégalaise franchit une étape importante en livrant une fable à la fois politique et onirique sur le sort des migrants et la jeunesse de Dakar. Pourtant, ce film, qui est le premier film sénégalais en compétition à Cannes depuis Hyènes de son oncle Djibril Diop Mambéty il y a 27 ans, prolonge son court-métrage Atlantiques, tourné à Dakar il y a 10 ans.

Elle y racontait déjà la traversée en mer d’un jeune migrant depuis les côtes sénégalaises. « J’ai passé du temps à Dakar à ce moment-là et je me suis pris en pleine face les réalités complexes et sensibles du phénomène qu’on appelait à l’époque l’émigration clandestine », a-t-elle raconté à l’AFP. « Une fois ce film monté, terminé, j’ai senti que j’avais encore énormément de dimensions, de choses à explorer. (…) J’ai eu l’envie et l’idée de raconter la disparition d’une certaine jeunesse en mer de cette époque-là, à travers le point de vue d’une jeune fille. »

Une histoire aux dimensions multiples
Cette héroïne dont elle raconte l’histoire, c’est Ada (Mama Sané), dans une banlieue populaire de Dakar, amoureuse de Souleiman (Ibrahima Traoré), ouvrier sur un chantier et sans salaire depuis des mois. Le jour où Souleiman décide de quitter le pays par la mer pour chercher un avenir meilleur en Europe, la vie d’Ada bascule.

Plongée dans une attente angoissante, la jeune fille, qui doit épouser un autre homme, se retrouve au bout de quelques jours au cœur de phénomènes étranges : un incendie a lieu pendant sa fête de mariage et des fièvres inexpliquées frappent les filles du quartier, tandis que certains affirment avoir vu Souleiman.

Histoire d’exil et de fantômes à l’esthétique soignée, teintée de fantastique et de poésie et portée par une musique sombre, Atlantique est « un film sur la hantise, l’envoûtement, et sur l’idée que les fantômes prennent naissance en nous », souligne la réalisatrice, admiratrice du cinéma onirique du Thaïlandais Apichatpong Weerasethakul.

Le film, dont les acteurs ont été trouvés par casting sauvage, parle aussi de la jeunesse sénégalaise qui s’était soulevée en 2011-2012 avec le mouvement Y’en a marre. « J’ai eu envie que mon film porte ces deux dynamiques à la fois, que soient évoquées cette jeunesse disparue en mer et aussi celle qui s’insurge, mais à travers le parcours d’une jeune femme » qui « s’éveille à une nouvelle dimension d’elle-même » et s’émancipe, souligne la réalisatrice. Une envie que ce Grand Prix décroché au Festival de Cannes a entièrement satisfaite.

Point Afrique

Jean Louis Verdier - Rédacteur en Chef Digital - Paris- Dubaï - Hong Kong dakarecho@gmail.com - Tél (+00) 33 6 17 86 36 34 + 852 6586 2047

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