Guinée

Virus de Marburg en Guinée : faut il s’inquiéter de ce cousin d’Ebola ?

Un cas du virus de Marburg a été détecté en Guinée début août. Cette fièvre hémorragique, proche du virus Ebola, a été décelée très tôt, ce qui pourrait éviter une épidémie de grande ampleur.

Encore un virus. Lundi, la Guinée a indiqué qu’un cas du virus de Marburg avait été détecté sur son territoire. Cette maladie, de la même famille qu’Ebola, se transmet par contact direct, et son taux de létalité peut dépasser les 80 %. Quel est ce virus exactement, et faut-il s’en inquiéter ? Explications.

Un virus cousin d’Ebola
Le virus a été découvert en 1967 en Allemagne, quand des singes importés à l’institut de virologie de Marburg ont contaminé des chercheurs. Le virus de Marburg est de la même famille qu’Ebola : celle des filovirus. Cela signifie que les deux ont la forme d’un fil, et donc la même structure. Ils induisent la même catégorie de symptômes, la fièvre hémorragique, qui se caractérise par des maux de tête, de la fièvre, des vomissements, et des diarrhées. Comme Ebola, Marburg se transmet à l’homme à partir d’animaux sauvages qui servent de réservoirs à la maladie. Dans le cas de Marburg, les chauves-souris frugivores sont considérées comme les vecteurs naturels du virus.

Des flambées de cas ont été auparavant observées en Angola, en Ouganda, et en République démocratique du Congo notamment. Avec le cas trouvé en Guinée, c’est première fois que le virus de Marburg est détecté en Afrique occidentale. « C’est surprenant parce que c’est un virus qui a presque toujours sévi en Afrique centrale, mais quand on prend du recul, c’est compréhensible puisque les chauves-souris circulent dans toute cette région », analyse Eric Leroy, directeur de recherche à l’Institut de recherche pour le développement et spécialiste du virus Ebola. Il se transmet ensuite par contact direct entre humains, par les fluides biologiques. Par exemple, si quelqu’un s’occupe d’un malade et est en contact avec son sang, il peut être contaminé.

La Guinée a connu un retour de l’épidémie d’Ebola cette année, qu’elle a fini par enrayer en juin. Selon Eric Leroy, l’arrivée du virus de Marburg n’a pas de lien avec cette récente vague. En revanche, le vaccin contre Ebola pourrait aider à trouver un vaccin contre Marburg assez rapidement : « Aujourd’hui, on va de plus en plus vite parce qu’on a des modèles de vaccins qu’on peut adapter à une autre maladie. Beaucoup de travail a été fait sur Ebola, il faut transposer cela à Marburg maintenant », développe le virologue.

Un cas détecté en Guinée
Ce virus est revenu sur le devant de la scène avec la détection d’un cas en Guinée lundi. L’OMS et le gouvernement guinéen ont indiqué qu’il avait été découvert dans la préfecture de Guéckédou, au sud du pays, dans un village situé dans une région forestière proche des frontières de Sierra Leone et du Liberia.

Il s’agit d’un homme décédé le 2 août et dont les symptômes remontent au 25 juillet. Une première équipe de dix experts de l’OMS, dont des épidémiologistes et des socio-anthropologues, est déjà sur le terrain et fournit un appui aux autorités sanitaires nationales qui mènent une enquête approfondie.

Trois membres de la famille du patient décédé et un travailleur de la santé ont été identifiés comme des contacts étroits à haut risque et leur santé est surveillée. Plus largement, 155 cas contacts ont été recensés et sont suivis par les autorités. «

Contrairement à l’épidémie d’Ebola en 2014, ce n’est que le premier cas, et l’intervention a été très rapide. On peut espérer qu’il y a eu très peu de contacts avec la maladie et qu’on va enrayer la propagation du virus très vite », expose Eric Leroy.

Entre 2013 et 2016, le virus Ebola avait fait plus de 11 300 morts pour quelque 28 600 cas recensés, à plus de 99 % en Guinée (2 500 morts), au Liberia et en Sierra Leone. À l’époque, il avait fallu 3 mois et demi pour diagnostiquer ce virus.

Faut-il s’en inquiéter ?
La létalité du virus de Marburg varie grandement selon les souches, et la manière dont les malades sont pris en charge : selon l’OMS, lors de l’épidémie de 2012 en Ouganda, le taux de létalité atteignait les 27 %, contre 88 % en Angola en 2005 par exemple. Lors de l’annonce du cas détecté, l’OMS a indiqué que la menace restait faible au niveau international.

À l’échelle régionale toutefois, le risque est élevé : « Le foyer forestier d’émergence (du virus Marburg en Guinée) comprend deux autres pays, le Liberia, et la Sierra Leone. C’est le signal d’une émergence inédite », relate Denis Malvy, infectiologue au CHU de Bordeaux et spécialiste des maladies tropicales.

Cet expert international d’Ebola pense que d’autres cas seront « sans doute » bientôt détectés. Pour lui, la priorité est que les autorités aillent vers les populations pour faire de la sensibilisation. Le risque est en effet que des malades ne se fassent pas connaître et restent chez eux, ou qu’ils soient enterrés de manière non sécurisée.

Cette fois, les autorités sanitaires guinéennes pourront bénéficier de leur expérience avec Ebola pour éviter une réelle épidémie. « La dernière épidémie d’Ebola est encore très proche, donc la Guinée dispose encore d’un réseau de surveillance, de compétences humaines, et d’infrastructures qui permettent de gérer cette situation. Tous les éléments sont réunis pour qu’on puisse endiguer ce petit foyer qui semblait émerger », développe de son côté Eric Leroy. Pour lui, il pourrait même ne « pas y avoir d‘épidémie du tout ».

Quant au risque que le virus Marburg arrive en France, il est très faible d’après Denis Malvy. Des Français ont prévu de se rendre en Guinée en renfort humanitaire, mais « cela se gère, comme pour Ebola, je ne suis pas inquiet », relativise-t-il. En effet, aucun cas du virus Ebola n’a jamais été détecté en France.

Par Sophie Cazaux

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