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Le Venezuela réforme à nouveau sa monnaie avec six zéros en moins

Le Venezuela réforme à nouveau sa monnaie avec six zéros en moins

Les Vénézuéliens se sont réveillés vendredi avec six zéros en moins sur leur monnaie, le bolivar, ce qui rendra plus facile les transactions quotidiennes, mais ne devrait pas bouleverser la vie du pays en proie à l’inflation la plus élevée au monde.

C’est la troisième conversion en treize ans. Depuis 2008, ce sont quatorze zéros qui ont été supprimés.

« J’ai été faire mes courses sans problèmes ce matin. Les nouveaux prix étaient affichés au-dessus des anciens. Et, il y avait toujours le prix en dollars. Le prix (réel en dollars) n’a pas changé », raconte Josefina Galindo, femme de ménage qui a fait quelques achats dans le quartier huppé de Chacao de Caracas en se rendant au travail.

« J’ai payé en carte. Il y avait des plateformes (de paiement par carte) qui ne fonctionnaient pas, mais la mienne a marché », précise-t-elle.

Auparavant, elle avait pris le bus de son quartier populaire de Coche vers Chacao et payé… avec les anciens prix et les anciens bolivars. « J’ai eu un peu peur en voyant la queue, mais j’ai payé 1.000 bolivars (25 cents de dollars) comme toujours. Les collecteurs (ceux qui encaissent dans les bus) criaient 1.000 pareil », raconte-t-elle.

Toutefois, un collecteur l’a prévenue que les prix des trajets allaient augmenter de 1 à 1,5 bolivar lundi (25 à 37,5 cents de dollars).

Nouvelles coupures
Une nouvelle pièce de 1 bolivar et surtout de nouveaux billets de 5, 10, 20, 50 et 100 devraient commencer à circuler, mais n’étaient pas encore visibles vendredi. Le billet de 100 vaut 24 dollars.

Certains commerces n’avaient pas réussi encore à s’adapter dans la matinée. Un parking de Chacao n’acceptait que les devises, mais la plupart des boulangeries et café pour le matin avaient déjà effectué le changement.

« Tout fonctionne bien jusqu’à maintenant », affirmait une caissière d’une boulangerie du centre ville.

Avant la réforme, annoncée en août par la Banque centrale, il fallait sept millions de bolivars pour acheter une baguette de pain, dans un pays jadis considéré comme l’un des plus riches d’Amérique du sud grâce à son pétrole et qui a vu son PIB chuter de 80% depuis 2013, notamment en raison de la baisse de sa production et des cours du pétrole, mais aussi de la mauvaise gestion et de la crise politique.

94,5% des foyers vivent sous le seuil de pauvreté de 1,9 dollar par jour, selon une récente étude universitaire. Quelque cinq millions de Vénézuéliens ont fui leur pays depuis 2015 en raison de la crise économique et politique, selon l’ONU.

Sans surprise, avec une telle inflation, le pouvoir d’achat s’évapore. « On touche notre salaire tous les quinze jours, moins de trois dollars », explique à l’AFP Marelys Guerrero, 43 ans.

Pour faire face à l’hyperinflation, anticipée à 1.600 % en 2021 par le cabinet d’analyses Ecoanalitica, les Vénézuéliens ont désormais recours au dollar qui a supplanté le bolivar. Plus des deux tiers des transactions dans le pays sont effectuées dans cette monnaie, celle des Etats-Unis, pourtant le principal adversaire du pouvoir du président Nicolas Maduro.

Le loyer d’un appartement dans un quartier modeste de la capitale débute à 150 dollars, et un panier de produits alimentaires de base pour une famille de cinq personnes coûte près de 220 dollars.

Le bolivar est relégué aux transactions par carte, aux transferts bancaires… et l’accumulation de zéros avait transformé les paiements quotidiens en véritables casse-têtes.

En province, les enfants jouent avec de vrais bolivars qui ne valent plus rien depuis belle lurette.

Comme raison aux difficultés économiques, le gouvernement invoque régulièrement les sanctions internationales imposées depuis 2019, notamment par les Etats-Unis, pour tenter d’évincer le président Maduro du pouvoir, même si la crise dure depuis plus de huit ans.

Si certains Vénézuéliens craignent que la nouvelle réforme ne réduise encore leur pouvoir d’achat, certains se réjouissent de la simplification qu’elle entraîne, comme Rodrigo Bermudez, comptable.

« C’est un soulagement… Le nombre de chiffres rendait toute transaction si fastidieuse », explique-t-il, en montrant une facture comportant bien trop de zéros pour être intelligible.

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