Népal

Le Népal, haut-lieu de la vague hippie des années 60-70, envisage de relancer sa « ganja »

La marijuana pourrait bientôt être légalisée au Népal, les députés envisageant un retour aux politiques libérales en matière de drogue qui ont fait du pays un haut-lieu pour hippies en quête de paradis artificiels dans les années 1960 et 1970.

Il y a un demi-siècle, des milliers de jeunes routards aux cheveux longs, pour la plupart occidentaux, se pressaient à Katmandou pour goûter aux puissantes variétés de marijuana et de haschich proposées dans les magasins agréés par le gouvernement sur « Freak Street », la « rue des Affreux » nommée ainsi en référence aux hippies.

La guerre contre la drogue que Washington a menée à travers le monde, accompagnée de pressions sur les gouvernements étrangers, ont entraîné la fermeture des officines de distribution en 1973 et l’interdiction des cultures de cannabis, obligeant les agriculteurs à détruire leurs plantations.

Mais aujourd’hui, alors que les pays occidentaux assouplissent leur propre législation sur la marijuana, le gouvernement népalais et les partisans de la réforme législative estiment qu’il est temps de cesser de criminaliser sa production, profondément enracinée dans la culture et les pratiques religieuses du pays.

Peuple « puni »
« Il n’est pas justifiable qu’un pays pauvre comme le nôtre doive traiter le cannabis comme une drogue », a déclaré à l’AFP le ministre népalais de la Santé, Birodh Khatiwada, qui a parrainé la première motion parlementaire népalaise prônant la fin de l’interdiction en janvier 2020.

Deux mois plus tard, un projet de loi était soumis aux députés demandant une légalisation partielle. Cependant, un changement de gouvernement a bloqué le processus.

« Notre peuple est puni (…) et la corruption augmente à cause de la contrebande, parce que nous suivons des décisions de pays développés qui eux font ce qu’ils veulent », a fait valoir M. Khatiwada.

En décembre 2020, le Népal a soutenu avec succès une campagne auprès des Nations unies visant à extraire le cannabis de sa liste des drogues les plus nocives au monde.

Le ministère de l’Intérieur du Népal a depuis lancé une étude sur les vertus médicinales et le potentiel d’exportation de la marijuana qui devrait soutenir un nouveau débat parlementaire en faveur de la levée de l’interdiction.

« C’est un médicament », assure Rajiv Kafle, un malade du VIH qui milite pour la légalisation du cannabis.

Selon lui, l’autoriser à nouveau donnerait un « coup de pouce important » à l’industrie touristique du Népal, mise K.O. par la pandémie de Covid, et profiterait aux Népalais souffrant de maladies chroniques.

Alors que la loi actuelle autorise le cannabis médical, il n’y a pas de cadre établi pour l’usage thérapeutique et le gouvernement applique toujours une interdiction générale de la consommation et du trafic.

« Tant de malades en font usage, mais ils sont obligés de le faire illégalement », regrette-t-il, « ils peuvent se faire prendre à tout moment. »

Marijuana labellisée
Dans la pratique, il est peu probable qu’un touriste soit poursuivi pour un joint fumé dans une rue de Katmandou.

Les autorités détournent aussi le regard au moment du festival annuel en l’honneur du dieu hindou Shiva, souvent doté d’un chillum, sorte de pipe utilisée par les sadhûs pour fumer du cannabis.

Des effluves de « ganja » flottent aux abords du temple Pashupatinath à Katmandou où ces hommes saints se rassemblent pour célébrer le « cadeau » de Shiva avec les fidèles, également munis de pipes.

Mais ailleurs, les sanctions sont appliquées avec sévérité. Les trafiquants de marijuana risquent jusqu’à dix ans de prison et la police saisit et détruit des milliers de plants de cannabis à travers le pays chaque année.

L’interdiction a interrompu une longue tradition d’utilisation du cannabis, qui poussait à l’état sauvage au Népal, dans l’alimentation, pour produire des fibres et des médicaments ayurvédiques.

« L’interdiction a détruit une importante source de revenus dans cette région », rappelle à l’AFP un agriculteur du district occidental de Dang. « On a ignoré à quel point cela faisait partie de notre culture et de notre quotidien, pas seulement en tant que substance intoxicante ».

Plusieurs pays occidentaux ont mis fin à leurs propres interdictions de consommation de marijuana ces dernières années, y compris dans certaines régions des États-Unis, comme la Californie où une variété originaire du Népal est vendue sous la marque « Himalayan Gold ».

Pour Barry Bialek, médecin d’un centre de recherche sur le cannabis à l’Université de Katmandou, le commerce labellisé d’une marijuana népalaise pourrait se révéler très lucratif localement et « bénéficier au marché mondial ».

Jean Louis Verdier - Rédacteur en Chef Digital - Paris- Dubaï - Hong Kong dakarecho@gmail.com - Tél (+00) 33 6 17 86 36 34 + 852 6586 2047

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