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Le journalisme sous l’emprise du numérique

A l’occasion de la célébration de la journée internationale de la liberté de la presse hier, la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples est largement revenue sur les multiples formes de violences auxquelles font face les journalistes à l’ère du numérique. Par ailleurs, elle a interpellé les Etats sur la nécessité de respecter leurs engagements en faveur de la liberté de la presse.

Intimidation, harcèlement en ligne, menaces physiques, abus verbaux, violences sexuelles… Ce sont là les quelques maux qui gangrènent le travail des journalistes à l’ère du numérique, si l’on en croit la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples qui a profité de la célébration de la journée internationale de la liberté de la presse pour alerter sur les nombreuses formes de violences que subissent les professionnels de l’information en ce 21 ème siècle.

Selon le commissaire Ourveena Geereesaha Topsy-Sonoo, le thème retenu cette année : «Le journalisme sous l’emprise du numérique» met en évidence les défis émergents en matière de liberté de la presse à l’ère numérique. D’autant que internet est devenu une partie intégrante du journalisme.

Cependant, Ourveena Geereesaha Topsy-Sonoo reste persuadé que malgré ses nombreux avantages, ce nouveau canal de diffusion d’information n’est pas exempt de défis. En attestent les attaques récurrentes contre les journalistes. En effet, renseigne Mr Topsy, «la violence en ligne est devenue une nouvelle ligne de front en matière de sécurité du journalisme et se caractérise par des menaces physiques, des violences sexuelles, du harcèlement et des intimidations en ligne et des abus verbaux». Avec une tendance plus grave chez les journalistes féminines.

A l’en croire, les rapports montrent que les femmes journalistes sont de plus en plus souvent et de manière persistante confrontées au harcèlement et aux abus sexistes en ligne.

Un phénomène qui, selon lui, peut être défini comme la combinaison des harcèlements et des abus en ligne souvent brutaux et prolifiques, y compris des attaques ciblées impliquant fréquemment des menaces de violence physique et/ou sexuelle, des violations numériques de la vie privée et de la sécurité pouvant exposer des informations d’identification et exacerber les menaces de sécurité hors ligne auxquelles sont confrontées les femmes journalistes et leurs sources, et des campagnes de désinformation coordonnées exploitant la misogynie et d’autres formes de discours de haine.

Avec comme impact la sécurité des journalistes, mais aussi un effet étouffant sur la liberté d’expression et la liberté de la presse.

Outre ces défis liés au numérique, le commissaire Topsi a insisté sur l’impact des coupures de d’Internet et des médias sociaux sur le travail des journalistes dans un certain nombre de pays africains. A l’en croire, les perturbations et le manque d’accès à Internet et aux médias sociaux violent le droit à la liberté d’expression et à l’accès à l’information, contrairement à l’Article 9 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et peuvent avoir de graves conséquences sur la liberté de la presse en créant aux journalistes des difficultés pour s’acquitter efficacement de leur travail.

«LES ETATS DOIVENT RESPECTER ET PROTÉGER LE DROIT A LA LIBERTE D’EXPRESSION ET A L’ACCÈS À L’INFORMATION…»
En outre, la commission est revenue sur un autre sujet de préoccupation, à savoir l’augmentation exponentielle de la surveillance sur l’ensemble du continent. Et c’est pour révéler que de multiples rapports d’États déployant des technologies de surveillance dans leur juridiction, ont fait état de l’augmentation constante des outils de reconnaissance faciale qui suivent et identifient les individus à leur insu. A cela, s’ajoutent les caméras de surveillance permettant la reconnaissance faciale installée par un certain nombre d’États sous prétexte de la prévention de la criminalité.

Selon le commissaire Ourveena Geereesaha Topsy-Sonoo, ces systèmes seraient utilisés pour suivre à la trace et pirater à distance les journalistes et les critiques de l’État. Il dénonce par la même occasion ces technologies de surveillance permettant d’accéder à des données et de les traiter sans le consentement des concernés et contreviennent au droit à la vie privée.

Saisissant cette occasion, il invite les États parties à la Charte africaine leur obligation de prévenir, protéger et remédier aux attaques contre les journalistes, notamment en les protégeant de la violence, des menaces de violence et des diverses formes de harcèlement, comme le stipule le Principe 20 de la Déclaration de principes sur la liberté d’expression et l’accès à l’information en Afrique.

Il n’a pas manqué de les interpeller sur les dispositions du Principe 20, sur la sécurité des journalistes et autres professionnels des médias. Aussi, il les exhorte à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir, respecter et protéger le droit à la liberté d’expression et à l’accès à l’information en assurant l’accès à Internet et aux services de médias sociaux, notamment en s’abstenant de limiter et/ou de perturber cet accès.

Dans la même veine, il rappelle le Principe 41 de ladite Déclaration qui stipule que «les États ne doivent pas se livrer à des actes de collecte, de stockage, d’analyse ou de partage indiscriminés et non ciblés des communications d’une personne, ni les tolérer» et que «les États ne doivent se livrer à une surveillance ciblée des communications que si elle est autorisée par la loi, conforme au droit et aux normes internationales en matière de droits de l’homme et fondée sur une suspicion spécifique et raisonnable qu’un crime grave a été ou est en train d’être commis ou pour tout autre but légitime ».

Aïssatou DIOP

Digital Manager - Chef de projet chez Alixcom Dakar | E-mail: saliou@dakar-echo.com | +221 77 962 92 15

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