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La future loi immigration en France, un séisme pour le droit des étrangers

– La France va (encore) réformer son arsenal législatif en matière d’immigration et il n’en fallait pas moins pour que l’ensemble de la classe politique se mette en ébullition.

Le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, qui a dévoilé, mercredi, les principaux axes de ce nouveau texte, s’est en effet attiré les foudres des oppositions de tous bords.

Les nouvelles dispositions de ce projet phare du second quinquennat d’Emmanuel Macron, ne sont pas nombreuses mais elles vont permettre à l’Exécutif d’opérer un véritable virage dans son approche à l’immigration.

Quelles sont les orientations du texte?
La mesure qui fait le plus couler d’encre depuis mercredi est évidemment celle visant à régulariser les sans-papiers prêts à travailler dans des secteurs dits « sous tension ».

Les autorités espèrent ainsi pallier à un manque de personnel dans plusieurs secteurs comme par exemple l’hôtellerie et le bâtiment en offrant un titre de séjour aux travailleurs qui seraient en situation irrégulière sur le sol français.

Darmanin souhaite par ailleurs instaurer ce qu’il qualifie « d’exigences d’intégration » avec une maîtrise de « la langue » et un partage des « valeurs » qui conditionneront « la délivrance des titres de séjour ».

Il veut également que « le travail » devienne « la pierre angulaire d’une intégration réussie » sur le territoire français.

Le gouvernement entend enfin faciliter « la vie de ceux qui veulent s’intégrer, qui travaillent et qui respectent la République, par exemple avec le renouvellement automatique des titres pluriannuels des étrangers qui ne posent aucun problème et qui n’ont aucun casier judiciaire ».

Néanmoins, s’agissant des expulsions, le ministre de l’intérieur veut mettre les bouchées doubles pour les accélérer et surtout augmenter leur nombre.

« Nous proposons aussi de lever les réserves d’ordre public qui nous empêchent d’éloigner certains étrangers délinquants. Nous rendrons la vie impossible aux étrangers irréguliers sous OQTF (obligation de quitter le territoire français), par exemple en s’assurant qu’ils ne bénéficient plus de prestations ou de logements sociaux », a en outre détaillé Gérald Darmanin sur ses réseaux sociaux.

Le texte, toujours en gestation, « permettra d’être implacables dans la lutte contre l’immigration irrégulière et d’améliorer » la capacité de la France « à expulser les étrangers irréguliers » notamment en réduisant le nombre de procédures de recours possibles de 12 à 4.

Et la dernière mesure qui promet elle aussi, de vifs débats, prévoit l’inscription des personnes visées par des OQTF, sur le fichier des personnes recherchées.

– Les oppositions vent debout contre le contenu de cette future loi
Face aux dispositions de ce futur projet de loi, l’ensemble des partis de droite et d’extrême-droite se mobilise principalement contre la régularisation des travailleurs sans-papiers.

La députée du RN (Rassemblement National), Marine Le Pen qui considère, sur ses réseaux sociaux, qu’il s’agit d’une « campagne de régularisation de clandestins », a très rapidement réagi.

« Quel est l’intérêt de l’immigration économique quand on a 5,4 millions de personnes inscrites à Pôle Emploi, et quand on sait que le taux chômage des étrangers est le double de celui des Français ? », a-t-elle interrogé jeudi matin à l’antenne de France 2.

La cheffe de file du RN estime en effet qu’en « matière d’immigration, la situation s’aggrave d’année en année » et que la nouvelle loi immigration va ouvrir « le pays à de l’immigration légale dans des proportions inouïes » avec « en plus le coût de l’Aide médicale d’Etat pour les clandestins (qui) a doublé ».

Même son de cloche du côté du député LR (Les Républicains), Éric Ciotti, qui pointe « une forme de supercherie pour aller vers la régularisation » et critique les ministres qui « proposent de régulariser les étrangers en situation irrégulière au motif qu’ils pourraient pourvoir des métiers en tension » alors que la France n’arrive « pas à expulser les immigrés faisant l’objet d’OQTF ».

Mais même à gauche, l’orientation du gouvernement ne convainc personne, et inquiète au plus haut point.

Pour le député NUPES (Nouvelle union populaire écologique et solidaire), Thomas Portes, « l’extrême-droite n’est plus dans l’opposition, elle gouverne ».

« En clair, Gérald Darmanin propose d’utiliser des êtres humains comme de la chair à canon pour le patronat. Tu viens, tu trimes, on t’exploite et après on te dégage. C’est à vomir », grince celui qui est également à la tête de l’observatoire national de l’extrême-droite.

– Un service après-vente pour convaincre et adoucir les angles
Face au tollé provoqué à droite par ces annonces qui viendront réformer en profondeur les droits des immigrés, le locataire de Beauvau multiplie désormais les interventions télévisées et autres conférences de presse pour tenter de déminer le terrain.

Pour rassurer à sa droite, il promet que la mesure de régularisation des travailleurs sans-papiers pour exercer un « métier sous tension » n’est pas « un plan massif de régularisation ».

« Si le métier n’est plus en tension, la personne perdra son titre de séjour au bout d’un an » et devra repartir dans son pays, assure Gérald Darmanin, qui plaide pour « une immigration plus qualitative ».

Il se dit également « ferme mais pas fermé » et « ouvre la porte à des propositions » qui émaneraient de l’opposition pour enrichir ou moduler le projet de loi.

– Les sans-papiers sceptiques sur la mesure de régularisation

Si au départ, l’annonce d’une possibilité de régularisation sur des critères professionnels a pu susciter l’engouement du côté des principaux concernés, les précisions de Darmanin sont venues doucher leurs espoirs.

Abdelhak, arrivé du Maroc à Nice il y a quatre ans, est toujours en situation irrégulière, et fait l’objet d’une OQTF depuis plus d’un an.

Il exerce, à son compte, une activité de mécanicien et dispose de revenus confortables pour assurer son quotidien.

« Au début quand tu entends ça et que tu es sous le coup d’une OQTF, tu te dis que c’est intéressant et que tu vas pouvoir souffler en vivant légalement, mais ensuite, vu les précisions, ce n’est même pas la peine d’essayer », souffle le trentenaire.

Il refuse « d’être utilisé » pour « combler les besoins des uns et des autres » et ensuite « être jeté dans un avion comme un indésirable ».

Jean Louis Verdier - Rédacteur en Chef Digital - Paris- Dubaï - Hong Kong dakarecho@gmail.com - Tél (+00) 33 6 17 86 36 34 + 852 6586 2047

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