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La deuxième vie des étoilés de Barkhane

Plusieurs généraux ayant commandé la plus importante opération extérieure française quittent la grande muette prématurément sans voir obtenu la promotion qu’ils espéraient, quand d’autres ont su davantage capitaliser sur leur expérience au sein de l’opération sahélienne. Enquête.

Y a-t-il un avenir après Barkhane ? Si commander la plus importante « Opex » française reste un poste prestigieux, l’après- Barkhane semble plus complexe. Alors que les généraux qui prennent la tête de l’opération jouissent d’une visibilité politique et médiatique sans commune mesure, ils n’obtiennent pas pour autant la carrière que l’écusson Barkhane leur laissait espérer.

Dernier exemple en date, celui du général trois étoiles Frédéric Blachon. Ce commandant de l’opération sahélienne de 2018 à 2019 doit quitter l’armée à la fin de sa mission à la tête de la 1re Division de l’armée de terre. Son prédécesseur, le général Bruno Guibert, doit lui aussi prendre sa retraite de la grande muette après une année sans affectation propre. Il est, depuis 2019, chargé de mission auprès du chef d’état-major de l’armée de terre, Thierry Burkhard.

Doutes chez les généraux
Si le général François-Xavier Le Pelletier de Woillemont, commandant de l’opération française de 2016 à 2017, est toujours officier d’active, il opère depuis l’été 2018 au Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), une structure considérée comme peu stratégique chez les gradés.

Ces trajectoires alimentent un certain doute chez les généraux qui réfléchissent dorénavant à deux fois avant de faire acte de candidature pour prendre la tête de l’opération sahélienne.

Si on ignore encore le sort précis de l’actuel patron de Barkhane, Pascal Facon, qui cédera cet été sa place au général Marc Conruyt, il devrait néanmoins continuer sa carrière dans l’armée.

Très proche du chef d’état- major des armées (CEMA) François Lecointre, qui avait activement soutenu sa candidature en 2019, son nom circule depuis quelques jours pour rejoindre la Coalition pour le Sahel, dont le secrétariat doit prochainement déménager à Bruxelles 

Nouvel élan dans le privé
Mais si Barkhane n’a pas été le tremplin espéré pour certains généraux, d’autres, au contraire, ont su capitaliser sur leur expérience sahélienne. C’est notamment le cas du général quatre étoiles Grégoire de Saint-Quentin, actuel sous-chef opérations de l’état-major des armées, qui quittera l’armée dans quelques jours.

Commandant de Serval (ancêtre de Barkhane) de 2013 à 2014, il devrait rebondir dans le privé et est actuellement en discussions avec plusieurs cabinets de conseil. Son nom a longtemps circulé pour succéder à l’amiral Bernard Rogel comme chef d’état-major particulier d’Emmanuel Macron, mais le poste devrait finalement revenir à un autre marin : Pierre Vandier. Saint-Quentin avait même rencontré le président lors d’un entretien, sans parvenir à le convaincre.

Quant au général Jean-Pierre Palasset, à la tête de Barkhane d’août 2014 à août 2015, il est aussi parvenu à surfer sur son expérience dans la bande sahélo-saharienne. Nommé n° 2 de la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure) de 2015 à 2019, où il fut successivement « dircab » de Bernard Bajolet et Bernard Emié, il avait obtenu sa quatrième étoile dès sa sortie de commandement de l’opération française au Sahel.

Depuis son départ de l’armée, il y a un an, il opère en « solo » via sa propre micro structure et propose notamment ses services aux pétroliers. Il a récemment travaillé pour la « junior » Delonex Energy. Très active en Ethiopie et au Kenya, la société pétrolière détenue par le fonds américain Warburg Pincus opère depuis 2017 au Tchad, où elle détient trois blocs via United Hydrocarbon Chad Ltd (UHCL). Un pays dont est particulièrement familier le général Palasset, qui avait son état-major dans la capitale tchadienne lorsqu’il dirigeait Barkhane.

Son successeur à la tête du déploiement militaire français au Sahel, Patrick Brethous, a lui aussi su capitaliser sur son expérience et occupe pour encore quelques semaines le très convoité poste de sous-chef opérations de l’armée de terre. Mais tous ces généraux avaient déjà de belles carrières avant Barkhane, que l’opération sahélienne est venue compléter sans pour autant constituer un véritable tremplin.

Des vocations dans l’aviation
Si Barkhane suscite l’interrogation chez les étoilés de l’armée de terre, elle alimente la convoitise chez les aviateurs qui occupent traditionnellement le poste de « général adjoint opérations », ou « GAO » dans le jargon militaire. Celui-ci est devenu en quelques années très prisé des généraux de l’armée de l’air, qui n’hésitent pas à y placer ses éléments jugés les plus prometteurs, à l’instar du général Stéphane Mille. GAO de Barkhane de 2016 à 2017 et à la tête du Centre de planification et de conduite des opérations depuis 2018, le général est promis à succéder à Grégoire de Saint-Quentin en tant que sous-chef opérations de l’état-major des armées.

Autre profil qui a su capitaliser sur son séjour sahélien : le général Matthieu Pellissier. GAO de Barkhane de 2015 à 2016, le général quatre étoiles commande depuis 2019 le prestigieux Commandement des forces aériennes (CFA). Quant à l’actuel adjoint aux opérations, Cyril Carcy, spécialiste des drones, il devrait être affecté aux Etats-Unis cet été.

Avec La Lettre du Continent

Digital Manager - Chef de projet chez Alixcom Dakar | E-mail: saliou@dakar-echo.com | +221 77 962 92 15

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