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La vie des étudiants sénégalais de Wuhan mérite que le Sénégal déploie tous les moyens nécessaires et prioritaires pour qu’ils regagnent le Sénégal

Il y a quelques jours, le gouvernement du Sénégal a invité près de 20 experts de la diaspora œuvrant dans le secteur du pétrole. Des cadres de haut niveau à qui le Président Macky Sall a demandé expressément de venir apporter leur pierre à l’édification du pays. Et tout le monde l’a entendu, pour amadouer ces fils du pays qui travaillent dans les plus grandes entreprises du monde, exhorter le ministre du Pétrole et des Energies à examiner les tenants et aboutissants d’un retour au pays natal pour ses enfants prodiges.

Mais avec les 13 étudiants qui sont bloqués à Wuhan en Chine après la propagation de la maladie du coronavirus, et les sorties manquées des autorités gouvernementales au premier rang desquelles le président de la République Macky Sall, il y a à se demander si ce pays en vaut la peine.

Franchement les communications servies par le chef de l’Etat et ses ouailles sont dévastatrices. «Leur rapatriement requiert et demande une logistique tout à fait hors de portée du Sénégal. Puisqu’il faudrait des avions spéciaux qui puissent aller sur place. Peut-être du personnel militaire», a soutenu sans sourciller le Président Macky Sall avant d’ajouter : «Et lorsque ces personnes reviennent, il faudrait les mettre en quarantaine dans un lieu équipé en conséquence. Ce qui n’est pas le cas pour le moment ». En somme, débrouillez-vous quoi !

Et pour couronner cette tragédie communicationnelle, le ministre Seydou Guèye lance : «Le Président a dit la vérité et dire le contraire, c’est faire le jeu du populisme.» Ahurissant !

D’autant que le Pr Souleymane Mboup, une voix autorisée dans ce domaine, a dit à qui veut l’entendre que le pays est prêt à faire face à cette maladie. Et c’est à juste titre que le journaliste rompu à la tâche Ibrahima Bakhoum souligne qu’en tenant ses propos, le président de la République renvoie un message peu reluisant : «C’est la mort. Il ne l’a pas dit comme ça, mais c’est tout comme.» Pour l’enseignant en journalisme et monument de la presse sénégalaise, le président de la République est le premier des diplomates dans ce pays ; il ne peut pas se prononcer comme ça. C’est à la fois violent et désespérant pour ces jeunes.

En tout cas pour ces «bagnards» de Wuhan, le sentiment d’appartenir à la nation sénégalaise s’effrite de jour en jour en voyant le gouvernement faire preuve d’un fatalisme de mauvais aloi.

De l’indifférence et de l’insensibilité même à la limite. Bon sang ! La vie de ces étudiants ne mérite-telle pas que le pays déploie tous les moyens nécessaires et en fait une priorité pour qu’ils regagnent le Sénégal comme le font tous les autres pays qui tiennent à l’avenir de leurs fils. Ces «13» ont peur. Ils sont déboussolés, meurtris face à une maladie qui progresse de manière exponentielle et dont les chances qu’elle soit stoppée rapidement ne sont pas encore lisibles. On ne jette pas ses enfants comme ça comme des malpropres dans la gueule du loup. Le gouvernement gagnerait donc à les faire sortir de ce bourbier sanitaire.

Ils étaient partis pour se former et certainement revenir pour servir ce pays. Mais pas pour mourir alors que le gouvernement peut faire quelque chose. Ce n’est pas du fatalisme ni de l’impuissance. C’est juste un manque criard de sensibilité et de volonté.

Et il est à se demander même l’utilité du dialogue national s’il ne peut mettre une question aussi cruciale sur la table. Et demain, qu’on ne vienne pas dire à ces étudiants de venir servir le pays. Car le pays les a lâchés quand ils avaient le plus besoin de lui. Par ailleurs, on ne le souhaite pas mais s’il leur arrivait quelque chose, que le gouvernement ne vienne pas nous dire qu’il a fait tout son possible ! Parce que les populations auraient du mal à le croire.

Mamadou Mbakhé NDIAYE

Digital Manager - Chef de projet chez Alixcom Dakar | E-mail: saliou@dakar-echo.com | +221 77 962 92 15

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