Politique

Guéguerre au sein de l’APR: Momar Diongue dégage trois raisons

Les remous au sein du parti au pouvoir, l’Alliance pour la République, qui semblent s’accentuer depuis quelques temps ne sont pas le fruit du hasard, selon le journaliste et analyste politique, Momar Diongue.

Interpellé hier, jeudi 05 décembre sur les remous au sein de l’APR, le journaliste et analyste politique a évoqué trois raisons principales dont entre autres la tare congénitale que traine le parti au pouvoir du fait de sa non structuration, le sentiment de frustration des leaders qui peuvent se prévaloir d’une légitimité historique et les jeux et manœuvres en perspective de la succession du Président Macky Sall.

«Les remous qu’on voit depuis quelques temps au sein du parti au pouvoir, l’APR, peuvent s’expliquer pour trois raisons. La première, c’est que le parti présidentiel traîne une tare congénitale. C’est un parti que son leader, le président Macky Sall, n’a pas voulu structurer. Il n’y a pas une structuration verticale qui permet de comprendre comment s’organise le leadership au sein du parti. Il y a qu’un seul leadership qui est connu et reconnu, accepté par tous, c’est le leadership du Président Macky Sall.

À partir de ce moment où on ne sait pas qui est qui et qui fait quoi, on a comme l’impression que le parti est un panier de crabes où au moindre problème, chacun se lève et dit ce qu’il pense. Et c’est pour cette raison d’ailleurs qu’on a l’impression d’un désordre et d’une certaine cacophonie au sein du parti.

Ça se voit quand il y a des sujets sur lesquels le gouvernement est interpelé. Vous vous rendez compte à chaque fois qu’il y a une pluralité de prises de parole au point d’ailleurs que le Président Macky Sall s’en est rendu compte et a voulu un peu réorganiser la prise de parole au sein de son parti et dans son camp. Cela est lié à la tare congénitale que présente le parti, faute d’une structuration qui permettrait de savoir les rôles, qui représente quoi et qui fait quoi dans le parti».

«Frustration» de leaders à…la légitimité historique»
«La deuxième raison me semble relever d’un sentiment de frustration de la part de certains leaders qui peuvent se prévaloir d’une légitimité historique. Qui étaient là, qui ont accompagné Macky Sall durant la période des vaches maigres, quand beaucoup de personnes ne croyaient à son étoile et qu’il traversait la période la plus compliquée de sa carrière politique du fait de la crise qu’il a eue avec le Président Wade et le système PDS.

Parmi ces leaders, on peut citer Moustapha Cissé qui ne fait pas mystère de ça. On l’a entendu, à l’Assemblée nationale, reprocher au Président Macky Sall, de mépriser quasiment ses compagnons de la première heure. De ne pas leur donner suffisamment de considération et d’en donner par contre beaucoup à ses alliés de la vingt-cinquième heure et ceux qui l’ont rejoint récemment.

Et ce que dit Moustapha Cissé Lô, si on analyse la nomenclature du parti, on se rend compte qu’il n’a pas totalement tort. Parce qu’il y’ a un certain nombre de leaders qui ont accompagné le Président Macky Sall dès les premières heures et qui peuvent se prévaloir d’une légitimité historique et qui sont aujourd’hui à la périphérie du parti, qui ne jouent pas les premiers rôles ou qu’on ne voit pas aux premiers rangs. Il y a bien évidemment Moustapha Cissé Lô et il n’a pas manqué de le dire.

Il y a également Alioune Badara Cissé qu’on peut considérer comme quelqu’un qui a été quasiment envoyé au frigo en l’éloignant du jeu politique avec cette fonction qu’on lui a collé de médiateur de la République. Si vous ajoutez également quelqu’un comme Mbaye Ndiaye qui a été pendant très longtemps le chargé des élections et le patron des structures de l’APR, il est lui aussi à la périphérie du parti.

Moustapha Diakhaté, connu pour sa liberté de ton vient d’être démis de ses fonctions par le président de la République. Il y a également le cas de Marième Badiane qui a été pendant très longtemps patronne des femmes de l’APR et qui a elle aussi perdu du galon. Donc, à voir de près, les compagnons de la première heure du président Macky Sall sont, aujourd’hui, envoyés dans les cordes».

Des jeux et manœuvres en perspective de la succession de Macky Sall
«La troisième et dernière raison, ce sont les jeux et manœuvres qui sont en train de se faire en perspective de la succession du Président Macky Sall. Quelqu’un comme Moustapha Cissé Lô est suffisamment clair sur la question parce que je rappelle qu’il avait créé un mouvement dénommé «Horizon 2020».

Cela veut dire tout simplement que l’horizon qu’il s’est fixé dans son compagnonnage et son soutien sans faille à Macky Sall, c’était l’horizon 2020. Et, il n’avait pas hésité à dire avant même l’élection présidentielle de 2020 que lui s’était engagé aux côtés de Macky Sall pour lui garantir deux mandats dont un d’abord de sept ans et un second et après lui, il se sentirait quitte avec sa conscience, une fois qu’il aura aidé le président Sall à se faire réélire.

Donc, si on réfère à tout ce que je viens de rappeler, cela veut dire que lui (Cissé Lô) pense avoir rempli son rôle et d’avoir été suffisamment loyal à Macky Sall et qu’il peut maintenant penser tourner la page. Ce qui explique le langage particulièrement musclé, dur et très critique qu’il a vis-à-vis du président Macky Sall mais aussi de son gouvernement et des ministres. Donc, lui quand même, il annonce les couleurs.

A côté, il y a d’autres qui ne le disent pas comme lui mais qui sont en embuscade et à qui on peut prêter des intentions de vouloir succéder au président Macky Sall. On peut en citer pêle-mêle : le ministre Makhtar Cissé dont le nom revient régulièrement et que certains pensent qu’il a le profil de l’emploi et l’étoffe d’un présidentiable, il y a aussi son collègue Amadou Ba qui a joué un rôle éminemment important dans la reconquête de Dakar par l’APR et dont certains pensent également qu’il a l’étoffe d’un présidentiable.

D’aucuns pensent également à l’ancien Premier ministre, Aminata Touré, qui occupe aujourd’hui la présidence du Conseil économique social et environnemental. Donc, toutes ces personnes ont peut-être développé des affinités dans le parti et de manière souterraine, les lignes sont peut-être en train de bouger à l’interne pour tel ou tel autre de ces profils. Et c’est tout cela à la fois qui explique les convulsions internes que traverse l’APR aujourd’hui».

Nando Cabral Gomis

Jean Louis Verdier - Rédacteur en Chef Digital - Paris- Dubaï - Hong Kong dakarecho@gmail.com - Tél (+00) 33 6 17 86 36 34 + 852 6586 2047

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