Politique

Déballages, exclusion de Moustapha Cissé Lô et contentieux politiques: l’APR, nouveau foyer de tensions…horizon 2024

Suite à une énième sortie au vitriol teintée d’insanités et d’accusations à l’encontre de hauts responsables de l’APR, le tonitruant Moustapha Cissé Lô vient d’être exclu du parti au pouvoir par une commission de discipline réunie hier sur instruction du président Macky Sall.

Quel enjeu se dessine derrière cette sanction qui frappe ce compagnon de route du président Macky Sall dans son ascension vers le pouvoir ?

Les observateurs de la scène politique ont décrypté ce regain de tensions qui entache gravement la gestion du pouvoir en place.

C’est acté ! Moustapha Cissé Lô, l’ancien président du Parlement de la CEDEAO et deuxième vice-président de l’Assemblée Nationale, a été exclu du parti présidentiel hier lors d’une réunion de la commission de discipline de l’APR.

Un conclave tenu dans la foulée du tintamarre suscité par la publication des fameux « messages privés» dans lesquels le parlementaire abreuvait d’injures ses « frères » de parti notamment Yakham Mbaye et Farba Ngom.

Le tout, sur fond d’accusations de détournement de deniers publics dans divers marchés attribués par un Etat dont il était jusqu’à hier un des principaux piliers. Son exclusion constitue la deuxième à laquelle procède le parti au pouvoir après celle de Moustapha Diakhaté, ancien chef de cabinet du président Macky Sall après avoir dirigé le groupe de la majorité à l’Assemblée nationale.

Spécialiste de la communication politique, le journaliste Bakary Domingo Mané voit en cette polémique, les prémices d’un long et palpitant feuilleton politique qui va continuellement marquer ce dernier mandat du chef de l’Etat Macky Sall.

« On est en train d’assister au début des remous nés des frustrations de militants de la première heure. Ce qui, quelque part, s’explique par l’absence de cadre d’expression au sein de la formation politique au pouvoir mais aussi par un sentiment d’être mis à l’écart dans la gestion du pays au profit des nouveaux arrivants.

Cette situation risque de perdurer avec d’autres sorties en vue dans la mesure où l’APR souffre d’un manque de structuration. Une structuration avec des instances qui, si elles se réunissaient régulièrement, auraient permis à Moustapha Cissé Lo d’avoir un espace où vider sa bile », a expliqué Domingo Mané.

Poursuivant son analyse de cette guéguerre qui règne au sein de l’Alliance pour la République, le journaliste estime que c’est toute la gestion du président qui est en train d’en pâtir.

L’enseignant en communication politique ajoute : « Face à ces dérives, Macky Sall est actuellement dans une situation très inconfortable. Du fait de la pandémie du coronavirus qui sévit dans le pays, notre économie est complètement à terre. Et si, au lieu de se concentrer sur les vrais préoccupations des Sénégalais, il prête le flanc en donnant de l’importance aux problèmes internes de son parti, ça va être le comble des incohérences.

La façon dont son parti est managé en ce moment laisse la porte ouverte à d’autres dérives qui se profilent à l’horizon » prédit le responsable du Cored. Pour illustrer son propos, il fait remarquer que, dans le communiqué annonçant l’exclusion de Moustapha Cissé, les potentiels fauteurs de troubles au sein du parti présidentiel sont avertis en filigrane.

Assane Samb, analyste politique: Macky Sall n’a pas appris du syndrome du PDS
Selon le spécialiste en sciences politiques, le doyen Assane Samb, tous ces tiraillements qui secouent en interne le parti au pouvoir ne sont rien d’autre que la résultante d’une guerre de succession.

Hélas, estime-t-il, il s’agit là du même schéma qui a précipité la chute du PDS à l’époque. « C’est le syndrome PDS qui guette actuellement l’APR. Et Macky Sall n’a pas assez tiré les leçons du syndrome PDS. Dans ce parti, Abdoulaye Wade était la seule constante or une personne ne peut pas être une constante.

Quand vous créez un parti, il vous faut mettre en place des instances démocratiques fortes. On parle de la posture radicale de Cissé Lo mais il y a des responsables beaucoup plus frustrés que lui qui attendent seulement le bon moment pour se dévoiler », avertit l’analyste politique qui entrevoit une probable déstabilisation de l’APR par des ténors en rébellion.

« Il y a des non- dit dans ces bisbilles. Les gens ne peuvent pas se réveiller et s’insulter gratuitement sans qu’il y ait des motifs réels et pleins d’enjeux. Aujourd’hui, beaucoup de responsables du parti présidentiel pensent que Macky Sall est en train de mettre en orbite des personnalités pour le remplacer. Des personnalités dont l’éventuelle mise en selle et qui ne les arrange pas.

Et c’est un des facteurs qui sont en ce moment à l’origine des frustrations », ajoute Assane Samb, cet observateur de l’échiquier politique. D’ailleurs, explique-t-il pour étayer son propos, dans la plupart de ses sorties, Cissé Lo ne vise pas directement le chef de l’Etat mais c’est plutôt certains ténors du parti qu’il prend pour cibles.

Momar Thiam, expert en communication: Ces insultes c’est le degré zéro du langage politique
Expert en communication, le docteur Momar Thiam s’est penché sur les « audios pamphletistes » à l’origine de l’exclusion de Moustapha Cissé Lo des rangs du parti au pouvoir.

A en croire l’ancien conseiller en communication du président Abdoulaye Wade, c’est le degré zéro du langage politique qui a fait des émules sur les réseaux sociaux à travers les insanités proférés par un si haut responsable de la dimension de Moustapha Cissé Lo.

Par ailleurs, estime l’expert en com’, au-delà des différends crypto-personnels, l’auteur des injures a prononcé quelques phrases qui doivent interpeller la justice. « En cernant les contours de son discours, l’ancien président du Parlement de la CEDEAO a lancé deux à trois phrases chocs relatives à la gestion du marché des semences et celui du Ter (Train express régional).

Sur ce, dans un pays normalement constitué avec une justice qui se respecte, le procureur devrait immédiatement s’autosaisir sur cette affaire surtout que les révélations émanent d’une haute personnalité », a décrypté Momar Thiam qui, dans la même grille de lecture, voit des accusations de magouilles portées à l’encontre du chef de l’Etat par un parlementaire. Et pas n’importe lequel !

Falilou MBALLO

Digital Manager - Chef de projet chez Alixcom Dakar | E-mail: saliou@dakar-echo.com | +221 77 962 92 15

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