Une nouvelle étape judiciaire vient d’être franchie dans l’affaire Arcelor Mittal, impliquant plusieurs entités du géant mondial de l’acier. Une information judiciaire a été ouverte à l’encontre d’Arcelor Mittal Holding, Arcelor Mittal, Arcelor Mittal Limited, Arcelor Mittal Holland II Bv, Arcelor Mittal Mining Sénégal et Arcelor Mittal Infrastructures Sénégal SA.
Les accusations portent sur des infractions graves, notamment association de malfaiteurs, corruption, recel, blanchiment de capitaux, escroquerie et complicité. Cette procédure fait suite à une plainte déposée par l’État, qui s’est constitué partie civile dans ce dossier.
Tout commence en avril 2011, lorsque l’État sénégalais décide d’attaquer Arcelor Mittal devant la Chambre de Commerce Internationale (CCI) pour non-respect des engagements pris dans le cadre du développement et de l’exploitation du gisement de fer de la Falémé. Le Sénégal réclame alors 3 300 milliards de FCFA, ou à défaut, 1 600 milliards de FCFA, en guise de réparation.
Le 3 septembre 2013, la CCI rend une sentence accablante pour Arcelor Mittal, constatant de graves manquements de la part de la multinationale et ordonnant la poursuite de la procédure vers une phase de réparation. Tout semblait indiquer que l’État du Sénégal allait obtenir gain de cause et récupérer une somme significative.
Contre toute attente, le 4 juin 2014, le cabinet américain Cleary Gottlieb Steen Hamilton, représentant Arcelor Mittal, annonce au tribunal arbitral qu’un accord transactionnel a été signé avec l’État du Sénégal, mettant brutalement fin à la procédure. Montant du deal ? 150 millions de dollars (environ 90 milliards de FCFA), une somme bien inférieure aux montants initialement réclamés.
L’enquête se concentre sur un accord transactionnel daté du 30 mai 2014, ainsi que sur le versement de 150 millions de dollars par Arcelor Mittal. Ces fonds ont été transférés sur deux sous-comptes Carpa gérés par Me François Meyer, un avocat qui aurait joué un rôle central dans cette affaire. Selon les informations disponibles de Liberation, Me Meyer serait entré dans ce dossier de manière irrégulière, ce qui soulève des questions sur la légalité des transactions et des négociations menées.
Un élément clé de cette affaire réside dans le rôle des avocats représentant l’État. Me Rasseck Bourgi et Me Sébastien Bonnard, les deux avocats mandatés par l’État, ont confirmé avoir été évincés des négociations entourant l’accord transactionnel. Dans un mail inédit, ils ont exprimé leur désaccord avec la manière dont les discussions ont été menées, dénonçant un manque de transparence et une exclusion injustifiée. De même, l’agent judiciaire de l’État aurait refusé d’intervenir auprès du tribunal arbitral pour mettre un terme à la procédure, malgré les termes de l’accord.
L’éviction des représentants légaux de l’État des négociations jette une ombre sur la légitimité de l’accord transactionnel et sur les conditions dans lesquelles il a été conclu.
Face à ces incohérences, l’État sénégalais, représenté par Mes Ciré Clédor Ly, Bamba Cissé et Henri V. Gomis, a déposé une plainte avec constitution de partie civile. L’enquête devra déterminer si les 150 millions de dollars ont réellement atterri dans les caisses du Trésor public sénégalais, ou si une partie de ces fonds a pris une direction plus obscure.
L’ouverture de cette information judiciaire marque un tournant dans l’affaire Arcel Mittal. Les investigations devraient permettre d’éclaircir les responsabilités de chaque partie impliquée et de déterminer si les accusations portées sont fondées.
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