La décision de la junte guinéenne de pousser pour une transition de 39 mois avant de restituer le pouvoir aux civils a été vivement critiqué dimanche tant par le parti de l’ex-président déchu que par ceux qui l’avaient combattu.
Ce choix, «qui ne repose sur aucun fondement juridique», est «inopportun dans un contexte où les acteurs sociopolitiques exigent la mise en place d’un cadre de dialogue inclusif sous la supervision de la communauté internationale», écrit le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC) dans un communiqué.
Sa mise en oeuvre serait «inadmissible, inconcevable, et inacceptable», ajoute cette coalition d’organisations de la société civile et de partis politiques constituée contre l’ancien président Alpha Condé.
Le colonel Mamady Doumbouya, chef de la junte militaire ayant renversé Alpha Condé en septembre, a annoncé samedi soir avoir opté pour une durée de transition «de 39 mois», défiant ainsi les partenaires régionaux de la Guinée qui demandent un délai bien plus court.
L’officier, qui s’est fait proclamer chef de l’Etat, a présenté cette durée comme une «proposition médiane» et «consensuelle», fruit de «larges et patientes consultations», une allusion à deux forums politiques s’étant achevés vendredi et ayant été boudés par un grand nombre de partis politiques qui en contestaient le fonctionnement et la légitimité.
Pour le FNDC, l’«attitude des autorités […] constitue une menace pour la paix et l’unité nationale» du pays. «Nous ne sommes pas d’accord» avec la décision annoncée par le colonel Doumbouya, «c’est une véritable moquerie, un mépris total», a réagi auprès de l’AFP Édouard Zoutomou Kpoghomou, président d’un parti membre de l’Alliance nationale pour l’alternance et la démocratie (Anad), une composante du FNDC regroupant en son sein une vingtaine de formations politiques. «Ce n’est plus une transition, mais un mandat», a-t-il ajouté.
Dans un communiqué distinct, l’Anad a dénoncé pour sa part une «volonté obstinée [de la junte] de conserver le pouvoir, au delà du temps requis pour l’organisation d’élections crédibles, par des manoeuvres et combines».
Rejetant également «le chronogramme unilatéral» de transition annoncé par le colonel Doumbouya, le Rassemblement du peuple de Guinée (RPG), ancien parti de M. Condé a dit son «inquiétude» et exigé, comme le FNDC, un «dialogue inclusif» sous médiation de la communauté internationale pour définir un calendrier «consensuel».
Comme le Mali et le Burkina Faso, deux autres pays de la région où les militaires ont pris le pouvoir, la Guinée a été suspendue des instances de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
L’annonce du colonel Doumbouya sur la durée de la transition expose le pays à une extension des sanctions économiques décidées par la CEDEAO, qui avait réclamé en septembre à la junte d’organiser des élections dans un délai de six mois.
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