Alors que le premier tour de la CAN se termine ce mercredi soir, et que 6 qualifiés pour la phase à élimination directe sont encore à définir, l’édition 2023 enchante les fans par le jeu et par ses buts. À tel point qu’il est légitime de se demander si l’on n’assiste pas à l’une des plus belles CAN de l’histoire.
Il y a deux ans de cela, la CAN disputée au Cameroun, sous le feu des critiques, avait eu besoin d’un plaidoyer pour parfaire sa légitimité. Cette année, elle ne souffre aucune contestation sur le plan sportif. Mieux, elle mérite qu’on chante ses louanges, justifiées par des rencontres de qualité, des équipes emballantes et puis, surtout, des buts en pagaille.
Une CAN que le président ivoirien, Alassane Ouattara, souhaitait être « la meilleure jamais organisée ». Elle est peut-être la meilleure jamais disputée, et ça, ce n’est déjà pas rien. Pourtant, sur un fil, la Côte d’Ivoire attend fébrilement de voir si elle est qualifiée ou non pour les huitièmes de finale de sa compétition. La passion, elle, est toujours là.
Le cortège digne d’une ambiance sud-américaine en amont du match d’ouverture était là pour en témoigner. Les scènes de violence à Abidjan l’ont aussi démontré, d’une façon un peu moins enviable toutefois. Pas de quoi gâcher, pour autant, l’entrain d’une compétition qui vit à toute vitesse.
Les artistes sont de sortie
Tout n’avait pourtant pas bien commencé. André Onana n’a pas daigné rater un match avec Manchester United, tant pis pour lui. Le Cameroun s’est qualifié sans lui, remplaçant face à la Gambie, et son match contre le Sénégal est déjà à oublier. Umar Sadiq a été rapatrié en Espagne pour une blessure longue durée, mais était déjà sur le pré quelques jours plus tard avec la Real Sociedad. Étonnant, mais pas handicapant, pour des Super Eagles blindés en attaque.
Alors que la blessure de Mohamed Salah prive la compétition de l’un de ses joyaux, et que sa gestion laisse planer le doute, Emam Ashour et Trezeguet sont là pour rappeler que les rangs des Pharaons sont remplis de joueurs de ballon. Au rang des pépites, la compétition mériterait bien de revoir le Sud-Africain Themba Zwane, si gracieux face à la Namibie, alors qu’elle est déjà assurée de profiter de Gelson Dala ou de Lamine Camara, au moins pour une rencontre supplémentaire.
Baghdad Bounedjah et Mostafa Mohamed ont démontré que l’Afrique est garnie de buteurs de grande classe, comme Emilio Nsue, qui tutoie des sommets historiques à la tête d’une épatante Guinée équatoriale. Derrière eux, c’est une ribambelle de bangers auxquels on a pu assister. En ordre dispersé, Bebe, Mohamed Konaté, Pablo Ganet, Sidi Bouna Amar, Aboubakary Koita, Azzedine Ounahi ou Mohammed Kudus – pour ne citer qu’eux – ont gratifié la phase de poules de réalisations toutes aussi sublimes les unes que les autres.
Toutes ces fulgurances ont aussi une conséquence des plus jouissives : les buts pleuvent en Côte d’Ivoire. 88 pions ont déjà été inscrits, alors que quatre matchs doivent encore se jouer ce soir. C’est déjà 20 buts de plus que lors des deux dernières éditions à l’issue de la phase de poules (68 en 2019 et 2021), soit une moyenne de 2,75 unités par match pour l’instant. Toutes les équipes ont marqué, et aucune rencontre ne s’est terminée par un score nul et vierge. Vous avez dit divertissement ?
Des exploits, du suspens, et un goût prononcé pour le finish
Au rayon des surprises, les plus friands de belles histoires et de grandes débâcles ont été servis. Le Mozambique a fait trembler l’Égypte, le Cap-Vert a fait tomber le Ghana, comme la Namibie avec la Tunisie, la Guinée équatoriale a écrasé la Côte d’Ivoire chez elle, alors que la Mauritanie a battu et éliminé l’Algérie. La Gambie a même cru quelques instants à sa qualification pour les huitièmes de finale. Un rêve devenu réalité pour la Guinée équatoriale, le Cap-Vert ou l’Angola, tous premiers de groupe, mais aussi pour la Mauritanie d’Amir Abdou, décidément inspiré à la CAN, un an après avoir fait vibrer le continent à la tête des Comores.
Ce mercredi soir, la Zambie et la Namibie pourraient bien mettre au supplice toute une nation en jouant un vilain tour au pays hôte. Didier Drogba a demandé au peuple ivoirien de faire bloc derrière le Maroc, dont la victoire assurerait aux Éléphants de voir le tour suivant.
Des géants d’Afrique, qui cumulent trois CAN, obligés de se serrer les coudes pour parer à l’émergence toujours plus prononcée des plus petites équipes du continent. Tout se jouera au finish, dans les dernières rencontres de cette phase de poules. Une belle allégorie de ce qu’aura été ce premier tour, tout en suspense, jusqu’au bout.
En effet, ce sont pas moins de 18 buts qui ont jusqu’ici été inscrits après la 85e minute d’une rencontre, alors que 9 d’entre elles se sont littéralement jouées dans le money time. Les fins de match de la troisième journée de ce premier tour ont notamment usé de dramaturgie. Demandez donc à l’Égypte, longtemps virtuellement éliminée, ou au Ghana inversement qualifié de longues minutes durant.
La Gambie a cru en son destin elle aussi, et sans la VAR, aurait peut-être pu s’offrir un final maradonesque. Par la force des choses, le Cameroun aussi est passé par toutes les émotions, tout comme les nombreux spectateurs et téléspectateurs. Cette formule permettant le repêchage des quatre meilleurs troisièmes est autant un supplice pour les calculettes qu’un délice pour les fans de thriller.
En coulisses, ça bouge aussi
On notera aussi que ces progressions sur le plan sportif s’accompagnent de nombreuses tensions une fois les 90 minutes terminées. Entre le tumulte général qui a suivi le match Maroc-RD Congo, les propos acerbes d’Aguibou Camara envers la Gambie, suivis d’excuses il est vrai, les querelles entres joueurs et journalistes, ou même directement entre les principaux suiveurs de la compétition, on a pu vivre certains moments assez surréalistes hors du rectangle vert.
Oui, aussi, les stades ne sonnent jusqu’ici pas toujours plein, oui on a pu voir certains couacs organisationnels, comme les pelouses à Abidjan qui se sont vite dégradées, ce qui est inhérent à une telle compétition, certes il y a jusqu’ici du racisme à gerber, mais à l’heure de siffler la fin de la phase de poules, le football a vraisemblablement gagné la première bataille. En espérant que les nations toujours engagées conservent cette fraîcheur et cet allant une fois la peur du vide des matchs couperets arrivée.
On sait déjà que le Nigeria et le Cameroun croiseront le fer, que les deux Guinée encore en lice seront opposées, tout comme les deux « petits Poucets », le Cap-Vert et la Mauritanie, qui assureront la présence d’une nouvelle surprise en quarts de finale. Un programme alléchant, qui ne demande qu’à tenir toutes les promesses semées depuis une grosse dizaine de jours.
Julien Faure avec SoFoot
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