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Un an après le coup d’Etat, Bamako craint de partager le sort de Kaboul

Un an après le coup d’Etat, Bamako craint de partager le sort de Kaboul

Les évènements d’Afghanistan éveillent chez certains Maliens le spectre d’une chute de Bamako après un désengagement partiel français, tant l’horizon sécuritaire et politique demeure sombre un an après le coup d’Etat qui a porté les colonels au pouvoir.

« Retrait annoncé de la force française sur le sol malien: faut-il s’attendre au même scénario qu’à Kaboul », titrait mercredi le journal « Le Soir de Bamako », devant l’effondrement subit du régime afghan face aux insurgés talibans après le retrait militaire américain.

En 2013, les soldats français avaient enrayé la progression des jihadistes, qui contrôlaient le nord du Mali et progressaient vers le centre, faisant craindre la prise de Bamako.

Après plus de huit ans d’engagement, Paris prévoit de fermer d’ici le début de 2022 les bases de Kidal, Tessalit et Tombouctou, dans le nord.

La France devrait maintenir à terme entre 2.500 à 3.000 hommes dans la région, contre 5.100 engagés aujourd’hui au Sahel.

Une diminution qui fait craindre que certaines zones ne passent complètement aux mains des jihadistes, tant les Etats locaux semblent dans l’incapacité de restaurer leur autorité dans ces vastes bandes désertiques et extrêmement pauvres.

« Chaque année la situation se dégrade et sans la présence de l’armée française, une ville comme Gao peut tomber en moins de 30 minutes… Ce n’est que grâce au dispositif sécuritaire des partenaires (principalement forces françaises et de l’ONU, ndlr) que les grandes villes du Nord sont toujours sous contrôle de l’État », souligne Mohamed Dicko, 24 ans, étudiant à la faculté de médecine de Bamako.

« Frustrations contre l’Etat »
Les violences au Mali, qui ont débuté par des rébellions indépendantiste puis jihadiste dans le Nord, se sont ensuite propagées au centre et au sud du pays, se mêlant à des conflits intercommunautaires et à des attaques crapuleuses dans des zones où l’influence de l’Etat est très faible.

Le phénomène s’est étendu au Burkina Faso et au Niger voisins, où opèrent également des groupes affiliés à Al-Qaïda ou à l’organisation Etat islamique.

« Une psychose générale s’installe dans la région, mais les contextes sahéliens et afghans sont très différents. Une leçon est commune toutefois: malgré la puissance de feu déployée, le tout militaire ne peut pas être la solution », estime Baba Dakono, analyste politique basé à Bamako.

« Il faut ouvrir des discussions, par le bas, avec toutes les communautés, y compris les parias des groupes armés. La question idéologique n’occupe qu’une portion congrue de leurs discours. Il y a surtout des revendications politiques, des frustrations contre l’Etat », dit-il.

Les Maliens et leurs partenaires conviennent de longue date que le pays ne sortira pas de la tourmente sans solution politique, qu’elle implique ou non des discussions avec les jihadistes, auxquels les militaires au pouvoir sont ouverts et la France opposée.

« Coup d’Etat dans le coup d’Etat »
Mais le pessimisme règne un an après le putsch qui a renversé le président Ibrahim Boubacar Keïta le 18 août 2020 à la suite de plusieurs mois de manifestations contre la corruption et l’impuissance de l’Etat face à la violence. L’insécurité continue de s’étendre, la crise sociale persiste et les avancées politiques sont lentes.

Le nouvel homme fort, le colonel Assimi Goïta, s’est engagé à céder la place à des civils, après des élections prévues en février 2022, une échéance qui paraît de plus en plus difficilement tenable et qu’il n’a même pas évoquée mardi soir, lors d’une allocution télévisée célébrant l’anniversaire du coup d’Etat. Il s’est contenté de promettre « des élections transparentes aux résultats incontestables ».

Le colonel Goïta a écarté en mai 2021 les autorités intérimaires que les militaires avaient eux-mêmes mises en place, et s’est imposé en juin comme président de la transition à l’issue d’un « coup d’Etat dans le coup d’Etat », selon la formule du président français Emmanuel Macron.

Pour Moussa Tchangari, une figure de la société civile au Niger, « au Sahel, la guerre en cours ne peut pas être gagnée avec les mêmes armées étrangères qui ne l’ont pas gagnée en Afghanistan, mais aussi, avec le même type de dirigeants corrompus ».

« Cette guerre, si elle doit être gagnée, ne le sera qu’avec la construction d’un nouveau contrat politique et social restituant au peuple sa souveraineté et créant les conditions d’une vie digne pour les millions de personnes qui en sont aujourd’hui privées », a-t-il insisté.

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