Congo

Sassou Nguesso, « l’Empereur » du Congo

Il est arrivé au pouvoir en pleine Guerre froide, quand Jimmy Carter et Leonid Brejnev se partageaient le monde: le président du Congo-Brazzaville Denis Sassou a mis le cap sur le club des dirigeants autoritaires qui cumulent plus de 40 ans au pouvoir, après sa réélection écrasante selon les résultats provisoires.

Président? Ses homologues ivoirien et guinéen l’ont récemment appelé « l’Empereur ». Seul à bord, le maître de Brazzaville se montre de plus en plus intraitable avec ceux qui osent défier son pouvoir absolu à la tête de son petit pays pétrolier de cinq millions d’habitants étranglés par la crise économique.

« C’est un militaire », souligne un de ses proches admiratifs de sa longévité, alors que ses adversaires le disent fatigué et bon pour la retraite.

L’ancien officier n’en a en tout cas rien montré pendant la campagne, droit comme un i dans ses costumes croisés impeccables.

Né en 1943 dans la bourgade d’Edou, à plus de 400 km au nord de Brazzaville, il embrasse une carrière militaire au moment où le Congo obtient son indépendance de la France en 1960.

Entre 1961 et 1963, il suit une formation militaire à l’école des officiers de réserve de Cherchell, dans une Algérie encore française, puis à l’école d’application de l’infanterie à Saint-Maixent (ouest de la France).

Coup d’Etat
Jeune officier, il participe en 1968 au mouvement qui renverse le président Alphonse Massamba-Débat et porte au pouvoir le commandant Marien Ngouabi qui veut édifier une société « socialiste » sous les tropiques.

L’année suivante, il participe à la fondation du Parti congolais du travail (PCT), parti unique acquis au marxisme-léninisme.

Élément clef du système sécuritaire du régime, ministre de la Défense, il accède à la tête de l’État en 1979, deux ans après l’assassinat de Ngouabi.

Dans ce régime aligné sur le bloc soviétique, le colonel Sassou est dans les années 80 « président du comité central », « chef de la République », « chef du gouvernement ».

Au tournant des années 90, la chute du mur de Berlin et le président français François Mitterrand obligent l’Afrique à se convertir tant bien que mal au multipartisme.

Essai réussi au Congo: lors de la première présidentielle démocratique de 1992, Sassou Nguesso est battu par Pascal Lissouba. C’est la traversée du désert et l’exil en France, le pays qui l’a finalement toujours soutenu.

L’essai ne dure guère. Le Congo s’enfonce dans la violence et la guerre civile, sur fond d’enjeux pétroliers. Le président Lissouba ira jusqu’à accuser Elf (ex-Total) d’avoir soutenu le retour au pouvoir de M. Sassou Nguesso.

En 1997, à l’approche d’une nouvelle présidentielle, les miliciens « cobras » de Sassou Nguesso, appuyés par des militaires angolais, se livrent à un sanglant conflit avec les forces de M. Lissouba, faisant des milliers de morts.

M. Sassou transforme sa victoire militaire en triomphe électoral (près de 90% des suffrages) lors de la présidentielle de 2002, boycottée par les principaux dirigeants de l’opposition.

La même année est adoptée une Constitution consacrant un régime présidentiel fort.

En 2009, celui qui est devenu un partisan du « socialisme hybride » après l’adoption de la « doctrine sociale-démocrate » par son parti remporte la présidentielle avec plus de 78% des suffrages.

En 2015, Denis Sassou Nguesso change la constitution pour se maintenir au pouvoir encore au moins trois mandats. « Le président Sassou peut consulter son peuple, ça fait partie de son droit et le peuple doit répondre », lance le président français François Hollande, attisant la colère de nombreux Congolais.

En 2016, il est réélu dès le premier tour avec plus de 60% des voix.

L’ancien chef d’état-major, le général Jean-Marie Michel Mokoko, et l’ex-ministre André Okombi Salissa, tous deux candidats malheureux, ont contesté sa victoire. Ils purgent une peine de 20 ans de travaux forcés depuis 2018 pour « atteinte à la sécurité intérieure de l’État ».

Emprise familiale
Le chef de l’Etat n’a pas tenu sa promesse d’utiliser la rente pétrolière pour développer des grands projets d’infrastructures et de développement.

Ce programme a été plombé depuis 2014 par une grave crise socio-économique marquée par la baisse des cours de l’or noir.

La pauvreté reste largement répandue et les détracteurs du président dénoncent son train de vie somptuaire, la corruption qui gangrène la sphère publique, l’emprise de sa famille comme de son ethnie mbochi sur l’Etat, ainsi que la répression de toute dissidence.

Mais les contestations intérieures ou les critiques d’ONG internationales laissent de marbre celui que les médias officiels présentent à l’envi en « artisan de la démocratie » ou en « apôtre de la paix ».

Depuis la mort, en 2009, du président gabonais Omar Bongo, qui avait épousé sa fille, Denis Sassou Nguesso se plaît d’ailleurs à endosser à son tour le rôle du « patriarche » ou du « vieux sage » dans les crises qui secouent la région, et parfois au-delà en Afrique. Toujours au nom de « l’expérience »…

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