De quoi faire craindre un nouvel embrasement dans le pays. L’opposant sénégalais Ousmane Sonko a été inculpé ce samedi 29 juillet, après avoir été arrêté la veille à Dakar.
La liste des faits qui lui sont reprochés lue par le procureur comprend l’appel à l’insurrection, atteinte à la sûreté de l’Etat, association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste, complot contre l’autorité de l’Etat, actes visant à compromettre la sécurité publique et à créer des troubles politiques graves et vol.
«Cette arrestation n’a rien à voir avec la première procédure dans laquelle (Sonko) a été jugé par contumace», a déclaré le procureur Abdoul Karim Diop.
Ousmane Sonko a été interpellé par les forces de l’ordre vendredi 28 juillet dans l’après-midi à Dakar. Si on ignorait la cause de cette arrestation dans un premier temps, le parquet du procureur a affirmé dans un communiqué en soirée que «depuis un certain temps», des «actes, déclarations, écrits, images, et manœuvres» de la part de l’opposant étaient «constitutifs de faits pénalement répréhensibles».
Il a également affirmé qu’Ousmane Sonko avait «volé avec violence le téléphone portable d’une femme gendarme» et avait «aussitôt appelé le peuple, par un message subversif divulgué sur les réseaux sociaux, à se tenir prêt», raison pour laquelle il a décidé d’ouvrir une enquête pour «divers chefs de délits et crimes».
Avant son arrestation, dans l’après-midi, Ousmane Sonko avait déclaré sur les réseaux sociaux que les forces de sécurité présentes devant son domicile l’avaient filmé. Il a précisé avoir «personnellement arraché le téléphone et demandé à la personne de le déverrouiller et d’effacer les images qu’elle a prises», ce que cette dernière a refusé de faire. «Je demande au peuple de se tenir prêt pour faire face à ces abus sans fin», avait-il conclu son message.
«Dérives tyranniques»
Un de ses avocats, Cheikh Koureyssi Ba, a précisé sur Facebook que son client était «gardé à vue pour vol de téléphone et appel à l’insurrection» et que l’interrogatoire avait déjà commencé.
Le parti de l’opposant, Pastef-Les Patriotes, qui a estimé que son président avait été arrêté «brutalement», a demandé sa «libération immédiate» et appelé les Sénégalais «à résister constitutionnellement contre ces abus et dérives tyranniques».
Vendredi soir, plusieurs véhicules de police dont deux camions antiémeutes étaient garés devant le principal palais de justice de Dakar, ont vu des journalistes de l’AFP. Ils ont ensuite quitté les lieux, sans qu’on sache où ils sont allés.
Des personnes se sont rassemblées devant le domicile à Dakar d’Ousmane Sonko, a aussi constaté l’AFP. Les barrages policiers installés devant le domicile de l’opposant depuis le 28 mai pour des raisons «d’ordre public et de sécurité nationale» avaient été levés lundi.
Inéligible
Ousmane Sonko a été condamné le 1er juin à deux ans de prison ferme dans une affaire de mœurs, un verdict qui le rend inéligible à la présidentielle de 2024, selon ses avocats et des juristes, alors que le sortant Macky Sall a annoncé ne pas briguer de nouveau mandat. Sa condamnation a engendré début juin les troubles les plus graves depuis des années au Sénégal, qui ont fait 16 morts selon les autorités, une trentaine selon l’opposition.
Le porte-parole du gouvernement sénégalais, Abdou Karim Fofana, avait affirmé récemment que la décision d’arrêter ou non l’opposant revenait au procureur de la République. Le ministre de la Justice avait affirmé juste après sa condamnation qu’Ousmane Sonko pouvait être arrêté «à tout moment».
L’opposant, investi candidat à la prochaine présidentielle par son parti, a par ailleurs été le 8 mai condamné à six mois de prison avec sursis lors d’un procès en appel pour diffamation, une peine largement perçue comme le rendant inéligible pour l’élection. Mais il n’a pas encore épuisé ses recours devant la Cour suprême.
Laisser un commentaire