Où sont passés les 29 milliards de FCFA «objet» du scandale concernant la gestion du Programme des domaines agricoles communes (PRODAC) éventée par un supposé rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) ? Mystère et boule de gomme ! Après la condamnation pour diffamation du leader du Pastef, Ousmane Sonko, la justice, très attendue sur cette affaire, laisse toujours les Sénégalais sur leur faim.
Reconnu coupable du délit de diffamation dans le cadre du feuilleton judiciaire autour du présumé rapport de l’Inspection générale des finances (IGF), sur la gestion du Programme des domaines agricoles communautaires (PRODAC) l’opposant à l’actuel ministre du Tourisme, Mame Mbaye Niang, le leader du Pastef, Ousmane Sonko, est condamné en première instance par le Tribunal de grande instance hors classe de Dakar statuant en matière correctionnelle à une peine de deux mois avec sursis assortie de 200 millions de FCFA de dommages et intérêts.
Lors d’une conférence de presse, le maire de Ziguinchor avait accusé l’actuel ministre du Tourisme, Mame Mbaye Niang, alors ministre de la Jeunesse, de l’Emploi et de la Construction citoyenne, d’avoir été épinglé par un rapport de l’Inspection générale d’Etat (IGE) sur sa gestion du programme mis en place par le président Macky Sall pour favoriser l’emploi des jeunes en milieu rural qu’il avait sous sa tutelle.
Après le verdict rendu avant-hier, jeudi 30 mars, Mame Mbaye Niang s’est dit réjoui d’être «blanchi» par la justice sénégalaise. Cependant, même si ce feuilleton judiciaire, qui a pris en haleine tout un pays pendant des mois, a pris une nouvelle tournure, il n’en demeure pas moins que le débat reste entier. Et pour cause, plus de 29 milliards de FCFA concernant le PRODAC, objet d’un supposé «détournement» qui aurait poussé Mame Mbaye Niang, à l’époque, à démissionner de son poste de ministre, reste encore un mystère.
En effet, en 2018, après les révélations par la presse d’un présumé scandale sur ces fonds du PRODAC, impliquant Mame Mbaye Niang, l’Office national de lutte contre la fraude et la corruption (OFNAC) avait ouvert une enquête et des agents de ce programme avaient été entendus. Un supposé rapport de l’IGF avait décelé des manquements dans l’objet du contrat de 29.600.536.000 F CFA pour la mise en place de quatre (4) cœurs de Domaines agricoles communautaires (DAC) de 130 ha et non de DAC complets.
Lors du débat d’orientation budgétaire marquant la clôture de la session ordinaire unique de l’Assemblée nationale, en décembre 2018, l’actuel Premier ministre, Amadou Ba, à l’époque ministre de l’Economie et des Finances, avait confirmé l’existence du rapport, tout en précisant qu’il y a une fuite dans la presse. «Il y a eu une fuite sur le rapport provisoire, ça existe dans tous les états. C’est aussi vieux que le monde. Il est possible qu’il y ait des manquements au ministère des Finances, mais à la date d’aujourd’hui, les informations laissent penser que ce n’est pas au ministère des Finances», avait précisé Amadou Ba.
Dans son livre intitulé «Lettre au peuple : PRODAC, un festin de 36 milliards de francs CFAC», le coordonnateur du Forum civil, Birahim Seck, a révélé que l’Etat du Sénégal ne s’est pas engagé que sur 29 milliards de FCFA, mais plutôt sur 36 milliards de FCFA, suivant une programmation de remboursement. Le dossier implique l’ex-ministre de la Jeunesse, Mame Mbaye Niang, et les deux premiers coordonnateurs du PRODAC (Jean-Pierre Senghor et Mamina Daffé), cela à la suite d’un rapport de l’Inspection générale des Finances.
En effet, l’IGF avait même recommandé l’ouverture de deux informations judiciaires pour des faits de délinquance avérée et la traduction devant la Cour des comptes du coordonnateur d’alors du PRODAC, Mamina Daffé et de son prédécesseur, Jean Pierre Senghor. Aucune de ces recommandations n’a été encore effective. Invité d’une émission télévisée, l’actuel ministre des Sports, Yankhoba Diattara, à l’époque dans l’opposition, avait lui aussi accusé Mame Mbaye Niang d’avoir détourné plus de 27 milliards dans l’affaire PRODAC. Ce qui avait poussé ce dernier à démissionner de son poste de ministre, selon lui. M. Diattara s’était même permis de dire qu’il y a une «manipulation de la justice».
Aujourd’hui, au-delà de la condamnation d’Ousmane Sonko, l’exigence de transparence sur l’affaire PRODAC, notamment plus de 29 milliards de FCFA destinés à la réalisation des 4 cœurs de DAC, est plus que d’actualité. Surtout dans un pays pauvre très endetté (PPTE) avec plus de la moitié de la population vivant en dessous du seuil de la pauvreté.
Mariame DJIGO
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