Entendu hier, jeudi 22 mai, devant la Commission d’instruction de la Haute Cour de justice, Moustapha Diop, ancien ministre du Développement industriel et des Petites et Moyennes Industries a été placé sous mandat de dépôt pour présumé « détournement de deniers publics portant sur 930 millions de F Cfa ».
C’est le deuxième mandat de dépôt décerné par cette Commission d’instruction de la Haute Cour de justice dans l’affaire de la gestion du Fonds de riposte et de solidarité contre les effets de la Covid-19 (Fonds Force COVID).
L’ancien ministre du Développement industriel et des Petites et Moyennes Industries, Moustapha Diop, rejoint en prison son ex-collègue dans le gouvernement, Sophie Gladima, ancienne ministre des Mines.
Entendu hier, jeudi 22 mai, devant la Commission d’instruction de la Haute Cour de justice, dans l’affaire de la gestion de l’enveloppe du Fonds de riposte et de solidarité contre les effets de la Covid-19 mise à la disposition de son ministère, Moustapha Diop a finalement été placé sous mandat de dépôt et envoyé à la maison d’arrêt de Rebeuss.
Quatrième personnalité de l’ancien régime à être entendue devant cette Commission d’instruction de la Haute Cour de justice présidée par le Premier président de la Cour d’appel de Dakar, l’actuel député-maire de la commune de Louga est également le deuxième à tomber sous le coup d’un mandat de dépôt après Sophie Gladima.
S’exprimant devant la presse à l’issue de ce face-à-face avec les membres de la Commission d’instruction de la Haute Cour de justice, son avocat Me Baboucar Cissé a précisé que le député-maire de Louga est poursuivi pour « détournement de deniers publics portant sur 930 millions de f Cfa ».
« Cette une mesure qui ne m’a pas surpris. A notre arrivée dans le bureau du président de la Cour d’appel par ailleurs président de la Commission d’instruction de la Haute Cour de Justice, ce matin, les agents pénitenciers étaient déjà positionnés. Et nous avons compris que la messe était déjà dite », a expliqué la robe noire avant de préciser que son client « a formellement rejeté les accusations, déclarant qu’il ne gérait pas les 2,5 milliards et que tous les fournisseurs ont reconnu avoir livré les masques et qu’ils ont été payés ».
Pour rappel, dans le projet de sa mise en accusation devant la Haute Cour de justice présenté à la plénière de l’Assemblée nationale, le jeudi 8 mai dernier, la Commission des Lois, de la Décentralisation, du Travail et des Droits humains a détaillé les accusations retenues contre l’ancien ministre du Développement industriel et des Petites et Moyennes Industries.
Citant le rapport définitif de la Cour des Comptes sur la gestion du Fonds de riposte et de solidarité contre les effets de la Covid-19 (Fonds Forces COVID) et l’enquête menée par la Division des Investigations Criminelles suite à la publication de ce rapport, la Commission des Lois a indiqué que ces investigations avaient révélé des pratiques douteuses du ministre Moustapha Diop dans la gestion du montant de 2 500 000 000 FCFA reçu par son ministère pour l’acquisition de masques.
En effet, selon le rapport de la Commission des Lois, ce montant avait été initialement versé sur le compte de dépôt n° 422048 intitulé « Fonds d’appui à la promotion des Petites et Moyennes Entreprises » à la Trésorerie générale, puis transféré sur un compte ouvert à la Bank Of Africa (BOA) par le ministère en violation de l’article 11 alinéa 2 de l’arrêté n° 21136 du 21 novembre 2017 relatif aux conditions d’ouverture, de fonctionnement et de clôture des comptes de dépôt.
Mieux, ajoute encore le rapport de la Commission des lois, « le ministre Moustapha Diop avait aussi nommé un gestionnaire dudit compte, portant le même nom, comme seul ordonnateur des paiements et des décaissements ».
Poursuivant, le document renseigne que ce dernier aurait reconnu avoir retiré l’intégralité des fonds par divers chèques émis à l’ordre de Mouhamadou Bamba Amar pour le paiement en espèces des fournisseurs, en violation de l’article 104 du décret n° 2020-978 du 23 avril 2020 portant règlement général sur la comptabilité publique, qui exige un paiement par chèque ou virement.
Loin de s’en tenir-là, le rapport de la commission des lois renseigne que l’enquête a mis en lumière que Mouhamadou Bamba Amar, présenté comme aide-comptable au ministère, était en réalité un mécanicien recruté comme chauffeur. Et ce dernier, interrogé, a confirmé avoir effectué, sur instruction du ministre Moustapha Diop, plusieurs retraits de chèques à la BOA pour des montants variant entre 50 000 000 et 100 000 000 FCFA, jusqu’à atteindre la somme totale de 2 500 000 000 FCFA.
La commission des Lois souligne aussi que l’analyse des pièces justificatives relatives à la distribution des masques a révélé un écart considérable entre le nombre de masques déclarés achetés (6 250 000) et ceux réellement attribués aux structures bénéficiaires (3 922 500), soit une différence de 2 327 500 masques.
A cela s’ajoute encore, toujours d’après le rapport de la commission des Lois, des témoignages accablant l’ancien ministre de certains fournisseurs, dont celui de Dame Mariata Bassé qui a déclaré avoir obtenu de Moustapha Diop un marché de 50 000 masques d’une valeur de 20 000 000 FCFA et avoir été payée en espèces par le ministre lui-même. Idem pour Ibrahima Macodou Fall, Directeur général de la société COMASET qui a reconnu avoir exécuté une commande de 250 000 masques pour un montant de 100 000 000 FCFA, intégralement reçu en espèces des mains de Moustapha Diop.
Tous ces faits révélés, conclut le rapport de la commission des lois, « laissent apparaître des indices et présomptions graves et concordants d’association de malfaiteurs, de concussion, de corruption, de prise illégale d’intérêts, de faux et usage de faux en écritures privées de commerce ou de banque, de détournement de deniers publics, d’escroquerie portant sur des deniers publics, de blanchiment de capitaux et complicité de ces chefs, contre Moustapha Diop, ancien Ministre du Développement industriel et des Petites et Moyennes Industries ».
NANDO CABRAL GOMIS
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