PolitiqueSociété

Marché Sandaga: dispute autour d’un… bien vacant

Le président de la République peine-t-il à arbitrer le bras de fer entre Mme Soham Wardini, maire de la Ville, et Alioune Ndoye, édile de la commune d’arrondissement de Dakar-Plateau ? Après s’être « empoignés » sur le site, les deux édiles ont investi, hier, les médias pour prolonger leur bataille autour du marché Sandaga. Un patrimoine historique qui semble devenu un…bien vacant et sans maitre !

Construit en 1935 par la commune de Dakar, le marché Sandaga est-il devenu un bien vacant et sans maitre ? La réponse se trouve dans les deux conférences de presse croisées organisées hier par Soham Wardini, maire de la Ville de Dakar, et Alioune Ndoye, maire de l’arrondissement de Dakar-Plateau. Chacun des deux revendique la propriété du plus ancien et jadis plus grand marché de la capitale.

Pour rappel, le maire de la commune de Dakar-Plateau, Alioune Ndoye, avait déployé des Bulldozers sur le site de la controverse, à savoir le marché Sandaga, pour détruire les derniers murs encore debout et démarrer les travaux de reconstruction estimés à près de 7 milliards cfa.

Informée, Mme Soham El Wardini s’était aussitôt rendue sur les lieux pour stopper la manœuvre des Bulldozers. Aussi bien devant le préfet de Dakar qu’aux gendarmes de la Dscos, Mme Wardini avait juré que le marché Sandaga est une propriété foncière de la Ville de Dakar comme l’atteste l’état des droits réels datant de 1935. « Seul le président de la République, dont le Conseil de la mairie de Dakar sollicite l’arbitrage, peut me faire reculer. Sinon, personne d’autre ! » avait-elle fait savoir.

Ne s’en arrêtant pas là, la remplaçante du maire déchu, Khalifa Ababacar Sall, a convoqué hier le Conseil municipal en session extraordinaire et la presse comme témoin pour s’expliquer et se faire entendre.

Entourée de ses conseillers municipaux, Mme la maire a d’abord revisité l’histoire du marché Sandaga construit en 1935 par la commune de Dakar. « Depuis sa construction, le bâtiment n’a jamais sorti de la responsabilité et de la gestion de la Ville de Dakar. Même avec l’entrée en vigueur de l’Acte 3 de la décentralisation » a-t-elle précisé avec des documents à l’appui.

Suite à l’annonce par voie de presse de la démolition imminente du bâtiment classé de Sandaga faite par le ministre de l’Urbanisme, Mme Wardini, en sa qualité de maire, a déclaré avoir adressé une correspondance au président de la République en date du 30 juin 2020 pour l’informer du projet de réhabilitation de ce patrimoine classé et de l’aménagement de ses abords initié par la Ville de Dakar.

« En réponse, le directeur de cabinet du président de la République m’a adressé une correspondance en date du 17 juillet 2020 m’indiquant avoir pris acte de la situation avec une promesse d’audience avec le président de la République » a ajouté Mme Soham Wardini face à la presse hier. Elle est revenue sur ce fameux dimanche 08 août 2021 où elle a aperçu sur la terrasse du marché Sandaga des éléments supposés appartenir à la commune de Dakar-Plateau en train de démolir le bâtiment en commençant par l’acrotère qui est un élément remarquable de l’architecture. « Et dès le lundi, j’ai dépêché sur le site un huissier pour constater les dégâts causés sur le bâtiment » a-t-elle informé.

Une déclaration de guerre votée !
« Malheureusement, l’huissier s’est heurté au refus des agents de la maire de Dakar-Plateau de le laisser pénétrer à l’intérieur de l’édifice pour faire son travail. Face à cette situation, j’ai saisi le gouverneur de Dakar, le préfet, le sous-préfet de Dakar-Plateau et les services de la Dscos.

Toutes ces autorités ont reçu tour à tour des copies attestant que le bâtiment reste et demeure la propriété foncière de la Ville de Dakar » a expliqué Mme Soham El Wardini. Et de s’étrangler devant le manque de respect et de considération dont le maire de Dakar-Plateau a fait montre dans cette affaire.

« C’est un fait remarquable ! Car, à aucun moment, la Ville de Dakar, dépositaire du droit réel sur ce patrimoine historique classé, n’a été informée. Conformément au Code général des Collectivités territoriales, le Conseil municipal ici convoqué est saisi à l’effet d’autoriser le Maire que je suis à engager toutes actions utiles en vue de préserver le patrimoine de la Ville de Dakar » a déclaré Mme Soham Wardini avant de se féliciter de la délibération du Conseil municipal synonyme d’une déclaration de guerre signée et approuvée.

Une démolition audacieuse justifiée
Après avoir audacieusement actionné ses Bulldozers sur le bâtiment du marché Sandaga, le maire de la commune de Dakar- Plateau, Alioune Ndoye, s’est justifié, hier, lors d’un point de presse. Comme pour répondre à Mme Soham Wardini, il a dispensé une leçon d’histoire sur le marché Sandaga à propos duquel il a dit que c’est un bâtiment d’une architecture soudano-sahélienne construit en 1933 au cœur de la capitale.

« Donc Sandaga vieux de 90 ans est l’un des plus importants et ancien lieux de Dakar. L’urgence est de le reconstruire ! Et nous avons un projet de reconstruction à l’identique du marché et à la même place, car nous sommes conscients que c’est la carte de visite de Dakar, un marqueur de notre histoire mais aussi, et surtout, une extrême nécessité pour les habitants de la commune.

On y apportera de légères modifications portant sur la sécurité avec l’ajout d’infrastructures comme des monte-charges, des ascenseurs et un parking souterrain qui était inexistant avec l’ancien bâtiment’’, a expliqué Alioune Ndoye, maire de Dakar-Plateau et maitre du marché Sandaga. Selon lui, avant l’Acte 3 de la décentralisation, la gestion des équipements marchands comme Kermel, Sandaga etc. n’incombait pas à la commune de Dakar Plateau.

« Il a fallu l’entrée en vigueur de l’Acte 3 pour que toutes ces infrastructures communales tombent dans la gestion et la propriété de la Commune de Dakar-Plateau. Où était la Ville de Dakar quand je me battais pour la sauvegarde et l’hygiène du marché Sandaga ? La Ville de Dakar ne m’a jamais soutenu… » a-t-il reproché à l’institution dirigée par Mme Soham Wardini.

« J’ai un projet de réhabilitation alors que la Ville de Dakar n’en a pas ! La Ville voulait clairement délocaliser ce mythique marché de sa place actuelle pour y ériger un autre projet culturel. Juste pour amadouer les hommes de l’art, sans jamais leur dire la vérité » a attaqué le maire de Dakar-Plateau, histoire de se défouler sur la Ville de Dakar. La bataille des maires pour le contrôle du plus important marché de la capitale fait donc rage sous le regard du président de la République qui semble attiser les braises politiques…

Pape Ndiaye

Articles Similaires

1 sur 306

Laisser une réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *