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Mai 2022 …. Et le monde se réveille avec Marine Le Pen, Présidente de la République française !

– Pure fiction ? Ou inévitable issue d’un processus qui court depuis plusieurs années ?

L’élection présidentielle en France devrait avoir lieu, si la Covid-19 ne vient pas modifier le calendrier, dans environ un an.

Nous sommes donc à une période où les candidats naturels et potentiels se mettent en ordre de bataille et entament leur campagne électorale.

Emmanuel Macron, président sortant, est le premier des candidats naturels. Il a pour ambition de cumuler un deuxième mandant pour « parachever son œuvre ».

Marine Le Pen, malheureuse candidate en 2012 et 2017, est l’autre présidentiable attendue et déclarée.

Parmi les autres noms qui dominent la scène politique française arrive ensuite celui de Jean-Luc Mélenchon, leader de la France Insoumise, formation politique « de gauche radicale » voire « d’extrême-gauche » pour certains.

Tout comme Marine Le Pen, Mélenchon a aussi été candidat à la présidence en 2012 puis en 2017. C’est tout naturellement qu’il a annoncé dès novembre 2020 son intention de se présenter au scrutin de 2022.

Arrive ensuite toute une panoplie de potentiels candidats, à gauche comme à droite, sans que ne leur soit donnée, pour l’instant, une quelconque véritable chance de l’emporter.

Benoît Hamon, qui avait été le candidat du Parti Socialiste en 2017, a annoncé vouloir se mettre en retrait de la vie politique, et a apporté son soutien à Christiane Taubira pour le scrutin de 2022, alors que l’ancienne ministre et dirigeante du Parti Radical de Gauche n’a pas déclaré être candidate en 2022.

Anne Hidalgo, la Maire PS de Paris, semble être dans les starting-blocks, même si elle déclare vouloir attendre l’automne pour prendre et annoncer sa décision quant à une éventuelle candidature. Ce qui est sûr pour l’instant, c’est qu’elle n’est pas favorable à une primaire à gauche.

Chez les Écologistes (EELV), le député européen Yannick Jadot est pressenti. Mais ni Hidalgo, ni Jadot, ne sont cautionnés dans les sondages de plus de 10% des intentions de vote, pour le moment.

Face au risque de se retrouver avec « trop » de candidats, ce qui avait coûté « la vie politique » à Lionel Jospin, la gauche saura-t-elle surmonter ses divisions pour avancer un candidat commun ? Rien n’est moins sûr.

A droite, aucun candidat ne sort du lot. Quid d’une éventuelle candidature de Christian Jacob, président des Républicains ? Il a récemment déclaré « n’écarter aucune hypothèse sur les candidatures » pour 2022, même celle de rallier Xavier Bertrand, qui a pourtant quitté le parti. Xavier Bertrand a annoncé sa candidature tout récemment en mars.

Valérie Pécresse, ancienne ministre, issue de la même formation politique, et qui dirige la région Île de France, préfère tempérer et ne pas sauter les étapes. Elle ne devrait pas annoncer sa candidature avant les élections régionales.

La gauche reste divisée …
Le premier scénario probable, est celui de la division de la gauche, qui se conclut par une multitude de candidatures. Dans cette hypothèse, le risque est réel que les « favoris », Mélenchon et le candidat PS-EELV, soient fortement pénalisés avec la menace réelle de ne pas atteindre le 2ème tour de la Présidentielle.

Dans ce cas de figure, le duel Macron-Le Pen semble inévitable.

Le vote républicain …
A deux reprises dans le passé, les Français ont affiché le reflexe du « vote républicain », consistant à choisir le candidat de gauche ou de droite qui n’est pas le candidat de l’extrême-droite.

En 2002, Jospin est éliminé au 1er tour, Jacques Chirac et Le Pen père, Jean-Marie, se retrouvent au deuxième tour. Dans un élan républicain, les Français votent en masse en faveur de Chirac, mettant de côté leurs convictions personnelles, l’objectif étant de faire barrage au FN (Front National). Chirac obtient plus de 82% des suffrages !

En 2017, cette fois-ci c’est Emmanuel Macron qui doit affronter un membre de la famille Le Pen, la fille Marine.

Une nouvelle fois, le vote républicain s’exprime et Macron est élu avec plus de 66% des votes.

Toutefois, le réflexe républicain semble avoir été moins « naturel ».

Fin de l’illusion Macron …
En 2017, Emmanuel Macron n’était pas très connu du public, malgré sa participation au gouvernement Hollande. Il a profité de sa jeunesse, tant physique que politique, et de son habile discours rassembleur, mais aussi des divisions chez ses adversaires, pour sortir du lot et représenter un certain espoir aux yeux des Français.

Mais l’illusion Macron, mise à mal par les mauvais résultats économiques, la révolution des Gilets Jaunes, et la gestion hasardeuse de la crise sanitaire liée à la Covid-19, a vite laissé la place à un rejet profond du personnage chez une certaine partie de la population.

Sur la scène internationale, le président français irrite, et ses ambitions de début de mandat, où il se voyait notamment leader de l’Union européenne, se sont soldées par de cuisants échecs.

L’ancien président américain, Donald Trump, aurait même dit, selon John Bolton, son ancien conseiller qui a écrit un ouvrage sur son expérience à la Maison Blanche, intitulé « The room where it happened » : « Tout ce qu’il touche devient de la merde ».

Alimenter l’islamophobie tout en niant son existence …
En politique intérieure, Macron, en plus des difficultés susmentionnées, déçoit tout particulièrement sur sa politique envers les musulmans.

Fortement soutenu par les Français de confession musulmane lors du scrutin de 2017, le président français affichait un discours sensé, respectueux de la laïcité et de la liberté de croyance.

Mais très vite, le discours au sujet de la lutte contre le radicalisme et le terrorisme a laissé la place à un amalgame voulu et planifié autour des notions liées à l’islam et aux musulmans : islam radical, islamisme, islamistes, islam politique … tout est mélangé ! Et pour davantage empoisonner les esprits, d’autres notions sécuritaires, telles que le séparatisme, ont été greffées.

Une pression grandissante, injustifiée, bafouant les principes mêmes de la République, de la laïcité, voire des droits de l’homme, s’est institutionnalisée contre les musulmans et organisations dirigées par des musulmans qui ne rentrent pas dans le cadre voulu par le gouvernement. Fermeture de mosquées, d’associations, ciblage de personnalités, menaces sur les libertés individuelles, pressions pour imposer la « charte des imams » … toute une artillerie, accompagnée d’un discours politique de plus en plus décomplexé et ouvertement islamophobe, repris et décuplé par de grands médias, faisant naître un climat plus que dangereux pour la paix sociale en France. La multiplication des attaques islamophobes contre des mosquées et lieux de culte en sont le principal témoin.

La notion de laïcité n’est pas non plus épargnée : celle qui devait garantir une liberté de culte a été remplacée par une course arbitraire aux interdictions et restrictions des libertés, qui prennent principalement pour cibles les musulmans.

Un barrage à l’extrême-droite qui la sert plus qu’autre chose …
Pendant des décennies, la gauche et la droite françaises ont affirmé vouloir faire barrage aux idées de l’extrême-droite, et ont adopté, au fur et à mesure des années qui passent, le discours de ceux qu’ils voulaient combattre.

Cette tendance s’est accélérée sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Son successeur, François Hollande, pourtant du PS, n’aura pas su stopper le processus.

Mais qui aurait cru que le candidat Macron, qui s’était fait remarquer par son discours ouvert et empreint de liberté sur la laïcité notamment, gagnant ainsi la sympathie des populations issues de l’immigration, en particulier des musulmans, allait changer de visage pour devenir le président Macron qui aura alimenté l’islamophobie bien plus que ses prédécesseurs, au point de provoquer la jalousie du Rassemblement National de Marine Le Pen.

D’autant plus que les enquêtes d’opinion reflètent un réel atténuement de la perception que le RN est une menace pour la démocratie. De plus en plus de Français classent le parti de Le Pen parmi les partis « fréquentables », « normaux ».

Le vote républicain ? Pas cette fois-ci …
Les échecs répétés des « partis conventionnels » de gauche et de droite, l’importante émergence d’une figure au sein de ces partis qui pourraient faire renaître l’espoir, comme l’avait été Macron en 2017, et la « normalisation » du RN, laissent craindre un inévitable duel Macron-Le Pen au deuxième tour en 2022.

Plus que la crainte d’un tel duel, c’est celui de voir le réflexe du « vote républicain » ne pas s’enclencher, tant le chemin que prend la vie sociale et politique de la France ces dernières années semble tout droit mener vers une victoire de Marine Le Pen.

CHOC : le monde se réveille en découvrant Marine Le Pen Présidente de la République …
Au lendemain du 2ème tour de la présidentielle 2022, après une longue nuit de dépouillement pendant laquelle tantôt Macron passe devant, tantôt Le Pen reprend l’avantage, c’est à l’aube que le couperet tombe : Marine est victorieuse !

L’UE aura-t-elle la même posture que contre Jörg Haider en Autriche ?
En 1999, le parti d’extrême-droite autrichienne FPÖ de Jörg Haider arrive 2ème aux législatives et entre dans une coalition gouvernementale. Stupeur dans l’UE, alors constituée de 15 membres dont l’Autriche. Les 14 autres pays font pression sur Vienne pour empêcher l’accès au pouvoir du FPÖ, en vain.

L’UE imposera alors des sanctions à l’Autriche : Les quatorze partenaires de l’Autriche se sont mis d’accord pour s’interdire tout contact bilatéral, pendant une période d’observation, avec les dirigeants autrichiens, qui pouvaient continuer néanmoins à siéger à la table du conseil des ministres européens. Ces sanctions ont ouvert une crise durable avec la France, accusée d’avoir été la force motrice de ces sanctions.

Les relations entre l’UE et l’Autriche se sont normalisées dès l’été après la publication du rapport d’un groupe de sage.

Mais, l’UE de 2022 est très différente de celle de 2002 qui était dominée par des gouvernements sociaux-démocrates.

D’abord elle est composée de 27 pays, ensuite, certains gouvernements sont accusés de dérives autoritaires ou proches de l’extrême-droite (en Pologne et en Hongrie par exemple), sans que de réelles sanctions ne leur soient imposées.

L’Autriche en 2000 était un membre au poids relatif au sein de l’UE, alors que la France est considérée comme un des patrons aux côtés de l’Allemagne.

Comment cette UE, qui ferme les yeux sur les dérives racistes et islamophobes dans de nombreux pays membres, en particulier en France, pourrait-elle imaginer imposer des sanctions à la France ?

Cette Europe qui fait tout pour empêcher l’arrivée de demandeurs d’asile et de réfugiés sur son sol, qui est complice de la Grèce, à travers son agence FRONTEX, dans son comportement inhumain envers les migrants.

Il est fort aisé de comprendre qu’une telle chose n’arrivera pas et ne dépassera nullement quelques déclarations d’usage.

Ainsi donc, tant par le processus qui dirige la France vers les élections de 2022, tant par la conjoncture européenne et internationale, que par le climat social, politique et économique qui règne en France, une éventuelle victoire de Marine Le Pen semble ne pas être qu’une fiction.

Y sommes-nous prêts ? Les Français sont-ils conscients de ce qui les attend ? La France et le Monde y sont-ils préparés ? Le danger semble largement minimisé, voire ignoré. L’avenir proche nous le dira.

Fatma Bendhaou

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