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Les nombreux défis des députés de la diaspora – Par Mangue Sène

Le 31 juillet dernier, les Sénégalais ont été appelés à renouveler l’Assemblée nationale en élisant 165 nouveaux députés, dont les 15 seront issus de la diaspora.

À l’issue d’un scrutin très serré, l’opposition avec l’inter-coalition Yewwi Askan Wi/Wallu, a eu presque autant de députés que la majorité dirigée par la coalition BBY. Ces résultats ont créé une situation inédite à l’Assemblée nationale où le rapport de force a radicalement changé.

À travers huit circonscriptions électorales, quatre en Afrique, deux en Europe, une en Asie-Moyen-Orient et une autre en Amérique, les Sénégalais de l’extérieur ont élu les quinze députés de la diaspora qui vont les représenter à l’hémicycle.

Cette 14e législature sera la deuxième qui verra siéger au Parlement des députés de la diaspora. Un choix qui s’explique par le poids économique, démographique et électoral des Sénégalais de l’extérieur, mais également par l’attachement de ces derniers à leur pays d’origine.

Selon les données du Fonds monétaire international (FMI), en 2019, les transferts de fonds des émigrés sénégalais vers le pays d’origine s’élevaient à 2,5 milliards de dollars, ce qui représente environ 12% du PIB.

Ce chiffre, toujours selon le FMI, dépasse même le montant de l’aide publique au développement et les flux des investissements directs étrangers au Sénégal qui sont respectivement de 1,4 milliard et 1 milliard de dollars. En valeur relative ce sont 30% de familles sénégalaises qui reçoivent des transferts de fonds depuis l’étranger.

Le poids électoral de la diaspora n’est pas moins important. Avec le code électoral consensuel de 1992, les Sénégalais de la diaspora ont acquis, pour la première fois, le droit de vote.

Depuis la présidentielle de 1993, le corps électoral de la diaspora ne cesse d’augmenter faisant des « Modou-Modou » une frange importante de l’électorat.

Selon la revue « Afrique Contemporaine » d’avril 2015, « en 2012, la diaspora avec ses 200.000 inscrits environ est le 7e département sur 45, et si on raisonne en termes de région, elle est la 8e région sur 15 régions ».

Ces statistiques, on peut en convenir, auront considérablement augmenté au cours de ces dernières années. En plus de constituer un vivier électoral non négligeable, la diaspora compte parmi elle de « grands électeurs ».

Chaque membre de la diaspora en votant, peut également faire voter plusieurs autres personnes restées au Sénégal, simplement en leur donnant des consignes de vote.

Ayant le statut de 15e région administrative, la diaspora peut être considérée comme étant la première région économique du Sénégal.

Au-delà de cette importance économique et électorale, la diaspora sénégalaise dispose de ressources humaines de qualité. Dans tous les domaines d’activités et filières académiques, la diaspora regorge de brillantes figures.

À la lumière de l’importance et du rôle des émigrés autant dans le pays d’accueil que celui d’origine, ces derniers méritent d’être dignement représentés par des parlementaires chargés de défendre leurs intérêts et ceux de leurs familles.

Pour les députés de la diaspora, les défis à relever et les obligations envers leur communauté sont innombrables. Les problèmes que rencontrent les Sénégalais vivant hors de leur pays sont divers et aigus.

Des démarches administratives pour l’obtention ou le renouvellement de papiers, en passant par la recherche de travail et de logement aux problèmes judiciaires, les pensions de retraite ou le rapatriement des corps, les difficultés sur le chemin du « Modou-Modou » sont nombreuses et inextricables. D’où l’importance pour la diaspora d’avoir des députés qui ont conscience de leur rôle, avec les compétences et le profil de l’emploi.

Pour mieux accomplir leur mission de représentants des immigrés, les députés de la diaspora gagneraient à plus collaborer avec les consulats, ambassades, dahiras et autres associations qui sont autant de lieux d’agrégation de nos compatriotes.

Il serait également opportun de mettre sur pied des mécanismes et moyens d’information en direction des immigrés pour un meilleur rapport avec les institutions du pays d’accueil, mais également du pays d’origine.

Enfin, les députés de la diaspora pourraient inciter les associations et dahiras à participer à l’élaboration de politiques migratoires et de co-développement pour l’intérêt exclusif des immigrés.

Un mémorandum, à l’initiative de la Coordination Pastef/Italie, a été remis au président Ousmane Sonko en novembre 2018, lors de son étape en Italie pendant sa tournée internationale de précampagne. Ce document, auquel nous avons contribué à la rédaction, est un exposé des difficultés que rencontrent nos compatriotes vivant en Italie.

Nous y avons exposé les maux que vivent les Sénégalais de la diaspora, mais nous avons surtout cherché à y apporter quelques réponses pratiques à travers des suggestions et propositions concrètes.

La défunte 13e législature a été, de l’avis général, l’une des pires législatures depuis l’indépendance. Elle a été marquée par une série de scandales aussi ahurissants qu’impudents ; des députés à la limite de l’incompétence, n’ayant pas conscience, pour beaucoup d’entre eux, du véritable rôle du représentant du peuple.

Pour les quinze députés de la diaspora, le bilan est assez mitigé. À leur décharge, c’était leur baptême du feu avec la « première génération » des députés de la diaspora. Ils n’avaient donc ni l’expérience, ni les moyens indispensables pour bien accomplir leur mission d’ « avocats » des Sénégalais de l’extérieur.

Les attentes des Sénégalais de la diaspora sont aussi fortes que les difficultés qu’ils vivent sont accablantes. Les chantiers auxquels seront confrontés nos futurs représentants à l’hémicycle sont nombreux et variés. Le député, rappelons-le, a essentiellement trois fonctions : le vote des lois, le vote du budget et le contrôle de l’action du gouvernement.

Après sa profession de foi, on attend du député de la diaspora qu’il se mette exclusivement au service des Sénégalais de l’extérieur, par une réelle prise en charge des nombreux et lancinants problèmes qu’ils vivent.

Pour le député de la diaspora, l’Assemblée nationale est le cadre idéal pour exposer et discuter des thématiques relatives aux maux des « Modou-Modou ».

L’opportunité leur est offerte de défendre les intérêts des Sénégalais de la diaspora par une présence accrue à l’hémicycle à travers des questions écrites et orales et des propositions de lois novatrices.

Mangue SÈNE

Jean Louis Verdier - Rédacteur en Chef Digital - Paris- Dubaï - Hong Kong dakarecho@gmail.com - Tél (+00) 33 6 17 86 36 34 + 852 6586 2047

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