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Les craintes d’une résistance du paludisme aux traitements se renforcent

Une étude apporte pour la première fois la preuve clinique que les mutations du parasite responsable de la maladie s’accompagnent d’une persistance après trois jours de traitement.

Les craintes que le paludisme devienne résistant aux traitements en Afrique se trouvent renforcées par la première «preuve clinique» de l’impact des mutations du parasite responsable de la maladie, apportée jeudi 14 avril par des chercheurs.

Leur étude, réalisée auprès d’enfants du Rwanda, constate pour la première fois que ces mutations s’accompagnent d’une persistance du parasite après trois jours de traitement (appelée «élimination parasitaire retardée»), comme cela avait été démontré pour la première fois en Asie du Sud-Est lorsque la résistance au principal médicament, l’artémisinine, a commencé à émerger.

L’efficacité des médicaments reste élevée jusqu’à présent, mais une surveillance accrue au Rwanda et dans les pays voisins s’impose, avertit l’étude, publiée dans The Lancet Infectious Diseases. Le paludisme a fait plus de 400.000 morts dans le monde en 2019, dont deux tiers d’enfants de moins de cinq ans.

L’écrasante majorité des cas (94% des 229 millions dans le monde) et des décès surviennent en Afrique, selon l’OMS. Les traitements à base d’artémisinine, combinée à un autre antipaludéen (CTA/ACT), introduits au début des années 2000, sont actuellement les plus efficaces et les plus utilisés contre le paludisme, dû à un parasite (Plasmodium falciparum) transmis par les moustiques.

Signal d’avertissement
Cette résistance aux médicaments est associée à des parasites porteurs de mutations d’un gène (pfk13). Certaines mutations avaient déjà été décelées au Rwanda, mais à une plus faible fréquence que dans la nouvelle étude, et sans persistance démontrée du parasite chez les enfants traités par artémisinine.

La résistance à l’artémisinine a été identifiée pour la première fois au Cambodge en 2008. Dans la région du Mékong, une fois la résistance à l’artémisinine répandue, la résistance au médicament qui lui est associé a souvent suivi, entraînant l’échec du traitement combiné (CTA).

«L’émergence d’une résistance partielle à l’artémisinine en Afrique est un signal d’avertissement indiquant que l’efficacité des CTA pourrait être compromise si une résistance au médicament qui lui est associé émerge», notent les chercheurs.

L’étude a porté sur 224 enfants de six mois à cinq ans infestés par le parasite, dans trois villes du Rwanda: ils ont été traités pendant trois jours par l’association thérapeutique la plus courante (artéméther-luméfantrine) puis surveillés durant un mois avec des prélèvements sanguins hebdomadaires.

Parmi les participants, environ 15% dans deux sites étudiés avaient encore des parasites détectables trois jours après le traitement.

«Des données récentes suggèrent que nous sommes au bord d’une résistance à l’artémisinine cliniquement significative en Afrique, comme cela s’est produit en Asie du Sud-Est il y a plus de dix ans», s’alarme dans le journal le professeur Philip Rosenthal (Université de Californie, San Francisco), qui n’a pas participé à l’étude.

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