Le Sénégal va organiser le 25 février 2024 sa 13e élection présidentielle. Un scrutin qui, pour une première fois dans l’histoire politique du Sénégal, ne verra pas le président sortant candidat à sa succession.
Cependant, la montée de la tension alimentée par l’emprisonnement d’Ousmane Sonko suivie de la dissolution de son parti, Pastef, la purge de ses partisans et la crise de candidature au sein de la majorité comme l’intervention militaire projetée de la Cedeao au Niger, font planer un nuage d’incertitudes sur ce rendez-vous.
Le Sénégal est-il en train de marcher tout droit vers le premier report de son élection présidentielle, 63 ans après son indépendance ? En effet, à six mois environ du dimanche 25 février, date retenue pour la tenue de cette 13e élection présidentielle à laquelle, pour une première fois de l’histoire politique du Sénégal, le président sortant ne sera pas candidat à sa succession, la situation politique ne cesse de se dégrader.
La radiation des listes électorales annoncée du maire de Ziguinchor, Ousmane Sonko, et l’intensification par le régime en place de la campagne d’emprisonnement de ses partisans comme la dissolution de son parti, Pastef/Les patriotes ne cessent de faire monter la tension faisant craindre le pire.
Cette inquiétude est d’autant plus grande que l’état de santé du leader de l’ex-Pastef qui a entamé depuis le 30 juillet dernier une grève de la faim pour dénoncer son incarcération est jugé « préoccupant » par ses avocats et ses partisans qui ont annoncé le jeudi 17 aout dernier son admission au service de réanimation du pavillon spécial de l’hôpital principal de Dakar à la suite d’un malaise.
Nonobstant le maire de Ziguinchor, une dizaine des 1063 détenus arrêtés dans le cadre de cette traque initiée par le régime en place se trouve également en soins intensifs au service de réanimation de l’hôpital principal de Dakar et du pavillon spécial de l’hôpital Aristide Le Dantec mais aussi dans les urgences de la prison de Rebeuss.
Outre le risque que fait peser l’état de santé jugé préoccupant de ses détenus grévistes de la faim sur le climat social, en relation avec l’organisation de la prochaine élection présidentielle du 25 février 2024, il y a aussi la situation d’impasse dans lequel se trouve actuellement le processus électoral. En effet, aussi bien du côté de l’opposition que celui du pouvoir en place, c’est l’incertitude totale autour des candidatures à cette élection.
Aujourd’hui, mises à part les déclarations de candidations et autres cérémonies d’investitures organisées ça et là, personne ne peut dire avec certitude lequel des prétendants sera sur la ligne de départ, le 25 février prochain.
Pas même les responsables du Parti démocratique sénégalais (Pds) et la plateforme Taxawu Dakar qui ont parvenu à obtenir, grâce à leur participation au dernier dialogue politique, la levée de l’inéligibilité qui pesait sur la tête de leurs candidats respectifs, Karim Meïssa Wade et Khalifa Ababacar Sall du fait de non-paiement des amendes à coup de milliards de Francs Cfa que le tribunal avait retenues contre eux.
Pour les autres candidats déclarés de l’opposition, ils devront passer d’abord l’épreuve du parrainage qui a fait beaucoup de ravage lors de la dernière présidentielle de 2019. A cela, il faut s’ajouter également la crise de candidature qui secoue actuellement la majorité en place.
En effet, alors qu’il a reçu depuis le 4 juillet dernier carte blanche de ses camarades de parti au sein de l’Alliance pour la République (Apr) mais aussi de ses alliés de Benno Bokk Yakaar (Bby) pour choisir son successeur à la suite de sa décision de s’en tenir aux deux mandats fixés par la Constitution contre la volonté de certains de ses partisans, Macky Sall semble être dos au mur. La preuve, plus d’un mois après l’annonce de sa non-candidature, le Président Sall peine toujours à designer son successeur alors que tous candidats déclarés sont issus de son propre parti, l’Apr.
Il s’agit entre autres, de son actuel Premier ministre, Amadou Ba, son ancien Directeur de cabinet, Abdoulaye Daouda Diallo, Mahammed Boun Abdallah Dionne, ex Premier ministre, l’actuel ministre de l’Agriculture, Aly Ngouille Ndiaye et Abdoulaye Diouf Sarr, candidat malheureux à la ville de Dakar lors des dernières locales de janvier 2022.
A ceux-là, il faut également citer les candidatures du maire de Sandiara, Serigne Guèye Diop et son collègue de Kolda, Mame Boye Diao. Même si juridiquement, cette crise de la candidature au sein de la coalition au pouvoir n’a rien à voir avec le fonctionnement de l’Etat, sa persistance n’augure pas non plus quelque chose de bon.
Surtout quand, on sait que l’ambition des responsables du régime en place est de se maintenir au pouvoir jusqu’à l’horizon 2035. Et pour ne rien arranger, voilà que le régime en place semble se préparer à ouvrir un autre front avec cette intervention militaire projetée dans le cadre de la CEDEAO au Niger pour déloger les militaires qui ont renversé le gouvernement démocratiquement élu du président Mohamed Bazoum.
Aujourd’hui, même si le fait d’envoyer des forces militaires pour soutenir d’autres forces de la coalition sous-régionale pour pouvoir rétablir l’ordre constitutionnel au Niger n’enlève en rien la continuité de l’État, le risque est de voir tous ces événements s’ajouter à la tension politique actuelle pour offrir un prétexte au chef de l’Etat pour reporter de quelques mois la date de ce scrutin.
Nando Cabral GOMIS
Laisser un commentaire