Le jour de son investiture, le nouveau président américain avait déclaré vouloir mettre fin au droit d’asile ainsi qu’au droit du sol. Il a déclaré jeudi faire appel de cette suspension.
Un juge américain a suspendu temporairement jeudi la remise en cause du droit du sol ordonnée par le nouveau président Donald Trump, mesure emblématique de son offensive anti-immigration. «Il s’agit d’un ordre manifestement inconstitutionnel», a estimé le magistrat fédéral John Coughenour, cité par des médias locaux lors d’une audience à Seattle.
Joint par téléphone, un greffier du tribunal a confirmé la suspension à l’AFP. Dans la foulée de son investiture lundi, Donald Trump a signé un décret revenant sur le droit du sol, un principe fondateur consacré par le 14ᵉ amendement de la constitution américaine et appliqué depuis plus de 150 ans aux États-Unis. Cette mesure a immédiatement été contestée en justice par 22 États américains, dont la Californie et New York, qui pointaient son inconstitutionnalité.
«Franchement, j’ai du mal à comprendre comment un membre du barreau peut affirmer sans équivoque qu’il s’agit d’un ordre constitutionnel», a ajouté le juge Coughenour, en suspendant le décret. «Cela me laisse perplexe.»
Le décret devait interdire au gouvernement fédéral de délivrer des passeports, des certificats de citoyenneté ou d’autres documents aux enfants dont la mère séjourne illégalement ou temporairement aux États-Unis, et dont le père n’est pas citoyen américain ou résident permanent, titulaire de la fameuse carte verte. Selon de nombreux juristes, ce décret présidentiel risque de déclencher une bataille judiciaire susceptible de remonter jusqu’à la Cour suprême.
Donald Trump a déclaré que son administration ferait appel de cette décision de suspendre son décret présidentiel. « Évidemment, nous ferons appel», a déclaré le président américain à la presse depuis le Bureau ovale de la Maison-Blanche sur cette suspension face à un décret que le juge a qualifié de «manifestement inconstitutionnel».
En le signant, Donald Trump avait lui-même reconnu s’attendre à des contestations devant les tribunaux. «Je pense que nous avons de bonnes justifications, mais vous pourriez avoir raison», avait-il reconnu, face à un journaliste qui l’interrogeait sur d’éventuelles procédures.
Le président avait également jugé que le droit du sol est un principe «ridicule», et avait faussement affirmé que les États-Unis seraient «les seuls» à l’appliquer. En réalité, des dizaines de pays reconnaissent le droit du sol, dont le Canada, le Mexique et la France.
Les États dénoncent une «action illégale»
La procédure jugée jeudi à Seattle était portée par les procureurs généraux de quatre États : celui de Washington, l’Arizona, l’Oregon et l’Illinois. Ils soulignaient que ce décret pourrait priver de droit 150.000 nouveau-nés chaque année aux États-Unis, et risquaient de rendre certains d’entre eux apatrides. «Il faut espérer que ce décret anticonstitutionnel et antiaméricain n’entrera jamais en vigueur», a estimé le procureur général de l’État de Washington, Nick Brown, dans un communiqué saluant la suspension.
«La citoyenneté ne peut pas être conditionnée par la race, l’appartenance ethnique ou l’origine des parents», a ajouté le démocrate. «C’est la loi de notre nation, reconnue par des générations de juristes, de législateurs et de présidents, jusqu’à l’action illégale du président Trump.»
La procureure générale d’Arizona, Kris Mayes, a de son côté salué «une victoire pour l’État de droit» «Aucun président ne peut modifier la Constitution sur un coup de tête et la décision d’aujourd’hui l’affirme», a ajouté cette élue démocrate, dans un communiqué.
Selon elle, cette décision «est la première de nombreuses victoires à venir (…) contre les cas d’excès de pouvoir de l’exécutif». Outre la remise en cause du droit du sol, Donald Trump a signé d’autres décrets lundi pour lancer une vaste offensive anti-immigration, qu’il a érigée en priorité absolue de son retour au pouvoir.
Il a notamment déclaré l’état d’urgence à la frontière entre les États-Unis et le Mexique, et y a envoyé l’armée pour en assurer la surveillance. Il compte également s’attaquer au droit d’asile.
«L’administration va vraiment essayer de repousser les limites» et voir si ses mesures «survivent aux tribunaux», avait expliqué lundi à l’AFP Cris Ramon, de l’ONG UnidosUS, en rappelant que le rôle de l’armée est lui aussi circonscrit par la loi. Le premier mandat du président républicain avait déjà été marqué par de nombreuses passes d’armes judiciaires sur l’immigration avec plusieurs États dirigés par des démocrates et les associations de défense des migrants.
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