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Le deuxième second mandat de Ndoumbélaan – Par Nioxoor Issa Tine

L’Empereur déchu avait dit ne pas vouloir marcher sur des cadavres pour accéder au pouvoir. Malgré des morts jamais élucidés, on peut dire à tort ou à raison qu’il a été fidèle à son serment.

Mais son entêtement insensé à s’accrocher au pouvoir, l’emmènera à marcher sur quinze (15) Goorgorlu au moins avant sa sortie. Contre toute attente, il sera expulsé de l’arène par un Gladiateur couvé et protégé dans ses écuries dix (10) ans durant, et qu’il avait toujours considéré comme un instrument pour amuser la galerie de sa cour en attendant l’arrivée du prince.

Malgré ses origines modestes (ni assumées ni revendiquées), notre Gladiateur National n’a jamais rêvé du glaive libérateur de Spartacus. Il a même dû faire recours à une chirurgie littéraire pour se transfuser du sang des oppresseurs de sa classe et se réclamer sans sourciller de Néron et de César.

Ceux qui le combattent ne le connaissent pas. Ceux qui l’accompagnent au quotidien (par intérêt ou par naïveté), ignorent l’essence de l’homme, ou plutôt la logique du monstre froid auquel ils ont affaire. Il méprise plus qu’il ne hait ses frères de classe.

Il se moque de l’avis de « ses conseillers locaux » choisis pour leurs compétences courtisanes, règne plus qu’il ne gouverne, assis sur les certitudes de l’expertise des descendants de colons instruits par des siècles de domination de Ndoumbélaan.

Disons plus simplement, leurs capacités à broyer du nègre. Le Gladiateur est assurément un négrier des temps modernes, capable de tendre des pièges faits d’infrastructures empruntées à coups de milliards surfacturés, pour épater ses concitoyens et les livrer à ses maitres. Et ça marche !

Parce que les héritiers de l’empire ne manquent pas de recettes pour poursuivre leur mission de prédation en s’appuyant sur le dernier collabo de l’histoire.

Si le gladiateur a souvent réussi ses coups contre ses opposants, ce n’est pas pour son génie, mais plutôt parce que ces derniers, ne le croyaient pas capable d’aussi ignobles perfidies. Il a entrainé sur son sillage d’honnêtes Goorgorlu qui l’ont suivi à l’entame dans son duel masqué contre ceux qui avaient été identifiés dans un passé récent, comme des prédateurs de nos ressources.

Ils étaient lors convaincus que le gladiateur chantre autoproclamé de la gouvernance « sobre et vertueuse », dirigeait une « révolution populaire », ou du moins la révolte des Goorgorlus, contre les repus qui toisaient le peuple. C’est pourquoi, ils ont fermé les yeux, quand le « Prince arrogant » a été embastillé en marge de la loi ou sur la base de celle qui a été concoctée à cet effet. « Niaw » ! Ils ont ensuite contenu leur malaise quand un autre prétendant au trône fut lapidé pour « faute de gestion », alors que le frérot hors-la-loi (dont le physique revoie à un champion de lutte), se noyait dans les mares des hydrocarbures encore à l’état de projets.

La gauche s’est tue, les démocrates aussi à l’exception de quelques voix notables dont l’histoire retiendra les noms, comme elle s’est tue un siècle auparavant, lors des premières dérives de Staline, se disant certainement que le Gladiateur ne pouvait se permettre d’aller plus loin.

Non seulement il le fit, mais déclara à haute et intelligible voix, son désir de réduire à « sa plus simple expression » toute voix discordante.

A la fois prédateur et charognard, le Gladiateur doit son ascension à sa capacité à se fondre dans le mutisme, aux moments des faiblesses, à ne jamais dévoiler ni laisser paraitre ses intentions. Il sait avaler des couleuvres selon les circonstances, baisser son train arrière comme Bouki, mais aussi fondre sur toute proie à sa portée ou qui montrerait des signes de faiblesses. Il n’a pas d’amis mais des complices, pas d’adversaires mais seulement des ennemis à abattre dès que l’occasion se présente.

L’Indomptable surgi à ses flancs, a eu la chance de n’avoir pas été pris au sérieux parmi la masse de concurrents potentiels où seul l’ancien « spermatozoide…futur buru ak soow », faisait encore figure d’épouvantail. Instruit aux méthodes peu chevaleresques du Gladiateur, il a très tôt compris que la seule règle dans un combat contre le Gladiateur, était l’absence de règles. Exempt de tout reproche en matière de gestion, injustement mis à l’écart de l’administration pour ses opinions politiques, il s’est forgé une cuirasse populaire derrière laquelle il a réussi jusqu’ici à rendre coup pour coup toutes les attaques.

L’histoire vraie ou fausse de « fesses illicites » que le pouvoir lui colle, et qui ressemble à s’y méprendre à celle de la supposée « collaboration » de Georges Marchais avec les occupants nazis, naguère brandie par la droite française, ne semble pas atteindre sa crédibilité surtout au niveau de la jeunesse.

Légalement et moralement, le Gladiateur est sensé passer le témoin à un successeur choisi par le peuple. S’il s’entête à vouloir faire le vide à quelques mois des échéances électorales, et plus particulièrement à éliminer son plus dangereux adversaire du moment, ce n’est sûrement pas pour les beaux yeux d’un éventuel dauphin.

Qu’il parvienne à ses fins ou non, force est de croire qu’il arpentera l’avenue des martyrs inaugurée par l’empereur en marchant sur des cadavres, pour gagner le droit à la candidature à un second deuxième mandat, peut être aussi, un deuxième second mandat (L.S.Senghor nous édifierait sur l’appellation exacte).

Que diront donc ceux qui pensent que « l’histoire ne se répète qu’en tragédie », alors que toute l’histoire du Gladiateur n’est elle-même que tragédie ? En tout cas son entêtement à suivre les traces de l’Empereur déchu, enfantera d’une tragédie de plus.

LES NOUVELLES CHRONIQUES DE BANDIA, Janvier 2023

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