Le ralentissement de la croissance économique du Sénégal, le creusement de son déficit budgétaire et un retard potentiel dans le financement du Fonds monétaire international pourraient assombrir les perspectives à l’approche des élections législatives du 17 novembre, selon les analystes.

Le président Bassirou Diomaye Faye, en poste depuis seulement cinq mois, a préparé le terrain pour le vote éclair en dissolvant jeudi l’Assemblée nationale dirigée par l’opposition.

La planification des élections va désormais encombrer le calendrier, au moment même où le pays d’Afrique de l’Ouest se prépare à la prochaine révision du prêt du FMI de 1,9 milliard de dollars qu’il a obtenu l’année dernière pour tenter de stabiliser ses finances publiques.

« Il est peu probable que la prochaine revue du Sénégal soit approuvée par le conseil d’administration du FMI avant décembre », a déclaré Michael Kafe, analyste chez Barclays, dans une note aux clients.

Tout retard dans le versement de la prochaine tranche de financement coïnciderait avec d’autres développements économiques peu encourageants.

Les prévisions de croissance pour cette année ont été réduites à 6,0 %, a déclaré le FMI vendredi, alors qu’elles étaient de 7,1 % en juin, après que l’économie a progressé à un rythme plus lent que prévu au cours du premier semestre.

« Ce ralentissement reflète une activité plus faible dans les secteurs de l’exploitation minière, de la construction et de l’agro-industrie », a déclaré le Fonds.

Les analystes suivent de près l’évolution de la situation politique et financière à l’approche du vote.

Les disparités économiques étaient à l’origine d’au moins une partie des griefs qui ont poussé les gens à descendre dans la rue lors des violentes manifestations de 2021 – bien qu’il n’y ait eu aucune indication de troubles répétés cette fois-ci.

ESPOIRS POUR LE PÉTROLE ET LE GAZ
Le FMI ajoute que les recettes de l’État ont diminué de manière significative au cours des huit premiers mois de l’année, alors que les dépenses sont restées stables.

« En conséquence, le déficit budgétaire s’est creusé et, face à des réserves de liquidités plus faibles que prévu, les autorités ont eu recours à des emprunts commerciaux extérieurs coûteux et de courte durée.

Les obligations en dollars du Sénégal ont légèrement baissé vendredi après la dissolution du parlement. Les rendements des échéances 2033 et 2048 sont restés stables mardi, s’échangeant respectivement à 85,33 cents pour un dollar et 73,24.

M. Faye, ancien inspecteur des impôts, a expliqué sa décision de dissoudre le parlement par le refus de l’ancien parlement d’initier une nouvelle loi budgétaire et par son rejet d’un plan visant à supprimer les organismes d’État qui gaspillent de l’argent.

Il a remporté l’élection présidentielle en mars avec 54 % des voix, grâce au mécontentement des jeunes électeurs. Mais son parti, le Pastef, ne disposait que de 26 sièges au sein du parlement de 165 membres, aujourd’hui dissous. Il faisait partie d’une coalition qui comptait au total 56 législateurs.

Cela pourrait changer lors des élections de novembre, a déclaré le cabinet de conseil en risques politiques Eurasia Group, citant la popularité des initiatives du président, notamment un dialogue national sur la réforme du système judiciaire et un audit financier en cours, visant à éradiquer les inefficacités et les gaspillages.

« Historiquement, les résultats des élections législatives ont tendance à s’aligner sur ceux des élections présidentielles lorsqu’elles ont lieu peu de temps après », a déclaré Eurasia.

Les chances de Faye pourraient également être accrues par la perspective d’une période économique plus favorable à l’horizon, grâce aux recettes tirées de ses ressources naturelles nouvellement exploitées.

Le Sénégal est devenu un producteur de pétrole en juin, lorsque la société australienne Woodside Energy a commencé à produire dans son champ pétrolier et gazier de Sangomar. La production de gaz devrait également commencer d’ici la fin de l’année dans le cadre du projet de gaz naturel liquéfié Greater Tortue Ahmeyim, exploité par BP.

« L’administration actuelle du Sénégal utilisera ces revenus des ressources pour réduire les importants déséquilibres extérieurs et fiscaux du pays », a déclaré Evghenia Sleptsova, analyste chez Oxford Economics, dans une note de recherche.