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Le couloir de la mort

La garde à vue, le début d’une procédure judiciaire, se solde, à certaines occasions, par des morts qui soulèvent des interrogations. Les pertes en vies humaines constatées amènent les organisations de défense des droits humains à exiger des enquêtes, qui, souvent, ne constituent que de simples faits d’annonce (sans suite), histoire pour l’autorité d’apaiser d’éventuelles tensions.

La garde à vue est une mesure de contrainte par laquelle un gendarme ou fonctionnaire de Police retient pendant une durée légalement déterminée une personne (un suspect) qui, pour les nécessités de l’enquête, doit rester à la disposition des services des auxiliaires de justice.

La personne placée en garde à vue a droit à un examen médical et les irrégularités commises pendant la garde à vue peuvent entraîner la nullité de la procédure. Ce régime est entourée de plusieurs règles dont un délai qui ne doit pas dépasser 48 heures, sauf pour certaines affaires jugées graves, occasion pendant lesquelles elle peut aller jusqu’à 96 heures. Une personne peut être placée en garde à vue s’il existe contre elle des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commise ou tenté de commettre une infraction.

La personne gardée à vue doit être immédiatement informée des motifs de sa garde à vue, de la nature de l’infraction sur laquelle porte l’enquête, des dispositions relatives à la durée de la garde à vue ; elle a le droit de faire prévenir, par téléphone, la personne avec laquelle elle vit habituellement, sa famille ou son employeur, le droit d’être examiné par un médecin désigné par le Procureur.

A défaut de demande faite par la personne, un membre de sa famille peut demander un examen médical. Et le droit de s’entretenir avec un avocat de son choix dès la première heure de la garde à vue (l’entretien est confidentiel et ne peut excéder une durée de 30 minutes) lui est reconnu.

A l’expiration d’un délai maximal de 48 heures ou de 96 heures (le délai prévu à l’alinéa 2 peut être prorogé d’un nouveau délai de 48 heures par autorisation du Procureur de la République, de son délégué ou du juge d’instruction, confirmé par écrit pour affaires de stupéfiants, de délinquance organisée ou de terrorisme), la personne gardée à vue est obligatoirement soit remise en liberté ou est présentée au juge qui décidera de son sort. Cependant, on constate qu’à certaines occasions, des citoyens y perdent la vie, motivant des interrogations sur la façon dont elle est exercée sur le justiciable.

La toute dernière, la mort en détention de François Mancabou qui, selon la déclaration du Parquet se cognait la tête contre le mur et les grilles de sa cellule pour une raison méconnue, remet en question les conditions de l’application du régime de la garde à vue, malgré que le Parquet eut annoncé une vidéo de 13 minutes attestant de cet accident à l’origine de la mort tragique de ce quingénaire.

Une pièce qui suscite d’autres interrogations : les cellules des Commissariats et Brigades ne devant pas disposer de caméras de surveillance, comment cette vidéo a-t-elle ob tenu ? Le gardé à vue a-t-il été filmé de dehors ? Par qui ? En attendant une réponse à ces question, force est de constater que les cas continue de se multiplier sans qu’aucune des nombreuses enquêtes jusque-là annoncées, après des tollés suscités, n’ait livré une conclusion plausible.

Et parmi ces morts en garde à vue qui sèment le doute, il y a aussi le cas du compagnon de Modou Fall Alias «Boy Djinné». Arrêté en même temps que «Boy Djinné», à Missirah, Abdou Faye a été retrouvé mort au Commissariat central. La thèse du suicide annoncée n’a pas été convaincante, pour sa famille. La thèse officielle fait état d’une pendaison à l’aide d’un filet de bain.

De retour au bercail pour le Magal de Touba, Cheikh Niass arrêté pour un contrôle de routine a perdu la vie lui aussi après sa garde à vue au Commissariat de Wakhinat Nimzatt à Guédiawaye et son transfert à la prison du Cap Manuel. Sa mort est classée dans l’ordre naturel des choses ; la famille du défunt écarte cette thèse en soutenant que la victime ne souffrait d’aucune maladie pouvant causer son décès.

Sur la liste des morts en garde en vue figure également le nom d’Elimane Touré, un transitaire retrouvé mort en 2017 dans sa cellule du Commissariat spécial du Port de Dakar où il était placé en garde à vue. Le suicide par pendaison est la cause officiellement annoncée.

Une version qui n’a pas convaincu sa famille. Ces quelques exemples ne sont qu’illustratifs de cas qui souvent rapportés par les médias depuis un temps.

A signaler que les organisations de défense de droits de l’homme plaident très souvent pour l’amélioration des conditions de détention dans les Commissariats et Brigades dont le rôle se limite à mener des enquêtes et non d’obtenir des preuves ou aveux, coûte que coûte.

Fatou NDIAYE

Jean Louis Verdier - Rédacteur en Chef Digital - Paris- Dubaï - Hong Kong dakarecho@gmail.com - Tél (+00) 33 6 17 86 36 34 + 852 6586 2047

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