L’ancien président du Suriname, Desi Bouterse, 78 ans, ne se présentera pas à la prison où il est attendu vendredi 12 janvier pour purger sa peine de 20 ans d’incarcération pour l’assassinat de 15 opposants en 1982, a annoncé son épouse Ingrid Bouterse à la presse.
«Non», a-t-elle répondu devant sa maison aux journalistes qui lui demandaient si Desi Bouterse allait respecter la convocation de la justice. «Vous savez tous qu’il s’agit d’un processus politique et nous donnons une réponse politique», a-t-elle dit.
«Il a bénéficié d’une amnistie et c’est pourquoi nous voulons répondre politiquement avec les gens du parti», a-t-elle ajouté faisant allusion à une loi d’amnistie votée par le parlement en 2012 alors qu’il était président. La justice avait néanmoins suivi son cours jusqu’au procès en appel terminé en décembre.
L’ancien président, condamné en appel, a comparu libre à son procès mais n’était pas présent au dernier jour le 20 décembre à la lecture de sa condamnation. Trois des autres quatre co-condamnés se sont présentés à la prison Santa Boma, en périphérie de Paramaribo alors que Desi Bouterse et Iwan Dijksteel, autre co-condamné, ancien garde du corps, ne s’y sont pas rendus.
Le parquet a annoncé en milieu d’après-midi dans un communiqué avoir «entamé une enquête concernant les personnes condamnées (…) qui ne se sont pas enregistrées auprès de l’établissement pénitentiaire comme indiqué dans l’ordre d’exécution des peines, qui a été délivré à toutes les personnes condamnées le 10 janvier 2024».
Si le parquet a annoncé sa ferme intention de faire exécuter la peine, certains observateurs estimaient que l’ancien président ne serait pas incarcéré. Les autorités ont en tout cas construit une cellule isolée pour Desi Bouterse dans le complexe de l’hôpital militaire du Suriname, à une dizaine de minutes du centre de Paramaribo, au cas où il aurait besoin d’un traitement médical immédiat.
Il «est bien là où il est»
Quelque 200 partisans de Desi Bouterse étaient présents devant la maison de l’ancien président. Ramon Abrahams, un ami proche et vice-président du Parti national démocratique (NDP) fondé par Bouterse, a déclaré à l’AFP que l’homme politique est toujours très populaire et «est bien là où il est».
«C’est ce qu’il m’a dit», a-t-il déclaré. «Je peux dire qu’il est entre l’océan Atlantique, la chaîne de montagnes Tumucumaque, le fleuve Corentyne et le fleuve Maroni», a-t-il poursuivi, en référence aux limites géographiques du Suriname.
«Notre chef n’a jamais abandonné ce pays et nous ne le ferons pas non plus», a ajouté Ramon Abrahams, demandant aux sympathisants «de garder la tête froide, mais aussi d’être très attentifs à ce qui va se passer dans les jours à venir. Bouterse a indiqué qu’il ne se rendrait pas en prison. Le parti le soutient pleinement».
La condamnation en appel de Desi Bouterse met fin à 16 ans de procédures. L’ancien président a épuisé tous les recours judiciaires possibles dans le pays mais peut encore demander une grâce. Quelques jours avant sa condamnation, des milliers de ses partisans s’étaient rassemblés au siège de son parti aux cris de «Free Bouta» («Libérez Bouta»), son surnom.
Dans un discours, le même jour, Desi Bouterse avait appelé au calme : «Ne semons pas la pagaille. Nous allons tenir jusqu’aux élections de 2025». Il avait toutefois souligné que «les choses peuvent déraper», allusion à de possibles troubles que pourrait provoquer son incarcération. Auteur de deux coups d’État, l’ancien homme fort de l’armée, qui dirigeait une junte en 1982, a été élu président du Suriname en 2010 et l’est resté jusqu’en 2020.
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