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L’Amazonie, un paradis presque perdu

Vue du ciel, l’Amazonie est une immensité infinie d’un vert profond, seulement veinée des rivières bleues qui y serpentent. Une immensité infinie. Pour l’instant.

Car si l’on poursuit le survol vers les confins de la plus grande forêt tropicale du monde, on découvre de gigantesques cicatrices brunes, là où la jungle a été rasée puis brûlée pour faire place à des routes, des carrières de mines d’or, des récoltes et surtout des ranchs pour l’élevage du bétail.

C’est le fameux « arc de la déforestation » qui marque une saignée en travers de l’Amérique du Sud. La déforestation de l’Amazonie a atteint 17 % de sa surface totale, souligne le Vénézuélien Gregorio Mirabal, chef de l’Organe de coordination des organisations autochtones du bassin de l’Amazone (Coica), qui représente 3,5 millions d’habitants de l’Amazonie répartis sur neuf pays ou territoires.

« Si cela atteint 20%, il sera très difficile de revenir en arrière. La même désertification, le même manque d’eau, les mêmes incendies vont dévaster l’Amazonie.

Nous sommes à un tournant », prévient-il, alors que les dirigeants du monde sont réunis depuis le 31 octobre et jusqu’au 12 novembre à Glasgow, en Écosse, pour tenter de limiter le réchauffement de la planète à +1,5°C par rapport à l’ère pré-industrielle.

Jusqu’à récemment, grâce à sa végétation luxuriante et à la photosynthèse, le bassin amazonien a absorbé une bonne part des émissions de carbone dans l’atmosphère.

Mais des études montrent que l’Amazonie se rapproche d’un « point de basculement » climatique, ce seuil critique au-delà duquel le changement d’un écosystème est irréversible, qui la verra se dessécher et devenir savane, tandis que ses 390 milliards d’arbres mourront les uns après les autres.

Si l’Amazonie atteint le « point de basculement », au lieu de limiter le réchauffement climatique, elle l’accélérera tout à coup, recrachant dans l’atmosphère une décennie d’émissions de carbone.

Aujourd’hui, la destruction s’accélère, surtout depuis que le président d’extrême droite et climato-sceptique Jair Bolsonaro est arrivé au pouvoir au Brésil en janvier 2019. Il veut ouvrir les terres protégées à l’agronégoce et à l’extraction minière sur les 61% de l’Amazonie située en territoire brésilien.

La destruction est en marche aussi pour le vivier extrêmement riche d’espèces interdépendantes – plus de trois millions répertoriées – dont l’emblématique aigle harpie féroce et le majestueux jaguar.

Les peuples indigènes, gardiens de la forêt grâce à leurs traditions millénaires, souffrent en outre des incursions violentes d’orpailleurs sur leurs territoires.

« Chaque arbre génère de l’air pur et ramasse les déchets qui proviennent d’autres pays, de la pollution, mais pour cela nous ne recevons rien », poursuit Gregorio Mirabal, pour qui il faut un « financement global, réparti équitablement entre les neuf pays ».

« Or, il n’y a pas de financement clair aujourd’hui: on ne sait pas combien d’argent a été investi en Amazonie, s’il arrive jusqu’ici et où. »

L’exploitation du pétrole et des minerais, la pollution et la déforestation pour l’agriculture et l’élevage en Amazonie sont liés à la consommation mondiale: les produits qui asphyxient les 8,4 millions de km2 d’Amazonie, comme l’or, le bois, le soja ou encore le boeuf, se retrouvent dans des maisons à travers le monde.

« Le pire danger » pour l’Amazonie « est le manque de volonté politique de nos gouvernements, qui va de pair avec la corruption, la non-application de nos droits », résume Gregorio Mirabal.

« Les pays développés doivent considérer l’Amazonie comme un territoire qui les fait vivre eux aussi. Nous voulons protéger l’Amazonie pour protéger l’humanité. »

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