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La justice turque tente d’écarter Ekrem Imamoglu, le maire d’Istanbul, avant les élections

Le maire d’Istanbul Ekrem Imamoglu, une figure de l’opposition turque, a été condamné mercredi à plus de deux ans de prison pour « insulte à des responsables » et à une interdiction de mandat politique de même durée, à six mois d’élections cruciales en Turquie.

M. Imamoglu a aussitôt décidé de faire appel de cette condamnation à deux ans, sept mois et quinze jours de détention, a annoncé à l’AFP son avocat, Me Kemal Polat.

L’appel sera suspensif, a-t-il précisé, ce qui signifie que M. Imamoglu conservera son mandat de maire pendant l’examen de son recours.

Le verdict rendu par un tribunal d’Istanbul assortit la peine prison de M. Imamoglu d’une « privation de certains droits », dont celui d’éligibilité, pour la même durée que la peine de prison, ont dit les avocats.

« Ce procès résume la situation de la Turquie », a lancé dans la soirée M. Imamoglu, juché sur le toit d’un bus, face à des milliers de personnes rassemblées devant la mairie scandant « Vive la liberté, Mort à la tyrannie ! », « Gouvernement, Démission! » ou « Droit, Loi, Justice ! ».

« Depuis la victoire »
« Ça a commencé le jour où ils ont essayé de nous priver de notre victoire aux élections (municipales) d’Istanbul. Mais ils ne réussiront pas », a-t-il martelé.

Le maire, âgé de 52 ans, est vu comme un candidat potentiel à l’élection présidentielle de juin 2023 face au chef de l’Etat Recep Tayyip Erdogan.

Membre du CHP (social-démocrate), le principal parti d’opposition, il était accusé d’avoir qualifié d' »idiots » les membres du collège électoral qui avaient invalidé son élection en mars 2019, ce qui lui vaut d’être poursuivi en justice.

« Je ne faisais que répondre, en lui renvoyant ses propres termes, au ministre de l’Intérieur qui m’avait traité d’idiot », avait affirmé l’édile.

M. Imamoglu a toujours professé sa « confiance en la justice turque » et dénoncé une « affaire politique » : « Il ne peut y avoir un tel jugement. C’est tragicomique », estimait-il le mois dernier.

Il s’est retrouvé dans le viseur du régime après avoir infligé en mars 2019 sa plus humiliante défaite au parti de M. Erdogan, en remportant la mairie d’Istanbul qui était dirigée depuis 25 ans par le parti AKP au pouvoir.

Son élection a d’abord été annulée par le gouvernement, contraint de s’incliner trois mois plus tard face à la mobilisation de l’électorat qui a offert une plus large victoire à l’opposant.

« Encore jeune »
Le maire d’Istanbul compte parmi une poignée de dirigeants d’opposition que les sondages donnent gagnants face à M. Erdogan, confronté à une grave crise économique et à une inflation officielle de 85%.

« Je ne m’adresse pas qu’à Istanbul, mais aussi à Ankara, Izmir, Diyarbakir, Trabzon » prévenait-il mercredi soir, énumérant d’autres villes passées aux mains de l’opposition, dont les élus ont parfois été écartés par le pouvoir : « A ceux qui essaient de nous intimider : je suis encore jeune et je suis toujours enthousiaste! » a-t-il clamé, reprenant le slogan en vigueur au moment de son élection.

Pour le directeur-fondateur de l’Institut de sondage et de recherches MetroPOLL, Ozer Sencar, « cet événement peut se transformer en une belle opportunité pour l’opposition si elle sait en profiter… », a-t-il estimé sur Twitter.

Dans la foule, on approuve: « Je suis ici pour le soutenir et nous continuerons ainsi jusqu’à l’élection de 2023 », assure Neslihan Oyku Sahin, un avocat de 23 ans.

« Il l’ont puni pour l’empêcher d’être président, mais c’est lui que le public aime et veut: je pense qu’il recueillera les votes de toutes les catégories de la société », renchérit Firdevs Gulmez, ménagère de 55 ans.

L’alliance de l’opposition, composée de six partis dont le CHP, n’a pas encore désigné son candidat commun pour la présidentielle.

Le chef du CHP, Kemal Kilicdaroglu, semble prêt à se présenter.

En déplacement à Berlin, il a avancé son retour en Turquie mercredi soir : avant de monter dans l’avion il a dénoncé, dans un message vidéo posté sur Twitter, « un massacre de la loi » et « une justice pourrie ».

Mais tout en affirmant son soutien au dirigeant de son parti, M. Imamoglu a assuré mardi soir à la veille du procès, dans un entretien avec la chaîne de télévision TV 100, que ses « épaules » étaient « capables de porter toutes sortes de responsabilités ».

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