Amérique

Joe Biden en Géorgie en grand défenseur des droits civiques

Le président américain tente de rallier l’opinion publique américaine à deux lois censées protéger l’accès au vote des minorités, mises en danger par des législations locales.

Le déplacement est symboliquement chargé et politiquement risqué: Joe Biden se rend mardi 11 janvier en Géorgie pour faire avancer une promesse cruciale de sa présidence, celle de protéger l’accès des minorités, et particulièrement des Afro-américains, au droit de vote.

Le président américain, avec la vice-présidente Kamala Harris, ont choisi cet État du sud emblématique de la lutte passée pour les droits civiques, mais aussi des déchirements politiques d’aujourd’hui, afin de défendre un projet de législation sur le droit de vote.

Il ne s’agit pas de légiférer sur ce droit en lui-même mais sur les conditions dans lesquelles il s’exerce, depuis l’inscription sur les registres électoraux jusqu’au décompte des voix, en passant par le vote par correspondance ou la vérification d’identité des électeurs. Autant de critères que nombre d’États conservateurs du Sud ont entrepris de modifier, avec pour effet de compliquer, en pratique, l’accès aux urnes des Afro-américains et des minorités en général.

«Nous devons être fermes, résolus et inflexibles dans notre défense du droit de vote et du droit à ce que chaque vote compte», a tweeté lundi le président démocrate. «Nous attaquons la bête à la gorge, nous attaquons les tentatives de barrer l’accès aux urnes, nous attaquons la subversion et l’obstruction électorale», a clamé l’un de ses conseillers, Cedric Richmond, cité par le site Politico.

Joe Biden, dont l’agenda économique et social s’est enlisé, s’est donné une nouvelle priorité: protéger les acquis du «Voting Rights Act». Ce texte, qui a couronné des années de lutte pour les droits civiques, interdit depuis 1965 la discrimination dans l’accès au vote. Les activistes estiment que cet héritage est menacé dans plusieurs États, dont les dirigeants républicains soutiennent avec ferveur Donald Trump et ses déclarations sans fondement sur une fraude massive lors de la dernière élection présidentielle.

Chuck Schumer, chef de file des sénateurs démocrates
La Géorgie, où se rend Joe Biden, a par exemple restreint l’exercice du vote par correspondance, ou interdit la distribution d’eau ou de repas aux électeurs qui attendent, parfois pendant des heures, de voter. L’État a aussi renforcé le contrôle des élus locaux – majoritairement conservateurs – sur les opérations de vote.

«C’est une insurrection à bas bruit, mais très, très pernicieuse», selon Chuck Schumer, chef de file des sénateurs démocrates. En riposte, Joe Biden veut que le parlement pose un cadre législatif fédéral constitué de deux lois: le «John Lewis Voting Rights Advancement Act» et le «Freedom to vote Act».

Le président démocrate veut par exemple rendre férié le jour de l’élection, élargir le vote par correspondance, permettre aux électeurs de s’inscrire sur les listes électorales le jour du scrutin, ou autoriser aussi un large éventail de documents pour pouvoir s’identifier au moment de voter, une mesure particulièrement critiquée par les républicains qui estiment qu’elle facilite la fraude. Les républicains font bloc contre ces projets, vus comme un coup de force de Washington contre les compétences des États. «C’est une confiscation du pouvoir. Je m’y opposerai de tout mon être», a déjà promis le sénateur conservateur Lindsey Graham.

Ces deux lois doivent cependant passer l’obstacle du Sénat américain, ce qui nécessite, normalement, 60 voix. Or les démocrates en ont 51 et les républicains 50. Il est néanmoins possible de faire sauter ce verrou, connu sous le nom de «filibuster» dans le jargon parlementaire américain.

Mais la manœuvre parlementaire exige une parfaite discipline des sénateurs démocrates, qui est loin d’être acquise. Joe Biden le sait bien, lui qui a dû renoncer à un immense programme de réformes sociales progressistes à cause d’un seul sénateur démocrate, Joe Manchin. Cet élu de Virginie occidentale est aujourd’hui réticent à suivre la voie parlementaire tracée par les démocrates sur les «voting rights».

Et le temps presse pour Joe Biden: il risque de perdre cet automne sa mince majorité parlementaire lors d’élections de mi-mandat historiquement défavorables au pouvoir en place, et qu’il aborde avec une cote de confiance anémique. Le président américain, qui a bénéficié pendant sa campagne du soutien jugé décisif de l’électorat afro-américain, est donc attendu au tournant par les activistes.

«Ce sera une farce si nous arrivons au jour férié en mémoire de Martin Luther King», c’est-à-dire le 17 janvier, «sans qu’ils n’aient été capables de passer au Sénat la législation sur l’accès au vote», avertit Cliff Albright, cofondateur du Black Voters Matter Fund, qui milite pour augmenter la participation électorale des Afro-américains en Géorgie.

Jean Louis Verdier - Rédacteur en Chef Digital - Paris- Dubaï - Hong Kong dakarecho@gmail.com - Tél (+00) 33 6 17 86 36 34 + 852 6586 2047

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