Niger

Huit personnes tuées dimanche au Niger par des hommes armés

Six expatriés français et deux Nigériens ont été tués dimanche au sud de Niamey par des hommes armés. Le groupe composé de six personnes, d’un guide et d’un chauffeur, aurait été attaqué alors qu’il se trouvait dans la zone de Kouré.

« Il y a huit morts », a confirmé à l’AFP, Tidjani Ibrahim Katiella, le gouverneur de la région de Tillabéri. Au moins l’une des victimes serait identifiée. Il s’agit d’un Français. Une source nigérienne haut placée assure que les cinq autres expatriés sont également de nationalité française.

L’organisation humanitaire Acted a annoncé dans la soirée que des membres de son personnel font partie des victimes. Paris a pour sa part confirmé dimanche que des Français avaient péri, sans en préciser le nombre, et que la force Barkhane avait fourni un appui aux forces nigériennes.

Kouré abrite un parc connu pour accueillir les dernières girafes d’Afrique de l’Ouest. Situé à moins de 70 kilomètres au sud-est de Niamey, c’est une destination bien connue des voyageurs et des étrangers vivant dans la capitale. Selon le gouverneur, l’attaque se serait produite vers 11 heures, à 6 kilomètres de la localité de Kouré.

Les victimes auraient été tuées par balles, a expliqué une source à l’agence assurant avoir retrouvé des étuis au sol. Cette source ajoute qu’une femme serait parvenue à s’enfuir avant d’être rattrapée et tuée à l’arme blanche.

Le gouverneur n’a lui donné aucun détail sur les circonstances de l’attaque. « Nous sommes en train de gérer la situation ». Les autorités ont été alertées par les passagers d’un bus qui, venant du sud, a découvert la tuerie.

Le véhicule touché, retrouvé brûlé selon des photos diffusées par des journalistes locaux, est un 4 x 4 enregistré au nom d’Acted. Cette ONG française travaille au Niger depuis une dizaine d’années, notamment dans la zone de Tillabéri.

Des parcs sous la coupe de djihadistes
Les circonstances de ces meurtres demeuraient troubles. Des hommes armés seraient venus à moto à travers la brousse pour s’approcher de la nationale N1, l’une des principales routes du pays. Ils auraient alors tendu une embuscade à la voiture. Les autorités restent silencieuses sur l’identité des assaillants mais l’hypothèse d’un attentat islamiste est largement envisagée même si les alentours de Kouré étaient jusqu’à présent considérés comme calmes.

Les djihadistes ont pour habitude d’utiliser des motos, un mode de déplacement d’ailleurs interdit dans la région depuis janvier. Le pays subit depuis 2010 l’impact de la montée du djihadisme puis de la guerre au Mali, qui a rapidement débordé de ses frontières pour affecter l’ouest du Niger. Au sud, à la frontière avec le Nigeria, les autorités de Niamey doivent aussi lutter contre les djihadistes de Boko Haram qui se livrent à des incursions très régulières, mais jamais aussi loin dans le pays.

La réserve de girafes de Kouré ne se trouve en revanche qu’à une centaine de kilomètres du Parc national du W, un immense territoire à cheval sur le Niger, le Bénin et le Burkina Faso. Autrefois haut lieu du safari ouest-africain, il est désormais déserté par les visiteurs et connu pour servir de base arrière à différents mouvements djihadistes venus du Mali.

Ainsi, c’est dans le parc voisin du Pendjari, au Bénin, que deux Français avaient été kidnappés en mai 2019. Ils avaient été libérés une semaine plus tard dans l’est du Burkina au cours d’une opération lancée par les forces spéciales françaises où deux militaires avaient trouvé la mort. Le Pendjari, le W et le parc d’Arly sont liés par une continuité territoriale et forment l’ensemble du WAP, 4 700 kilomètres carrés, depuis classé en zone rouge par le Quai d’Orsay.

Ces parcs ont peu à peu été placés en coupe réglée par des islamistes. Les premiers djihadistes auraient conduit des reconnaissances vers le W dès 2015 selon l’Institut Thomas More. Les miliciens de l’État islamique au Grand Sahara (EIGS) s’y seraient implantés au début de 2019 d’après un expert, descendant depuis leur fief malien le long de la frontière est du Burkina Faso.

Ces derniers mois, des éléments du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), lié à al-Qaida et aujourd’hui en guerre ouverte contre EIGS, y auraient été à leur tour signalés. « Les parcs naturels représentent des sites précieux pour les djihadistes qui peuvent facilement s’y cacher et braconner », souligne un expert.

Reste que le Niger était jusqu’à présent relativement épargné par les attaques et les enlèvements contre les étrangers, même si ces derniers évitent la plus grande partie du pays. En 2010, cinq Français avaient été capturés à Arlit, au nord, sur un site d’Areva. En 2011, deux jeunes Français avaient été enlevés dans un restaurant au cœur de Niamey. Ils avaient été tués peu après dans une tentative de libération conduite par l’armée française.

« Si cela se confirme que c’est un attentat, c’est une alerte très sérieuse car on pensait cette époque dépassée et cela affecte une zone qui n’était pas considérée comme dangereuse. Cela montre que les djihadistes sont toujours très actifs », analyse un fonctionnaire nigérien qui préfère rester anonyme.

Par Tanguy Berthemet

Digital Manager - Chef de projet chez Alixcom Dakar | E-mail: saliou@dakar-echo.com | +221 77 962 92 15

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