Il rit, il pleure, il s’excuse: le président américain Joe Biden, réputé homme le plus puissant du monde, n’a pas peur de montrer ses émotions, en rupture avec ses prédécesseurs.
Lundi, il demandait ainsi pardon depuis Glasgow (Ecosse), au nom des Etats-Unis, pour les actions de son prédécesseur Donald Trump, qu’il a battu il y a exactement un an.
La veille, à Rome où il a rencontré le pape, il avait les larmes aux yeux en évoquant son fils Beau, décédé en 2015.
Après l’assurance discrète de Barack Obama et les fanfaronnades de Donald Trump, Joe Biden assure donc son mandat en se confiant sans retenue.
Loin du credo politique selon lequel s’excuser revient à reconnaître ses faiblesses, il ne cesse de demander pardon. Pardon d’être en retard, de trop parler, d’être ennuyeux, ou de ne pas être aussi intelligent que ses conseillers dans la pièce.
Ses excuses participent souvent d’une autodérision subtile. « Salut tout le monde, je suis le mari de Jill », dit-il régulièrement lorsque la Première dame Jill Biden est présente.
Et il accueille généralement les mauvaises nouvelles — il en a reçu un paquet ces derniers temps — par un rire ou un sourire.
Lorsqu’il a dû se rendre à l’évidence qu’il n’avait pas les voix pour faire adopter la gratuité de l’université publique pour tous les Américains, il a plaisanté en disant qu’il ne serait plus le bienvenu dans le lit conjugal (son épouse Jill enseigne justement dans une fac publique).
« Il y a beaucoup de chambres à la Maison Blanche », s’est-il esclaffé.
S’excuser de s’excuser
Ses excuses de lundi, sur le fait que Trump avait sorti les Etats-Unis de l’accord de Paris sur le climat, ont pris une tournure classique pour lui: il a commencé par s’excuser de s’excuser.
« J’imagine que je ne devrais pas demander pardon mais c’est le cas », a-t-il dit.
Et ses remarques émues la veille à propos de son fils Beau, décédé d’un cancer du cerveau, semblaient sincères.
Après son entretien avec le pape François, il s’est souvenu que ce dernier, en déplacement aux Etats-Unis lors de la mort de Beau, lui avait adressé ses voeux.
Ce soutien avait eu « un tel effet cathartique », a confié Joe Biden depuis Rome, au moment où « la blessure était encore à vif ».
Identité politique
Mais pour Biden, cette émotivité n’est pas juste un trait de personnalité, cela fait partie de son identité politique.
Celui qui se décrit comme venant de la classe moyenne, qui adore prendre le train et s’enorgueillit de ses racines à Scranton, ville ouvrière de Pennsylvanie, veut convaincre qu’il refuse d’endosser les habits d’un homme politique comme les autres.
Avec l’âge — il affiche 78 ans au compteur — et les responsabilités, l’image de ce personnage s’est transformée, aux yeux de nombreux Américains, en celle d’un oncle sage mais joueur.
Ses détracteurs y voient le signe que Biden est trop fragile pour les rudes combats politiques dans les couloirs de Washington. Ils soulignent notamment qu’il n’a pas encore été en mesure de faire adopter ses ambitieux plans d’investissements par son propre parti.
D’autres vont jusqu’à remettre en question son acuité mentale.
« Allez! »
Après 9 mois à la Maison Blanche, Joe Biden est indéniablement en mauvaise posture: 54% d’Américains désapprouvent sa politique, selon un récent sondage de NBC News, contre 42% qui la soutiennent.
Il ne se passe pas un jour sans que Donald Trump le critique, prétendant contre toute évidence qu’il a remporté l’élection de 2020 et préparant le terrain pour la prochaine élection, en 2024.
Et c’est la panique dans le camp démocrate, dont le candidat au poste de gouverneur en Virginie pourrait perdre mardi contre un trumpiste, présageant de lourdes pertes lors des élections législatives de mi-mandat, l’an prochain.
Mais Joe Biden ne se laisse pas abattre. Tout au plus laisse-t-il parfois échapper un « Allez! » exaspéré.
Ou, comme à Rome, hausse-t-il les épaules en lançant que les sondages, « ça monte et ça descend ».
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