Société

Drames récurrents au Sénégal: Mille promesses de sanctions, zéro coupable et zéro sanction !

Macky Sall sur la nécessité de sanctionner rigoureusement les manquements constatés

Samedi dernier, un incendie a occasionné la mort sur le coup de quatre bébés — deux autres admis en réanimation ont succombé 48 heures après — à l’hôpital Maguette Lô de Linguère.

Comme après chaque tragédie, les autorités ont encore promis des enquêtes et des sanctions. Des sanctions qui, comme d’habitude, vont être rangées aux oubliettes… Macky Sall a indiqué la nécessité de sanctionner rigoureusement les manquements constatés

Le choc reste très vif après la mort de six nourrissons dans l’incendie survenu samedi dernier l’hôpital Maguette Lô de Linguère. Sur les réseaux sociaux, dans les médias et autres lieux d’échanges, mais aussi dans les grand-places, les transports en commun etc. des sanctions sévères sont réclamées par nos compatriotes surtout quand il a été révélé que le personnel de garde était absent au moment des faits.

Même le président de la République a demandé hier des sanctions en Conseil des ministres. Après avoir présenté ses condoléances les plus attristées aux parents et familles des « quatre » nouveaux nés, le président de la République a demandé, à ce propos, au ministre de la Santé et de l’Action sociale, de faire toute la lumière sur « cette affaire, qui révèle des dysfonctionnements notables des services, mais également l’impératif de procéder à des réformes urgentes et en profondeur du système de santé dans toutes ses dimensions. »

Tu parles, alors qu’il aurait plutôt dû demander au même ministre de la Santé de lui présenter immédiatement sa démission ! En tout cas, Macky Sall a indiqué la nécessité de sanctionner rigoureusement les manquements constatés et de déployer toute l’assistance psychosociale requise aux parents endeuillés.

« Le président de la République invite, en outre, le ministre de la Santé et de l’Action sociale à engager sans délai, en relation avec les ministres en charge des constructions et de la protection civile, un audit général des infrastructures sanitaires, notamment les constructions et installations abritant les services et équipements de santé sur l’ensemble du territoire national », peut- on lire dans le communiqué sanctionnant la réunion hebdomadaire du Conseil des ministres.

Une demande sanction qui sera dans les jours ou mois à venir rangée aux oubliettes. Surtout avec l’approche des élections locales…Car, si on fait la rétrospective des différentes tragédies survenues dans notre pays ces dernières années, on peut affirmer sans crainte que ce drame sera le énième qui n’aura pas de coupables, encore moins de responsables.

À preuve, le 15 juillet 2017, au stade Demba Diop de Dakar, une bousculade, suivie de l’effondrement d’un pan de mur, avait entrainé la mort de 8 personnes.

Au lendemain de ce drame, les autorités étatiques avaient promis que toute la lumière allait être faite sur cette affaire. « Indigné par les incidents du stade Demba Diop qui ont occasionné des morts et des blessés, le président de la République a donné des instructions fermes pour que la lumière soit faite sur ce drame et que les responsables soient identifiés et sanctionnés sans faiblesse coupable.

D’ores et déjà, il a instruit le Premier ministre de prendre toutes les dispositions requises pour plus de sécurité dans les stades », informait un communiqué de la Présidence.

La suite on la connait. Rien ne fut fait. Seuls des lampistes avaient été emprisonnés, l’entrepreneur ayant réalisé le stade ayant été curieusement épargné… Ne parlons pas du ministre des Sports ou des organisateurs du match ! En 2017 toujours, une autre tragédie enregistrée dans notre pays avait fait le tour du monde.

Elle s’était déroulée à Bettenty, un village des îles du Saloum. Ce jour-là, lundi 24 avril, 21 dames avaient péri lors de la traversée du fleuve. L’État avait indemnisé les victimes et déclaré les orphelins pupilles de la Nation. Après quoi, le dossier a été définitivement enterré.

Médina Gounass, Bettenty, meurtres, noyades, accidents de la route, des drames sans coupables…
Les exemples sont nombreux. L’incendie du Daaka de Médina Gounass, qui avait fait plus de 30 morts brûlés vifs parmi les pèlerins, est encore fraiche dans nos mémoires. En déplacement sur les lieux, le ministre de l’Intérieur déclarait que « la paille, le feu et le vent ne font pas bon ménage ». Les autorités savaient cela mais elles ont attendu que l’irréparable se produise avant d’agir en construisant des infrastructures en dur.

À la même période, les meurtres et les accidents routiers se multipliaient. Ce qui avait poussé e président de la République à décréter la tolérance zéro pour les chauffeurs. Mieux, après l’assassinat de l’alors 5ème vice-présidente du Conseil économique social et environnemental (CESE), Fatoumata Matar Ndiaye, le président de la République avait promis promettait l’enfer aux meurtriers. « Nous allons faire des projets de loi lors du prochain Conseil des ministres aux fins de corser les peines contre les crimes de sang. Ainsi, quiconque tuera quelqu’un sera condamné à perpétuité avec travaux forcés sans aucune possibilité de remise de peine », promettait-il. On attend toujours l’aggravation des peines promise…

Rebelote après la série de drames en mer au cours desquels des pêcheurs avaient péri lors de naufrages de leurs embarcations. Là encore, le président Macky Sall avait menacé de ses foudres les pêcheurs qui refusaient de porter des gilets en mer. Hélas, malgré ses menaces, des pêcheurs continuent de voyager sans gilets ou ouvrent leur gilet par devant pour « prendre de l’air », disent-ils. Ce qui est aux antipodes des règles édictées pour le port des gilets de sauvetage.

En 2018, un hélicoptère de l’Armée avec à son bord 20 personnes s’était écrasé dans le Saloum. Huit personnes avaient péri et treize autres avaient été blessées lors du crash de cet hélicoptère, un Mi-17 qui reliait Ziguinchor à Dakar, près de Missirah, dans la zone des Mangroves, région de Fatick.

« Dès réception du message de détresse lancé par un aéronef, toutes les équipes techniques des services aéronautiques sénégalais se sont rendues au Centre régional de navigation aérienne de l’ASECNA, pour suivre la situation en relation avec l’état-major de l’armée de l’air », expliquait le communiqué du secrétariat général du gouvernement. Une commission d’enquête a été diligentée afin de déterminer les circonstances de l’accident, précisait le communiqué. Hélas !

Il y a 19 ans, le naufrage du Joola a causé la mort de 1 863 personnes. coordination des familles des victimes du Joola en dénombre 1 953, car certaines familles se sont fait connaître après la parution du bilan officiel, le 3 février 2003. Seules 64 personnes avaient survécu et 608 corps ont été retrouvés. La région de la Casamance avait particulièrement été touchée : 1 340 victimes, dont 971 rien que pour la ville de Ziguinchor. Le 7 août 2003, l’Etat prend la décision de classer sans suites pénales le dossier.

9 talibés avaient été retrouvés morts à la Médina, 5 enfants étouffés aux Parcelles-Assainies…
Il faut également rappeler que dans l’affaire de la Licence 4G, Macky Sall avait promis de sanctionner lourdement les opérateurs téléphoniques du pays.

Mais au finish, ni Tigo, ni Orange encore moins Expresso n’ont été condamnés à quelque peine ou sanction pécuniaire que ce soit. On se rappelle encore de ce 3 mars 2013, lorsque débarquant de ses bolides et entouré de sa Task force, le président de la République s’était, devant les caméras, engagé à punir les responsables du maintien en esclavage de jeunes enfants réduits à la mendicité et parmi lesquels 9 talibés avaient trouvé la mort dans l’incendie de leur dortoir, à la Médina.

Là encore, Macky Sall avait abdiqué en rase campagne face au lobby des maîtres coraniques ! Comme ces talibés de la Médina, on pourrait citer les 600 victimes de la route en 2016 parler des centaines de morts par accident entre 2017, les 5 enfants des Parcelles Assainies étouffés dans leur minuscule chambre etc.

Comme toujours, Macky Sall avait promis de lourdes sanctions. Au bout du compte, il n’y a jamais rien eu. Personne n’a jamais été condamné. Gageons que pour le drame de Linguère, proximité des élections locales oblige, nul ne sera sanctionné…et surtout pas le ministre de la Santé dont le président de la République a besoin pour reconquérir la Ville de Dakar !

Bassirou Dieng

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