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Des responsables publics nés avant la honte – Par Birane DIOP

Début mars 2020, le Covid-19 menace de ravager les établissements publics de santé, exsangues avant même l’apparition de ce virus insidieux – depuis soixante ans, nos hôpitaux sont des mouroirs à ciel ouvert pour les pauvres. La stupeur était totale. Le stress était intense. La peur se lisait sur les visages. Le pays était dans l’inconnu.

Notre rapport à l’autre avait aussi complètement changé. Des murs étaient érigés entre des gens qui vivaient sous un même toit. C’était le temps des gestes barrières, voire, de la distanciation sociale pour s’épargner la mort. Et pour sauver des vies, surtout celles des personnes les plus vulnérables, on avait fait recours à une pratique moyenâgeuse, tristement. Le « semi-confinement !»

Ainsi, face à la gravité de la situation, de fortes mesures ont été prises pour endiguer la propagation de ce monstre invisible, qui hantait nos nuits. Le 23 mars 2020 sur la RTS – « la Pravda », le président de la République, Macky Sall s’adressa à la Nation pour annoncer ses décisions. Et l’une d’elles était l’état d’urgence conformément à l’article 69 de la Constitution, qui permet au président de la République de décréter sur toute l’étendue du territoire national cette mesure exceptionnelle.

Dans le même sillage, le chef de l’État avait annoncé son intention de saisir l’Assemblée nationale, seule instance habilitée, à voter les lois, à contrôler l’action du gouvernement et à évaluer les politiques publiques ; de légiférer par ordonnances sans passer par l’Hémicycle, eu égard à l’article 77 de la Constitution. Ce fut chose faite quelques jours après son allocution. Par voie de conséquence, il avait les coudées franches pour mener le combat contre l’ennemi.

Les lieux de culte et de culture, et les écoles étaient fermés. Un fonds de 1 000 milliards de F CFA, dénommé « Force Covid-19 » était mis en place pour soutenir notre économie extravertie, terriblement touchée, à l’aune de cette crise historique.

Eu égard au rapport définitif de la Cour des comptes sur la gestion de cet argent public, la juridiction nous informe que ce gros pactole a été mobilisé par les Partenaires au développement, par l’Etat, et par les citoyens (retraités, vendeuses de poissons, marchands ambulants, tailleurs, cadres, footballeurs, la diaspora, etc.). Ce formidable élan de solidarité n’était pas seulement économique.

Les universitaires, écrivains, artistes, journalistes, étudiants, « badiène gox » avaient aussi apporté leur pierre à l’édifice sous différentes formes. L’opposition avait aussi répondu favorablement à l’appel du chef de l’Etat au palais. La solidarité était donc un fait total, malgré les remous politiques.

Mais les magistrats de la Cour des comptes nous disent que pendant que les libertés étaient confinées, des responsables publics sans scrupule, étaient en train de nous extorquer plusieurs milliards de F CFA. C’est tout simplement abject. Ces personnes incriminées par ledit rapport doivent répondre de leurs actes devant la justice. Et qu’ils arrêtent de parader sur les plateaux télé en essayant de justifier l’injustifiable, ou de jeter le discrédit sur les institutions.

A travers ces lignes, j’en profite pour condamner les propos terribles et choquants de Mansour Faye, ministre de la République, à l’égard des magistrats de la Cour des comptes. Un ministre qui accuse des commis de l’Etat, de surcroît, qui ont effectué un travail sérieux, de politiciens encagoulés doit être démis de ses fonctions. Je trouve que ce ministre n’a aucune mystique républicaine. De tels propos fragilisent nos institutions et mettent en danger notre République.

J’espère que le Garde des Sceaux, ministre de la Justice instruira une enquête judiciaire à l’encontre de ces gens dépourvus de générosité et d’éthique, nés avant la honte. Mais peut-on s’attendre à grand-chose de ce gouvernement quand on sait que des rapports sont laissés dans les tiroirs, au bon vouloir du président ?

Birane DIOP

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