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Ce cambriolage au domicile de Neuilly-Sur-Seine de Denis Christel Sassou-Nguesso qui relance une affaire de biens mal acquis

Ce cambriolage au domicile de Neuilly-Sur-Seine de Denis Christel Sassou-Nguesso qui relance une affaire de biens mal acquis

La belle-fille de Denis Sassou-Nguesso, tout-puissant président du Congo-Brazzaville, a déposé plainte après l’effraction de sa « résidence principale ». Un hôtel particulier pourtant saisi en 2022 par la justice.

Dans les locaux du service départemental de police judiciaire des Hauts-de-Seine (SDPJ 92), à Nanterre, une Neuilléenne égrène, ce 19 janvier, la liste interminable des effets personnels qui ont été dérobés le 25 décembre 2023, alors qu’elle était « en voyage en Côte d’Ivoire » dans l’hôtel particulier qu’elle habite.

Le montant du préjudice déclaré donne le tournis : près de 150 000 €, dont 110 650 en maroquinerie de luxe, 13 000 € de joaillerie et plus de 23 500 € en liquide.

Elle redoute également la disparition de « certains documents sensibles », comme des « titres de propriétés », dit- elle dans sa plainte. Elle n’évoque pas, ce jour-là, le potentiel vol de « contrats pétroliers du Congo- Brazzaville » initialement craint par « le propriétaire », comme l’avait écrit l’un des trois policiers primo- intervenant dans son compte rendu d’infraction du 26 décembre 2023. La dénonciation de ce cambriolage aura-t-elle des conséquences inattendues sur une enquête financière sensible ? La question se pose.

Car la plaignante n’est pas n’importe qui : il s’agit de Danièle Sassou- Nguesso, l’épouse de Denis Christel Sassou-Nguesso, ministre et fils du tout-puissant président du Congo- Brazzaville au pouvoir de 1979 à 1992, puis depuis 1997, Denis Sassou-Nguesso. Et ce luxueux hôtel particulier de 524 m2, situé à deux pas de la mairie de Neuilly-sur-Seine, dans les Hauts-de-Seine, est au cœur de l’enquête sur les biens mal acquis ouverte par le Parquet national financier (PNF). Le 20 juin 2022, un juge d’instruction du pôle financier du tribunal judiciaire de Paris a justement ordonné sa saisie pénale immobilière, comme l’avait révélé Mediapart en août 2022.

Une propriété achetée en 2009 pour 5,2 millions d’euros
Les Bongo au Gabon, les Sassou- Nguesso au Congo-Brazzaville, les Obiang en Guinée équatoriale… Depuis 2007, la police et la justice enquêtent sur le patrimoine faramineux en France des familles de trois clans présidentiels africains qui règnent sans partage sur leur pays. Immeubles, hôtels particuliers, voitures de luxe, montres, vêtements de marque, œuvres d’art… Les montants en jeu, qui sont le fruit de la corruption et de détournements de fonds, d’après les enquêteurs, sont astronomiques.

Le sujet de la propriété de ce bâtiment d’exception est central. Pour la justice, ce bien, acheté en 2009 pour 5,2 millions d’euros et rénové pour un montant de 5,4 millions d’euros, aurait été acquis grâce à un vaste système de blanchiment d’argent issu de détournements de la rente pétrolière du Congo-Brazzaville. Mais Denis Christel Sassou-Nguesso conteste formellement en être le propriétaire.

« (Le bien) est officiellement détenu par une SCI mais les investigations cherchent à vérifier si Denis Christel Sassou-Nguesso n’en est pas le véritable bénéficiaire », résume une source judiciaire.

Dans sa plainte, la belle-fille de l’un des plus influents chefs d’État du continent africain a-t-elle commis une bourde ? Elle reconnaît en effet que le luxueux hôtel particulier est bien sa « résidence principale ». Elle précise même que des travaux y ont été entrepris peu de temps avant le cambriolage, dans deux chambres. Le jardin a également été élagué juste avant les faits.

Denis Christel Sassou-Nguesso a pourtant toujours nié l’occuper avec son épouse et leurs quatre enfants. La justice estime, au contraire, qu’il s’agit bien de son domicile, comme en attestent selon Mediapart de nombreux documents saisis en perquisition. « Cette plainte est un aveu de propriété », tranche une source proche du dossier.

Contacté, l’avocat de Denis Christel Sassou-Nguesso, Me Jean-Jacques Neuer, martèle que son client conteste fermement être le propriétaire et l’occupant de cet hôtel particulier. « Il est aujourd’hui séparé de son épouse. Sa résidence est au Congo-Brazzaville, où il exerce ses responsabilités de ministre », avance-t-il.

Les malfaiteurs présumés interpellés
La présence de la famille de l’autocrate congolais dans le logement n’est en tout cas pas anormale tant que l’enquête se poursuit. Un bien saisi peut être occupé jusqu’à son éventuelle confiscation définitive, ordonnée par le tribunal correctionnel. Les occupants des lieux, qu’ils soient propriétaires ou locataires, peuvent donc continuer à y résider. « La saisie interdit simplement le transfert de propriété du bien », éclaire une source judiciaire.

Selon nos informations, l’équipe soupçonnée d’être derrière ce cambriolage a été démantelée les 11 et 12 janvier par la brigade de répression du banditisme (BRB) de la PJ de Paris. Cinq hommes âgés de 23 à 47 ans, gravitant dans le quartier de la rue de Clignancourt (Paris XVIIIe), sont soupçonnés de quinze cambriolages à Paris, Neuilly-sur-Seine, Puteaux (Hauts-de-Seine) et Saint- Maur-des-Fossés (Val-de-Marne) entre juillet 2023 et janvier 2024.

Parmi leurs faits d’armes présumés, le fric-frac du triplex de Neuilly- sur-Seine du défenseur du Bayern Munich et de l’équipe de France Dayot Upamecano, en juillet 2023. Les malfaiteurs avaient alors fait face à la mère et au frère du joueur, qui occupent régulièrement l’appartement. Les suspects sont mis en examen.

L’information judiciaire se poursuit.

Caroline Piquet avec Le Parisien

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